Covid-19 : Grand risque de catastrophe humanitaire alors que le virus se propage dans le monde néocolonial

Bien que la pandémie de coronavirus ait montré qu’elle ne connait pas de discrimination dans la manière dont elle infecte les gens, il est évident que ses effets sur les pays et les peuples qui sont les moins bien préparés et les moins développés économiquement seront probablement les plus dévastateurs.

Par Mike Forster, Socialist Alternative (Section d’Alternative Socialiste Internationale en Angleterre, Pays de Galles et Ecosse)

En prédisant une récession mondiale aussi grave, voire pire, que la crise de 2008-2009 (une estimation en-deçà de la réalité, voir notre article à ce sujet : La Récession Coronavirus a commencé), Kristalina Georgieva, la directrice du FMI, a indiqué que plus de 80 pays en difficulté ont demandé une aide financière d’urgence pour faire face à l’épidémie et à ses conséquences économiques. Pourtant, depuis l’effondrement des marchés financiers, 83 milliards de dollars de capitaux ont quitté les marchés émergents ! L’élite riche ne coopérera pas pour voir ses profits diminuer.

Mme Georgieva a poursuivi en disant qu’ils n’avaient jamais eu auparavant plus qu’une poignée de demandes d’aide urgente, mais que tous ces pays étaient frappés par la chute de la demande intérieure, la baisse des exportations, la fuite des capitaux et l’effondrement des prix des matières premières. Les économies les plus pauvres seront dévastées par la pandémie et le FMI et la Banque mondiale ne pourront offrir qu’une aide symbolique. Elles seront secouées par d’énormes crises financières et politiques qui ne feront qu’attiser le mécontentement qui règne dans le monde néocolonial.

Au Brésil, par exemple, ce ne sont pas les applaudissements qui retentissent dans les rues, mais le bruit des casseroles et des poêles des gens qui exigent que Bolsonaro soit renversé. Ce dernier a décrit la pandémie comme une ruse médiatique et a refusé de considérer les mesures urgentes qui s’imposent pour contrôler la maladie. Même les prisonniers ont été contraints de prendre les choses en main et il y a eu des révoltes massives car les conditions sanitaires se sont détériorées.

Entre-temps, le président mexicain, Andrés Manuel López Obrador, a résisté à l’adoption de mesures plus sévères, telles que la quarantaine et la fermeture des frontières, au motif que les Mexicains pauvres ne peuvent pas se permettre de ne pas travailler. Le gouverneur de Puebla est allé plus loin en affirmant que les pauvres sont immunisés !

Toutefois, la plus grande menace viendra de services de santé médiocres ou inexistants et de logements inadéquats. Par exemple, bien que le président Modi ait imposé un confinement brutal en Inde, il sera impossible pour les 64 millions de personnes vivant dans des bidonvilles surpeuplés et insalubres de s’isoler socialement. Sans travail, des millions de personnes ne pourront pas se nourrir ou s’habiller. Dans le Cachemire voisin, qui subit une occupation militaire depuis octobre dernier, le système de santé est à genoux. Ils ont le plus faible ratio médecin/patient du sous-continent et disposent de 100 respirateurs pour une population de 12 millions d’habitants.

Des problèmes tout aussi aigus apparaîtront en Afrique. L’Organisation mondiale de la santé a averti que la maladie provoquera une crise majeure. Bien que près de 3 000 cas aient été signalés jusqu’à présent, il s’agit probablement d’une énorme sous-estimation. Selon les responsables de la santé en Afrique, les hôpitaux ne peuvent prendre en charge qu’une fraction des personnes nécessitant des soins si le virus se propage dans des villes surpeuplées, des villages isolés et parmi les populations vulnérables telles que les réfugiés, les personnes souffrant de malnutrition ou celles atteintes du VIH et d’autres maladies chroniques.

Les problèmes typiques auxquels le continent sera confronté ont été signalés au Mali, qui a enregistré ses premiers cas la semaine dernière. Les responsables gouvernementaux ont démenti les rapports selon lesquels le Service de santé n’aurait qu’un seul respirateur pour ses 17 millions d’habitants… affirmant qu’il en disposait de 56 !

Les mesures de confinement actuellement imposées entraîneront des difficultés considérables pour les pauvres du continent, dont beaucoup vivent au jour le jour sans emploi officiel. La moitié des cas signalés en Afrique se sont produits en Afrique du Sud, qui vient d’entrer dans une période de confinement de 21 jours. Les habitants des townships disent qu’il sera impossible de s’isoler dans des maisons qui abritent généralement plus de 10 personnes. Le virus pourrait s’y propager tel un feu de forêt.

