Le peuple chilien a donné un nouvel exemple de sa conscience et de sa force ce dimanche 25 octobre. La Constitution héritée de la dictature de Pinochet a été rejetée par 78% des électeurs lors du référendum qui a réuni 7,5 millions de personnes, soit le taux de participation électorale le plus élevé de l’histoire du pays.
Par Andre Ferrari, Liberdade, Socialismo e Revolução (section brésilienne d’Alternative Socialiste Internationale)
Les électeurs ont également rejeté le Parlement actuel en optant en majorité (79 % des voix) pour que la nouvelle Constitution soit rédigée par une Convention constituante élue à 100 % par le peuple. La proposition rejetée exigeait que la moitié de la Convention constituante soit composée de parlementaires actuels.
La proposition approuvée signifie également l’adoption de la parité de genre dans ce nouvel organe constitutif qui sera élu en avril 2021, ce qui représente une réalisation importante et sans précédent.
Ce référendum représente une avancée majeure dans la lutte pour enterrer les restes de la dictature meurtrière de Pinochet qui avait combiné néolibéralisme et terrorisme d’État et a largement survécu aux 30 années d’une « démocratie » limitée et impopulaire, depuis la fin de la dictature militaire en 1990.
Ce résultat ne constitue pas seulement une défaite pour la droite « pinochiste ». C’est aussi une claque pour tous les hommes politiques qui se disent « démocrates » et qui, même après la fin de la dictature, ont refusé le moindre changement sérieux dans le système politique, économique et social du pays.
L’énorme inégalité sociale et l’absence de droits fondamentaux – tels que l’accès à l’éducation, à la santé et à la retraite – ont fini par provoquer une puissante explosion sociale, déclenchée par l’augmentation des tarifs du métro de Santiago. Depuis lors, le peuple chilien est descendu courageusement dans la rue avec une énorme détermination à se battre.
La conquête de ce dimanche résulte de la lutte massive, inlassable, héroïque et radicale de la jeunesse, des femmes, du peuple mapuche et de toute la classe ouvrière chilienne.
Le soulèvement de masse a illustré la force qui est celle de la classe ouvrière et de tous les opprimés. Cette force a affronté la répression sauvage, lâche et meurtrière des carabiniers (police militaire chilienne) et à l’arrestation de milliers de militants. Elle est également parvenue à renverser le gouvernement et la classe dirigeante du Chili.
La bataille ne fait que commencer
Mais la bataille ne fait que commencer. L’urne ne remplace pas une véritable lutte dans la rue, sur les lieux de travail et dans les quartiers. La mobilisation de masse doit se poursuivre pour la fin de la répression d’État, pour la libération des plus de deux mille prisonniers politiques et pour la punition des responsables des morts, des blessés et des autres conséquences de la répression.
En tant que personne directement responsable de la lâche répression, Piñera doit maintenant descendre. On ne peut pas accepter qu’il y ait un processus constituant véritablement démocratique sous un gouvernement aussi autoritaire et anti-populaire.
La lutte doit également se poursuivre contre les manœuvres et les pièges créés pour museler et contenir la volonté du peuple dans le processus constituant. C’est le cas de l’exigence des deux tiers pour l’approbation des articles de la nouvelle Convention constituante, qui pourrait offrir aux secteurs de droite et conservateur un veto sur les propositions les plus progressistes.
À l’heure actuelle, il est nécessaire d’approfondir l’organisation par en-bas grâce à des assemblées populaires dans les quartiers, les écoles et les lieux de travail, afin de discuter du type de nouvelle constitution nécessaire et de la manière dont elle devrait représenter une véritable rupture avec le système politique et économique actuel du Chili. Il faut que les représentants populaires élus en avril soient le résultat de cette organisation, de ce débat et de cette mobilisation à la base.
Nous n’accepterons rien de moins qu’une constitution qui garantisse l’éducation publique, la santé et la retraite pour toutes et tous. Une constitution qui garantisse les droits des femmes et des peuples indigènes. Une Constitution qui défende l’environnement. Une Constitution qui place les ressources naturelles et les secteurs clés de l’économie sous le contrôle des travailleurs. Que les super-riches paient pour la crise et la garantie de l’emploi, des salaires et de la démocratie pour les travailleurs !
C’est avec la lutte de masse que le processus constituant a été ouvert ; c’est avec la lutte de masse qu’il pourra être utilisé pour transformer radicalement la société. Pour cela, il est nécessaire de construire une alternative socialiste révolutionnaire.