Cela peut paraître incroyable, mais on prenait beaucoup plus de vacances au Moyen-Âge. En moyenne : 150 jours par an, alors que les travailleurs européens d’aujourd’hui ont généralement droit à 25 ou 30 jours de congé par an. Aux États-Unis, c’est nettement moins !
Par Jean (Luxembourg)
Il ne faudrait pas pour autant idéaliser les conditions de travail au Moyen-Age : elles étaient très rudes et il n’y avait ni sécurité sociale ni droits syndicaux. Mais le nombre de jours de congé officiels était beaucoup plus important… Tout simplement parce que le clergé avait compris qu’il fallait ménager le paysan pour qu’il soit productif. En plus de cela, chaque événement de la vie donnait droit à des congés supplémentaires. Résultat : la quantité de jours travaillés était nettement inférieure à celle de notre époque. Et même si les journées de travail étaient un peu plus longues, le nombre d’heures travaillées annuellement était sensiblement inférieur au nôtre.
Cette réalité révélée par une étude menée par l’économiste Juliet B Schor brise le mythe d’une amélioration plus ou moins constante des conditions de travail au cours des siècles.
Mais d’une certaine manière, ces révélations ne sont pas si surprenantes. Dans son analyse du capitalisme, Karl Marx soulignait une différence fondamentale du capitalisme avec les modes production précédents : le capitaliste a un besoin insatiable d’accumuler un maximum de capital, afin de pouvoir réinvestir ces profits dans l’outil de production, pour progresser par rapport à ses concurrents. Pour le seigneur féodal, c’était différent : son accumulation était limitée par les capacités de ses granges. Il n’avait aucun intérêt à accumuler davantage. C’est cette différence essentielle qui explique que le temps de travail était inférieur au Moyen-Age : la classe dirigeante de l’époque n’avait aucun intérêt à presser les travailleurs comme des citrons. En d’autres termes, sous le capitalisme, l’ouvrier travaille 5 heures pour payer son salaire, et encore 3 ou 4 heures pour générer les profits attendus par son patron.
Pourtant, notre époque se caractérise par un autre paradoxe : celui du chômage de masse. Marx a également expliqué que les capitalistes avaient intérêt à organiser la pénurie d’emplois pour obliger ceux qui avaient du travail à accepter n’importe quelles conditions pour le garder. C’est le 2ème effet kiss cool du capitalisme : plus de travail mais pas pour tout le monde. Alors que les technologies modernes pourraient facilement alléger la tâche de la majorité des travailleurs et permettre de planifier plus efficacement la production en fonction des besoins, c’est tout le contraire qui se passe. Ces technologies sont utilisées pour exercer une pression accrue sur les salariés: course à la productivité, délocalisations, ‘‘uberisation’’ et disponibilité permanente requise pour ceux qui auraient échappé aux autres fléaux.
En résumé, s’il est vrai que le capitalisme a apporté d’immenses progrès à l’humanité, il apparaît de plus en plus clairement qu’il est en train de nous tuer à petit feu en même temps que la planète. Il y aurait encore beaucoup de choses à dire à ce sujet, notamment que ces lignes ont été rédigées un dimanche, car le combat contre ce système mortifère vaut bien quelques heures supplémentaires.