CPAS : une charge de travail insoutenable. Entretien avec le président de la délégation CGSP du CPAS de Liège

Ce jeudi 12 septembre, plus d’une centaine de personnes s’étaient rassemblées devant les locaux du CPAS de Liège afin d’exiger des mesures permettant une diminution de la charge de travail. Nous en avons discuté avec Simon Hupkens, le président de la délégation CGSP. Entretien tiré de l’édition d’octobre de Lutte Socialiste.

C’était une belle mobilisation de rentrée ! Qu’est-ce qui explique cette participation ?

La coupe est pleine. Au CPAS de Liège, comme dans l’ensemble des CPAS du pays, le nombre de dossiers a explosé en 2015 suite à la limitation des allocations de chômage dites d’insertion. Cette année-là, selon la FGTB, 70.000 personnes ont été exclues de leur droit aux allocations de chômage ! Dans les faits, la charge des allocataires sociaux s’est déplacée en partie du fédéral vers les communes. Pour y faire face, les ressources supplémentaires allouées aux CPAS ont été très limitées. Elles ne couvrent absolument pas les besoins.

Les assistants sociaux croulent sous les dossiers à traiter, jusqu’à 120 pour certains ! Dans une situation pareille, on ne peut faire que le minimum, c’est-à-dire assurer que l’usager reçoive son allocation d’insertion. Mais aider ces gens à sortir de leur situation, on oublie !

D’autant plus que les dossiers sont plus complexes. Nous vivons dans une société de plus en plus violente, où la vie se fait plus dure et tout le monde ne dispose pas des mêmes ressources pour y faire face. Quand on émarge au CPAS, c’est précisément que l’on est arrivé au bout de ses ressources (famille, amis,). Quand tout est épuisé, on arrive au CPAS. Et en plus, les services d’aide sociale qui dépendent d’autres institutions sont également sous pression, dispensant de moins en moins d’aide. Ça aussi, ça pèse sur le fonctionnement des CPAS.

Les travailleurs sociaux plus anciens affirment que les situations sociales sont plus complexes qu’il y a 20 ou 30 ans. Ils parlent de ‘‘couches de lasagnes’’ : à un problème de logement s’ajoutent un problème de santé mentale, un autre de violence familiale, etc., etc. Et quand les services publics sont démunis ou absents, les problèmes sont détectés plus tard et il est plus difficile de les traiter.

Pourquoi réagir maintenant ?

La première chose, c’est que nous sommes dans un processus de remobilisation de l’ensemble des collègues autour de la délégation syndicale, de manière très participative, avec une assemblée générale plénière correctement mobilisée tous les ans depuis 3 années comme événement central de l’action syndicale. Cette année, on a été un pas plus loin avec des Assemblées générales décentralisées. Dans tout ce processus, la question essentielle soulevée par les collègues était la charge de travail, qui ne permet pas d’aider correctement des gens en situation de détresse dramatique. La principale maladie professionnelle au CPAS, c’est le burnout, faute de pouvoir donner des réponses à des gens qui viennent expliquer qu’ils n’ont pas d’argent pour leurs enfants, pour des vêtements,… Donc les agents tombent en dépression ou démissionnent.

La seconde chose, c’est que cette question de la charge de travail est reconnue comme problématique par le collège communal et mentionnée explicitement dans la déclaration de politique communale. Dans ce cadre, le CPAS de Liège devait rendre son PST (Plan stratégique transversal) censé reprendre les grandes orientations du CPAS pour la législature. Du coup, on s’est dit que le moment était opportun pour mettre la pression, pour demander des engagements, pour revendiquer une simplification administrative et une limitation des mesures de contrôle chronophages sur le personnel.

Ce PST est maintenant disponible. Nous allons l’analyser, convoquer une nouvelle Assemblée générale, soumettre ce PST à nos critiques et remobiliser pour d’autres actions si nous n’y trouvons pas ce qu’on souhaite y trouver, c’est-à-dire prioritairement un renforcement des équipes.

Nous savons que les caisses du CPAS ne sont pas extensibles. Mais un CPAS n’est pas isolé du reste de la société. Il y a des moyens à aller chercher. Si la direction souhaite entrer en lutte avec nous pour obtenir un refinancement des CPAS au fédéral, on sera très heureux de les accueillir dans ce combat. Sinon, on maintiendra notre position et nous lutterons pour obtenir de nouveaux moyens et, pourquoi pas, travailler à une coordination des différents CPAS pour exiger leur refinancement. Aujourd’hui, un revenu d’insertion est remboursé à 85% maximum par le fédéral (souvent c’est 70% à peine), le reste étant à charge des communes. Le remboursement intégral est le minimum à exiger par les CPAS, spécifiquement dans les grandes villes où se concentre la majorité de la pauvreté.

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