Septembre, la période de rentrée des classes. Comme chaque année, les médias nous abreuvent d’images sympathiques montrant des élèves joyeux ou nerveux à l’idée de retourner au cours. La réalité est souvent plus inquiétante : manque de place, inégalité scolaire, frais exorbitants…20% des écoles regroupent 80% des élèves défavorisés socialement. La rentrée n’est pas facile pour tout le monde : selon les études Pisa, l’enseignement en Belgique est l’un des plus inégalitaires au monde.
Par Thomas (Namur)
Le budget de l’éducation en communauté française est de plus de 6 milliards d’euros, mais cela est insuffisant car les manques sont partout. Certaines écoles vont jusqu’à couper le chauffage dans les locaux par manque de budget ou à donner cours dans des préfabriqués par manques de locaux. Par manque de moyens disponibles le nombre d’heures de cours particuliers explosent. Les prix varient mais se situent aux alentours de 25-30 euros par heure, à charge des familles.
Comment nos politiciens réagissent-ils à ces carences flagrantes ? De la même manière dont ils gèrent les autres secteurs. La ministre Simonet avait d’abord pensé prendre de l’argent aux écoles pauvres, pour le redistribuer aux écoles encore plus pauvres, le fameux décret robin des bois, mais sans augmentation du budget global de l’éducation il n’y aura pas de solution! Face à la grogne sociale que ce décret avait suscité, la Communauté Française a finalement débloqué quelques millions d’euros et à neutraliser les effets notamment pour l’enseignement libre. Un soi-disant ‘‘grand accord’’ qui est l’équivalent d’une goutte dans la mer du Nord…
40% des enseignants quittent leur profession dans les cinq premières années. La majorité des jeunes profs sont baladés de contrats temporaires en mission de remplacement pendant des années avant de trouver un poste stable. Les classes sont surpeuplées, les installations vétustes. Le manque de moyens affecte beaucoup les activités pédagogiques, visites, excursions. Quelle est la réponse de l’Olivier face à ces conditions de travail extrêmement dures : l’attaque des prépensions et la culpabilisation des profs pour l’état actuel de l’enseignement.
La gestion des groupes-classes pose de plus en plus problème. Par rapport à l’école d’antan, les groupes-classes se sont diversifiés (massification de l’enseignement et arrivée de l’immigration), il y a eu aussi une évolution de la société vers le consumérisme (le tout et tout de suite) et l’individualisme. Il y a aussi les effets de 30 ans d’une période économique aux prises avec des caractéristiques dépressionnaires, aggravé par la crise profonde du capitalisme de ces dernières années. L’Ecole est peu armée pour gérer les conséquences de tout cela. Une réforme de la formation des profs comme d’aucuns le proposent peut constituer un élément de solution et d’amélioration de la qualité d’enseignement mais ne peut à elle seule suffire dans un contexte ou les liens sociaux se désagrègent sous les coups de butoir des capitalistes assoiffés de profit D’après le CRIOC (Centre de Recherche et d’Information des Organisations de Consommateurs), le prix d’une rentrée scolaire serait de 436 euros en maternelle, 339 euros en primaire et secondaire 609 euros et enfin en supérieur, 1315 euros. Et on ne parle que de la rentrée, le coût d’une année d’étude est bien plus élevé ; plus de mille euros en maternelle, à plus de 2000 euros à la charge des parents en primaire et secondaire. Pour le supérieur, avec 800 euros de minerval, le coût des études est très variable selon la distance de l’université et s’il faut payer un kot au jeune. Entre 2008 et 2011, on voit une augmentation de 15% d’étudiants qui ont eu besoin du revenu d’intégration sociale, soit 16.874 jeunes.
Le déficit budgétaire de la communauté française est de 450 millions d’euros en 2011 et on nous assène que les caisses sont vides. La moyenne d’imposition des entreprises a diminué de 19.9% en 2001 à 11.8% en 2009. Le coût des seuls intérêts notionnels était estimé en 2009 à 5.7 milliards d’euros de pertes pour l’Etat. D’énormes cadeaux fiscaux distribués à des actionnaires qui, soi-disant, font tourner l’économie et créent de l’emploi. Quel emploi rétorquera-t-on, il y a officiellement 700.000 chômeurs dans ce pays, et même réussir de grandes études n’assure pas un avenir stable pour les étudiants. Un think thank libéral, l’Itinera Institute, propose pour pallier au manque budgétaire, d’augmenter le minerval que l’étudiant payera à crédit. Ce genre de fausses solutions qui est déjà en œuvre depuis longtemps en Grande-Bretagne ne ferait qu’accroitre le fossé entres les jeunes issus d’un milieu aisé et ceux des couches moyennes et modestes. Comment étudier sereinement avec une dette de plusieurs dizaines de milliers d’euros ?
Les manques des écoles sont énormes. Il nous faut exiger un refinancement massif du secteur, à hauteur de 7% du PIB, comme cela a déjà été le cas dans les années 80. Ne tombons pas dans le piège de la division : parents, élèves et professeurs et personnel technique et administratif ont en dernière analyse les mêmes intérêts à exiger un enseignement de qualité.
La seule manière d’obtenir ce refinancement est de l’imposer à nos politiciens, grâce à des actions massives et coordonnées. Comme la grève massive du cinq mai dernier, ou douze mille enseignants manifestaient pour de meilleurs salaires, contre l’austérité budgétaire, et contre l’allongement de la prépension. Les différents politiciens en charge de l’éducation ont répondu à cette mobilisation par des effets d’annonces, qui n’ont toujours pas été suivis de mesures concrètes.