Un couvre-feu militaire a été imposé au Kenya où la police militaire patrouille dans les rues sur des mobylettes en frappant tous ceux qu’elle croise avec de longues matraques, oubliant bien sûr qu’ils sont susceptibles de propager la maladie par ce contact indésirable !

Comme si cela ne suffisait pas, dix pays d’Afrique de l’Est et du golfe Arabique ont été engloutis par un essaim de criquets pèlerins. La population de criquets a été multipliée par 8 000 et menace l’approvisionnement alimentaire de 25 millions de personnes. L’apparition soudaine des criquets a été attribuée aux conditions météorologiques effrayantes du désert d’Arabie, tout cela en raison de la crise climatique qui se développe.

D’autres endroits du monde néocolonial devraient connaitre des situations très critiques : les régions ravagées par la guerre et les conflits. Par exemple, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, qui sont maintenant en quarantaine, l’embargo strict imposé par Israël a laissé toute la région en proie à une pénurie désespérée de médicaments, d’équipements de sécurité et de respirateurs. Gaza, par exemple, ne dispose que de 62 respirateurs pour une population de 2 millions de personnes, qui vivent toutes dans des conditions d’exiguïté et d’insalubrité. Israël a maintenant fermé les frontières en arguant qu’il doit sauvegarder les intérêts israéliens, ce qui a pour effet d’enfermer les le peuple palestinien avec ses problèmes.

La propagation rapide de la maladie en Iran est bien sûr en partie due aux échecs du régime iranien qui a d’abord tenté de dissimuler l’épidémie. Cependant, les sanctions rigides et continues imposées par le régime américain ont laissé le service de santé dans un état désespéré. Malgré ces difficultés, M. Trump et ses porte-parole ont confirmé que les sanctions resteront en vigueur ! Des sanctions similaires imposées au régime vénézuélien de Maduro ont paralysé le service de santé. Alors que le pays est en état de confinement, les hôpitaux signalent un manque d’équipements de base tels que gants, masques, lunettes, savon, etc. et 25% d’entre eux n’ont même pas l’eau courante. Dans une enquête, 80 % des médecins ont déclaré qu’ils ne disposaient pas d’équipements de protection dans les services de soins intensifs.

Les camps de réfugiés débordant en Grèce et en Syrie, ainsi qu’au Myanmar, font face à une crise sanitaire extrême. Les problèmes massifs et permanents de faim, de surpopulation et de manque d’installations sanitaires de base dans ces camps seront des terrains de reproduction parfaits pour Covid-19. Une fois de plus, il y a la perspective effrayante d’une infection rapide et des décès massifs dans toutes ces régions. La guerre civile en cours en Libye s’est en fait intensifiée car les différentes factions belligérantes ont décidé qu’elles pouvaient régler leurs comptes pendant que le reste du monde est occupé ! Le premier cas de Covid a maintenant été signalé.

Le capitalisme a créé un monde à son image, avec d’énormes déséquilibres et inégalités de richesses. La pandémie va mettre en évidence toutes ces contradictions. Lénine a dit un jour que l’impérialisme créera des horreurs sans fin, ce qui est la perspective dans les régions les plus pauvres de la planète. Les scientifiques ont même évoqué la perspective d’une seconde infection mondiale avec de nouvelles mutations qui pourraient tous nous réinfecter à nouveau. Il est tout à fait évident que ce système est à l’origine de la crise et qu’il sera totalement incapable de protéger l’humanité du tsunami de morts qui s’ensuivra.

La grippe espagnole a fait disparaître 50 millions de personnes sur une population totale de 1,7 milliard. Les scientifiques nous ont tous alarmés en prédisant un bilan de 40 millions de décès dus au Covid-19 si des mesures strictes ne sont pas mises en place. Si certains pays peuvent être en mesure de gérer les mesures de confinement, d’éloignement social et d’intervention sanitaire, il est tout à fait clair qu’un grand nombre de personnes ne pourront pas faire de même.

La crise économique actuelle, qui ne sera comparable qu’à la Grande Dépression de 1929, va balayer le monde sous-développé, créant de nouvelles difficultés massives, un chômage de masse et un grand nombre de sans-abris. Les masses n’auront d’autre choix que de résister et de se défendre. Les conditions d’une révolution mondiale se préparent alors que la grande masse de personnes directement touchées par cette crise en arrive à la conclusion qu’un autre monde doit être créé – et ce doit être un monde socialiste.

 

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