A quelques jours d’intervalle, des technocrates sont arrivés à la tête des gouvernements d’Italie et de Grèce, avec l’argument que ces éminents personnages seraient ‘‘au-dessus des considérations politiciennes’’ pour prendre des mesures destinées à préserver le ‘‘bien commun’’. Un mensonge ridicule et surtout bien incapable de masquer la réalité : ces financiers de haut vol ont été propulsés au pouvoir afin d’assurer que la population paie le coût de la crise au prix fort et que l’avidité des vautours capitalistes soit satisfaite.
Par Nicolas Croes
Quell e est cette caricature de démocratie ?
‘‘Wall Street a deux partis, nous avons besoin du nôtre’’ défendent nos camarades américains de Socialist Alternative aux USA, une question cruciale aux quatre coins du globe. Mais si les sommets syndicaux peinent à rompre fermement leurs liens avec des partis traditionnels du type du PS, nous ne pouvons qu’être frappés par la rapidité à laquelle les marchés règlent cette question. Pour eux, Silvio Berlusconi et George Papandréou n’étaient plus les hommes de la situation. Les marchés ont donc ‘‘voté’’ à leur manière, avec l’envolée des taux d’intérêt de la dette, et les parlementaires se sont très docilement pliés à ce choix : ils ont soutenu l’arrivée antidémocratique de gouvernements de banquiers.
Mario Monti est l’ancien commissaire européen à la concurrence, également ancien président ou membre dirigeant de différents groupes de pression néolibéraux (dont le fameux Groupe de Bildeberg) et jusqu’à tout récemment il était encore conseiller pour le géant bancaire Golman Sachs. Son gouvernement comprend notamment le patron de la seconde banque du pays (Intesa Sanpaolo) au poste de ministre du Développement économique, des Infrastructures et des Transports.
En Grèce, Lucas Papadémos est l’ancien vice-président de la Banque Centrale Européenne. Son gouvernement est une alliance qui regroupe le PASOK (équivalent local du PS), la Nouvelle démocratie (droite officielle) et enfin le parti d’extrême-droite l’Alerte populaire orthodoxe (LAOS). C’est la première fois depuis 1974 (c’est-àdire la fin de la dictature des colonels) que l’extrême-droite entre au gouvernement grec. Voilà donc les ‘‘hommes de la situation’’.
Ce nouveau développement politique de la crise économique illustre la gravité de cette crise pour la classe capitaliste ainsi que sa panique. Avec l’aide de la troïka – Fonds Monétaire International (FMI), Union Européenne et Banque Centrale Européenne – les marchés ont balayé le suffrage universel pour placer directement leurs propres pions et assurer ainsi que l’austérité soit promptement appliquée. Cette menace pèse sur tous les pays.
Pour une grève générale européenne !
Face à la crise de l’euro, le danger du développement d’un repli nationaliste, même ‘‘de gauche’’, existe. Nous devons défendre nos droits sociaux durement acquis contre les prédateurs capitalistes internationaux, c’est vrai, mais aussi nationaux. Ainsi, nous nous sommes toujours opposés à l’Union Européenne du capital, mais sans pour cela tomber dans le piège du nationalisme. C’est en ce sens que nos sectionssoeurs en Irlande et en France avaient mené campagne contre la Constitution Européenne et le Traité de Lisbonne qui lui a succédé, mais sur base d’un programme de lutte pour défendre tous les acquis sociaux et propager l’idée d’une Fédération socialiste européenne.
Divisés, nous sommes faibles. Opposons à la dictature des marchés une résistance internationale. C’est tout à fait possible. La volonté de lutter contre l’austérité ne manque pas. En France, les syndicats appellent à une journée de mobilisation pour le 13 décembre. En Grande Bretagne, une grève générale d’ampleur historique a frappé les services publics le 30 novembre. Le Portugal (le 24 novembre), l’Italie (le 6 septembre) et l’Espagne (le 6 décembre également) ont connu des grèves générales et la Grèce a déjà une bonne douzaine de grèves générales derrière elle. Qu’attend-on encore pour unifier la résistance ?
Le 7 décembre, la Fédération Européenne des Métallos a appelé à une grève européenne sur tous les sites d’ArcelorMittal, sur base directe de l’annonce de la fermeture de la phase à chaud liégeoise, mais aussi pour répondre aux menaces diverses dans tous les sites de la multinationale. Cet exemple doit être suivi et développé. Il est grand temps de nous diriger vers une journée de grève générale européenne, première étape d’un plan d’action européen contre l’austérité capitaliste.
L’une des revendications les plus cruciales de ce plan d’action devrait être d’assurer que les travailleurs et leurs familles puissent avoir le contrôle des décisions économiques prises dans leurs pays, par la nationalisation des secteurs clés de l’économie (énergie, sidérurgie, finance,…) sous le contrôle démocratique des travailleurs. La démocratie réelle passe par le contrôle de l’économie et le renversement du chaos capitaliste, par l’instauration d’une production démocratiquement planifiée.