D’un gouvernement minoritaire à un gouvernement qui ne résout rien. Seule la lutte permettra d’imposer le changement nécessaire !

Alors que dans tous les pays voisins, des décisions ont été prises ces dernières semaines concernant un plan de relance pour atténuer l’effondrement de l’économie, en Belgique – près de deux ans après que la N-VA ait mis fin au gouvernement Michel – il n’existe toujours pas de gouvernement fédéral à part entière. Le fait que les négociateurs de la Vivaldi continuent à pédaler dans la choucroute pour savoir qui deviendra Premier ministre illustre bien leur impuissance politique. De plus, une semaine avant la date butoir pour former le gouvernement, se cache une autre réalité : ils n’ont aucune idée de ce qu’il faut faire !

Edito de l’édition d’octobre de « Lutte Socialiste », qui sortira demain de l’imprimerie, par Anja Deschoemacker (Cet article a été écrit avant la formation finale du gouvernement).

Les plans de relance chez nos voisins présentent de nombreuses similitudes. La première et sans doute plus importante est que la plupart des ressources seront consacrées au soutien des entreprises plutôt qu’au pouvoir d’achat et au niveau de vie de la population. Seule l’Allemagne, le pays qui possède les plus grandes réserves, soutient le pouvoir d’achat. Les éléments de la note de négociation de la Vivaldi déjà connus suggèrent que le prochain gouvernement ne fera surtout pas de choix et tentera d’attendre une reprise économique.

La perspective la plus probable est que le gouvernement Vivaldi se forme, mais aussi qu’il ne fera pas grand-chose pour résoudre les problèmes colossaux qui se sont accumulés: la crise sanitaire (où 1,2 milliard supplémentaire ne fera guère de différence pour les soins de santé après des décennies de démantèlement), la crise économique (avec la perspective d’une vague croissante de restructurations et de faillites et une forte hausse du chômage structurel), la crise climatique (avec les partis verts se contentant de peu), la crise politique (une forte probabilité que la popularité de tous les partis au pouvoir baissera encore plus et, qu’en Flandre, la perspective d’une majorité de droite populiste et d’extrême droite, N-VA et Vlaams Belang grandira).

Le mécanisme politique belge est en panne. Cela s’illustre, une fois de plus, par l’annonce de nouvelles mesures d’assouplissement des mesures sanitaires alors que nous sommes à nouveau bien au-dessus de 1.000 infections par jour. Le 13 septembre, lors de la manifestation de La Santé en Lutte, le personnel de la santé a été confronté à la répression policière et n’a pas été autorisé à manifester. Mais il a été « autorisé » – à nouveau ! – de payer les conséquences d’une politique qui n’a rien appris des 10.000 morts et n’a rien préparé pour empêcher une nouvelle augmentation du nombre de victimes.

Le gouvernement Michel était détesté à juste titre. Cela s’est vérifié lors des mobilisations syndicales massives de 2014. Si les dirigeants syndicaux avaient alors tenu bon et exprimé leur volonté d’agir plutôt que leur attachement à leurs « partenaires politiques », la population active serait aujourd’hui dans une position plus favorable pour faire valoir ses revendications. En faveur d’un travail sûr et faisable. D’une amélioration du niveau de vie. D’une politique sociale avec des services publics et des soins de santé forts. Pour, en bref, faire fonctionner l’économie selon les besoins de la majorité de la population plutôt que pour les intérêts des capitalistes. Au lieu de cela, cette classe capitaliste pourra s’enrichir davantage sur le dos de la majorité de la population.

Lors de la première vague de la pandémie en Belgique, les dirigeants syndicaux étaient aux abonnés absents. Ce sont souvent de simples militants de base qui, par leur entrée en action, ont imposé des mesures de sécurité pour le personnel sur le lieu de travail et ont mis en avant la nécessite d’orienter l’économie pour contrer le virus dans l’intérêt de la population. Le fait que 1,2 milliard d’euros pour les soins de santé soient mentionnés dans la note de négociation des partis de la Vivaldi est dû au collectif des travailleurs de La Santé en Lutte, qui, en organisant la pression par en bas dans les institutions de santé bruxelloises, a fait comprendre au gouvernement que la paix sociale a effectivement un prix.

Pour en obtenir davantage, une solide bataille devra être menée. Et, sans pression de la base, les dirigeants syndicaux se limiteront à l’action symbolique, se cachant derrière des mesures sanitaires pour assumer leur responsabilité. Pour que la FEB abandonne sa « marge salariale de 0% » dans les négociations de l’accord interprofessionnel (AIP), il faudra plus que les actions limitées du 28 septembre. Plus que jamais, les militants syndicaux et les travailleurs doivent s’organisent pour faire pression sur leurs directions. Plus que jamais, les jeunes, les femmes, les migrants, les sans-papiers,… devront mobiliser le soutien populaire pour faire comprendre au gouvernement qu’ils n’accepteront pas un retour à la normale d’avant le Covid.

Ce n’est qu’en construisant des luttes par en bas que nous pourrons remporter des victoires, comme ce fut le cas lors de la précédente Grande Dépression des années 1930. Que les militants combatifs des syndicats et des mouvements sociaux se préparent aujourd’hui à organiser la résistance et ne se laissent pas distraire par de vagues promesses sociales. Laissons les journaux bourgeois se chamailler pour savoir quel parti obtiendra quel portefeuille ministériel. Préparons la lutte contre le patronat et contre tout gouvernement à son service !

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Première page de Lutte Socialiste