Zimbabwe : Grève générale en réponse à la hausse des prix !

Une grève générale de trois jours au Zimbabwe a été déclenchée le 14 janvier en réponse à la détérioration de la situation économique dans le pays. Appelée par le Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) et des militants locaux, la grève visait à protester contre la hausse de 150 pour cent du prix du carburant annoncée par le président Emmerson Mnangagwa le 12 janvier.

Par des correspondants du CIO

La grève nationale a été massivement mise en œuvre par les travailleurs, les chômeurs et les travailleurs indépendants – la grande majorité des Zimbabwéens. Dans la capitale, Harare et la deuxième plus grande ville Bulawayo, les gens, y compris un grand nombre de jeunes, ont manifesté dans les rues. Ailleurs, les gens restaient à la maison pour exprimer leurs griefs.

La police a accueilli les manifestations avec des balles réelles et des gaz lacrymogènes. Deux jours après le début de la grève générale, cinq personnes ont été abattues et plusieurs autres blessées. Un commissariat de police de Harare a été incendié alors que les manifestants réagissaient contre la répression brutale. Certains manifestants ont érigé des barricades qui bloquaient les routes menant aux villes. Les médias font également état de certains pillages. Le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), parti d’opposition, rapporte que son siège social a été pillé et incendié. Des voitures du parti au pouvoir, ZANU-PF1, ont également été prises pour cible.

Aujourd’hui au prix de 3,31 $US le litre (du diesel à 3,11 $US le litre), le carburant au Zimbabwe est le plus cher au monde dans un pays où seulement 11 % des 5,4 millions de personnes économiquement actives travaillent dans le secteur formel2, et 72 % vivent sous le seuil de pauvreté défini par la Banque mondiale de 1,90 $US par jour. La classe ouvrière et les pauvres du Zimbabwe ont déjà été durement touchés par l’accélération de la hausse des prix, le manque d’argent liquide, de carburant et de produits de base, y compris les médicaments, dans le cadre du budget du nouveau ministre des Finances intitulé ironiquement « Austerity for Prosperity3 », qui fait passer de 65 à 70 ans l’âge de la pension des soldats.

Selon l’annonce du gouvernement, les grandes entreprises seront compensées pour l’augmentation par des réductions d’impôt. C’est une attaque contre les travailleurs, les pauvres, les chômeurs et les travailleurs indépendants – le gouvernement des patrons essaie de forcer les travailleurs et les pauvres à payer pour la crise économique. Mnangagwa a également annoncé la privatisation en bloc des entreprises publiques depuis son arrivée au pouvoir.

La fermeture du pays fait suite à la grève des médecins, qui vient d’être annulée après plus d’un mois de lutte pour, entre autres, de bons salaires et une augmentation massive des dépenses en soins de santé. Une grève des enseignants est également prévue pour la fin du mois. Un groupe d’enseignants a récemment marché de Bulawayo à Harare (430 kilomètres !) pour présenter au gouvernement leurs revendications, y compris, entre autres, contre les bas salaires et la hausse des prix des produits de base. Les travailleurs du secteur public ont également signifié un avis de grève à la Commission de la fonction publique le 8 janvier après l’échec des négociations entre le gouvernement et les travailleurs.

En d’autres termes, la grève générale a lieu dans le cadre d’une effervescence sur les lieux de travail et dans les communautés. Moins de six mois après son élection, le président Mnangagwa (qui, en novembre 2018, a participé au coup d’État qui a renversé son ancien camarade de parti Robert Mugabe après 37 ans au pouvoir) risque de faire face à une rébellion naissante. En réalité, les élections ont été convoquées pour légitimer le régime militaire de Mnangagwa installé à la suite du coup d’État à peine déguisé qui a chassé Mugabe.
Comme le souligne le Saturday Big Read (SBR) (16/01/2019) : « Le 1er août 2018, les mêmes militaires ont été déployés dans les rues de Harare. L’opération a fait six morts et 35 blessés. Abattus de sang-froid. Une commission d’enquête a été mise sur pied. Elle a fait un boulot bâclé d’« assainissement ». Personne n’a été tenu responsable. Pas même un seul mot d’excuse. »
Six mois plus tard, le SBR rapporte que  » l’État a maintenant eu recours à des mesures extraordinaires, sans même déclarer l’état d’urgence. Il s’agit notamment de ce qui suit :
– Déploiement militaire
– Détention de civils
– Fusillades, les coups, les traitements inhumains et dégradants et la torture. Des gens ont été tués de sang froid
– La fouille et la saisie de porte à porte d’individus et les enlèvements
– La fermeture d’Internet et des médias sociaux pour empêcher la libre circulation de l’information. Il y a une panne d’information
– Propagande, blâmant l’opposition et les groupes de la société civile pour ce qui est des protestations de l’opposition »

Bien qu’il ait mis en évidence de sérieuses preuves de fraude avant les élections – y compris le refus des commissions électorales indépendantes de remettre les listes électorales à l’inspection de l’opposition, ce qui est essentiel pour leur crédibilité – le MDC a participé à des élections qui étaient en fait frauduleuses, débordé par son ambition d’exercer des fonctions.

Bien que le MDC ait exprimé sa solidarité avec la grève, sa préoccupation a été de nier toute responsabilité à leur égard. Manifestement surpris par ces développements, au lieu de se placer à la tête de ces protestations massives, il les utilise plutôt pour lancer un appel à une intervention régionale et pour que Mnangagwa revienne de son voyage à l’étranger pour un  » dialogue national « .

Le CIO soutient pleinement la grève et appelle les travailleurs, les jeunes et les militants des communautés et quartiers à utiliser la grève pour mettre en place des comités d’organisation dans les lieux de travail, les écoles, les zones urbaines4, les villages afin de discuter du programme d’action et de l’alternative à cette situation de plus en plus cauchemardesque. La base de la ZCTU doit faire campagne pour que les syndicats rompent tout lien avec le MDC et pour la création d’un parti ouvrier.

La seule façon de sortir de la crise zimbabwéenne, c’est de lutter pour un Zimbabwe socialiste, une Afrique socialiste et un monde socialiste, où les ressources de la société sont véritablement publiques, gérées et contrôlées démocratiquement par les travailleurs et les communautés, et où la production est planifiée pour les besoins de tous, pas pour les profits des grandes entreprises, des multinationales et de l’élite et ses sbires politiciens.

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