Coronavirus. Retard, désaccords, et enfin mesures timides : qui fait encore confiance à ces gens ?

L’Europe est devenue l’épicentre de l’épidémie de coronavirus. Les pays européens se comportent comme si les frontières arrêtaient le virus : en ordre de bataille dispersé. Leur efficacité est nulle. La même chose vaut pour la Belgique. Des mesures conséquentes font défaut, notamment parce que les politiciens flamands de droite, N-VA en tête, freinent des quatre fers.

Par Anja Deschoemacker

Le 8 mars, Bart De Wever a défendu sur VTM News de ne prendre ‘‘aucune mesure draconienne’’. Plutôt que de se préoccuper de la santé publique, De Wever a démontré qu’il se préoccupait avant tout des intérêts économiques : ‘‘On peut se demander si notre réaction au coronavirus ne sera pas, à terme, pire que le virus lui-même’’. En tant que bourgmestre d’Anvers, il a refusé d’appliquer les premières recommandations fédérales. A peine deux jours plus tard, il plaidait pour un plan d’urgence fédéral ! Ce tournant était également motivé par des questions d’argent : il lui était surtout important de savoir qui payerait pour les dommages économiques. Quelle hypocrisie !

Les frontières linguistiques ont beau ne pas stopper le virus, les désaccords communautaires n’ont pas manqué de retarder l’arrivée d’une riposte adéquate. Pour la N-VA, le Vlaams Belang et des figures de premier plan du CD&V, cette crise était l’opportunité de défendre leur programme de réformes de l’Etat et de confédéralisme.

Des jeux politiques cyniques & les conséquences de 40 ans de réductions budgétaires

Le Covid-19 est 1,7 fois plus contagieux qu’un virus de grippe ordinaire et est très dangereux pour les personnes âgées et les malades. Néanmoins, l’interdiction des visites dans les maisons de repos s’est déroulée en ordre dispersé : après la Wallonie et Bruxelles, la Flandre n’a suivi qu’à contrecœur. Et même maintenant, ce n’est pas général : les bénévoles et les aidants informels restent admis, même s’ils n’ont aucune formation médicale, et donc aucune connaissance approfondie des mesures d’hygiène. Mais des décennies d’économies et une commercialisation poussée du secteur – avec trop peu de personnel – ont rendu indispensable cette aide non professionnelle.

La recommandation d’annuler les grands événements était très prudente. Alors que les experts préconisaient de les interdire à partir de 500 participants, le nombre a été arbitrairement porté à 1.000 personnes. Il a fallu un nombre croissant de contaminations et de premiers décès pour arriver à des mesures efficaces, alors qu’il aurait été possible de tirer des leçons de Chine et d’Italie en termes de mesures préventives.

Et puis il y a les écoles : les cours sont suspendus, mais offrent un abri obligatoire. Les gens continuent donc de déposer leurs enfants à l’école, avec tout le trafic supplémentaire d’aller-retour. La raison est principalement économique : les gens doivent pouvoir aller travailler, que ce travail soit nécessaire ou non.

Au lieu de diriger, les différents gouvernements ont couru après les écoles et le secteur culturel qui ont eux-mêmes décidé de fermer leurs portes, entre autres. Cela illustre une fois de plus comment les travailleurs peuvent prendre des décisions ensemble, alors que les dirigeants des partis traditionnels sont restés prisonniers de leurs jeux politiques et que les partis de droite, en particulier, ont laissé les intérêts économiques prendre le pas sur la vie des gens.

Les hôpitaux seront-ils en mesure de faire face à l’afflux d’admissions ? En Italie, le secteur est à genoux et le personnel hospitalier doit choisir qui traiter ou pas ! Ces dernières années, des mouvements de lutte ont éclaté chez le personnel hospitalier, tant en France qu’en Belgique, pour exiger davantage de bras. Cela laisse envisager que les hôpitaux seront débordés dans ces pays également, en dépit des efforts du personnel.

Les partis politiques qui, au cours de ces dernières décennies, ont favorisé les profits des grandes entreprises et du secteur financier et réduit les moyens des soins de santé, entre autres, portent une responsabilité écrasante ! Le gouvernement Michel a ainsi économisé un milliard d’euros sur le secteur à la suite de décennies de sous-financement !

Continuer à travailler même avec la chair de poule est devenu la norme pendant cette période si l’on ne veut pas perdre son emploi en tant que travailleur temporaire. La politique a donné le ton avec la chasse aux congés de maladie, en assimilant la maladie à la paresse. L’augmentation du prix des soins de santé, combinée à la faiblesse des salaires et des prestations, a fait du report des soins de santé un phénomène ‘‘normal’’. Et qu’en est-il des sans-abri et des plus démunis parmi les pauvres, qui dépendent pour leur logement de refuges dans lesquels les gens s’empilent ? Ils ne seront pas en mesure de se protéger contre l’infection. Le tribut sera lourd en vies humaines.

Personne n’est responsable du virus. Mais la capacité à faire face à la crise sanitaire permet de limiter les conséquences.

Les partis flamands de droite ne parviennent même pas à donner l’impression que le bien-être prime sur les intérêts des entreprises. Mais les autres partis portent également une responsabilité écrasante. Il ne suffit pas d’un vernis de centre-gauche sur un plan d’austérité pour faire face à une telle crise ! Une fois de plus, les partis sociaux-démocrates et verts soutiennent le gouvernement minoritaire en affaires courantes dont la gestion de la crise repose essentiellement sur la limitation des dégâts économiques pour les entreprises.

Certains voudront profiter de cette crise pour mettre en place un gouvernement fédéral. Koen Geens (CD&V) l’a déclaré explicitement : ‘‘ne jamais gaspiller une bonne crise’’ dans son plaidoyer pour, entre autres, la division du volet santé de la sécurité sociale. Mais nous n’avons pas besoin de n’importe quel gouvernement : seulement d’un gouvernement qui rejette la logique du néolibéralisme et qui fait passer le bien-être de la population en général avant les profits de ceux qui, l’année dernière, ont détourné – en toute légalité – 172 milliards d’euros (172 fois le montant économisé par le gouvernement Michel dans le domaine de la santé !) vers les paradis fiscaux.

Partager :
Imprimer :

Soutenez-nous : placez
votre message dans
notre édition de mai !

Première page de Lutte Socialiste

Votre message dans notre édition de mai