Mouvement de masse de la jeunesse au Nigeria : dégageons la violence policière, dégageons le gouvernement !

Depuis le début du mois d’octobre, les jeunes Nigérians sont descendus en masse dans les rues pour lutter contre la violence policière. Ces manifestations sont les plus importantes depuis la fin de la dictature militaire en 1999. La manifestation est en partie inspirée par le mouvement Black Lives Matter contre la violence policière aux États-Unis, mais aussi par les manifestations de ces dernières années au Soudan contre la dictature d’Omar al-Bashir et la mobilisation des jeunes en Afrique du Sud pour le droit à l’enseignement.

Par Els Deschoemacker

La colère est principalement dirigée contre l’unité de police spéciale SARS (Special Anti-Robbery Squad), créée en 1992. Au lieu de lutter contre le crime, cette unité spéciale est connue pour ses bavures et pour avoir arbitrairement volé, arrêté, torturé et tué des Nigérians. La protestation a commencé après la diffusion d’une vidéo virale avec des images d’une unité du SRAS tuant un homme. En ligne, il y a eu une explosion de témoignages sous le hashtag #EndSARS. Cette initiative a rencontré un écho international. Le régime a promis de dissoudre le SRAS, mais a immédiatement proposé de la remplacer par une unité similaire sous le nom de SWAT. Cette manœuvre n’a pas été acceptée, ce qui illustre la profonde méfiance de la jeunesse nigériane envers les promesses du régime.

Mais cette mobilisation concerne bien plus que le SRAS. « Le SRAS n’est qu’un symbole de tout ce qui va mal au Nigeria », disent nos camarades du MSA (Mouvement pour une Alternative Socialiste), l’organisation sœur du PSL au Nigeria.

Le pays est confronté à sa deuxième récession en cinq ans. Plus de 55 % des Nigérians sont au chômage ou occupent un emploi officieux. Les jeunes constituent la grande majorité de ce groupe. Cela explique la colère et la détermination qui caractérisent les manifestations, et la peur du régime face à cette détermination. Le régime tente maintenant à tout prix de réprimer le mouvement.

Massacre à Lekki (Lagos)

Une manifestation pacifique à un péage de Lekki, une ville de l’État de Lagos, a été brutalement réprimée le mardi 20 octobre. Après avoir instauré un couvre-feu, le feu a été ouvert sur des manifestants pacifiques. Selon Amnesty International, au moins douze personnes ont été tuées.

Le Mouvement pour une Alternative Socialiste participe au mouvement de protestation et a distribué une déclaration dont nous donnons ci dessous une version abrégée avec quelques unes des revendications principales.

Pendant deux semaines, les manifestations ont été organisées de manière pacifique et ordonnée. Les troubles et les manifestations ont pris une nouvelle tournure lorsque le régime a commencé à mobiliser et à financer des criminels pour attaquer les manifestants à Abuja et à Lagos. Il était clair que ce n’était qu’une question de temps avant que le régime ne procède à une déclaration de guerre complète.

Le régime de Buhari a montré que, comme d’autres régimes capitalistes, il est cruel et réprime des manifestants pacifiques, bien qu’il prétende être un « régime de changement ».

La protestation #EndSARS contre les violences policières qui touchent les masses laborieuses et les civils innocents est alimentée par la nature des élites dirigeantes nigérianes. Celles-ci poursuivent une politique capitaliste qui consiste à faire « accepter ou mourir » leur appropriation des ressources de la société.

Le Mouvement pour une alternative socialiste (MSA) condamne les violences policières et tient le régime Buhari comme responsable de tout manifestant abattu. Le gouverneur de l’État de Lagos est également responsable. L’imposition d’un couvre-feu local de 24 heures n’était qu’un prélude aux tirs sur des manifestants pacifiques.

Ce recours à la force est une mesure désespérée prise par l’État pour mettre fin à la manifestation #EndSARS. Ce mouvement de protestation a évolué, passant d’une simple manifestation de jeunes contre la violence policière à un mouvement qui prend le caractère d’une grève générale. Les lieux de travail ont été fermés et des barricades ont été érigées dans les rues, avec des slogans appelant à la fin du régime.

Il n’y a pas de meilleur moment pour le mouvement ouvrier pour réunir ses forces et appeler à une grève générale de 48 heures pour soutenir pleinement la contestation. Si les dirigeants syndicaux n’assument pas cette tâche historique, les travailleurs et les jeunes prendront conscience plus que jamais qu’il faut une nouvelle direction qui défende le bien-être des masses et non le régime.

Il doit y avoir une Conférence nationale souveraine avec des représentants élus des travailleurs des différents secteurs de l’économie, des paysans pauvres et de toutes les couches opprimées. Le MSA y préconisera que la classe ouvrière et les masses pauvres prennent le contrôle des richesses et des ressources du Nigeria afin de répondre démocratiquement aux besoins de tous et de mettre fin à la tyrannie économique du capitalisme.

Nous appelons l’armée et la police à résister aux ordres d’attaquer et de réprimer les manifestants. Ils doivent refuser d’être utilisés comme armes contre leurs sœurs et frères de la classe ouvrière. Ils doivent plutôt s’unir aux manifestants et soutenir leurs revendications.

L’inspecteur général de la police doit démissionner ainsi que les dirigeants militaires, afin que les meurtres de manifestants puissent cesser. Il appartient aux masses ouvrières de mettre fin au régime de Buhari et au capitalisme.

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