Contre l’austérité, pour un syndicalisme de combat!

Lors de l’assemblée Wallonne des pensionnés et prépensionnés de la FGTB qui s’est tenue à Ciney le 13 octobre 2011, Gustave Dache a fait une intervention remarquée. Voici ci-dessous le texte intégral qu’il aurait voulu faire si le temps le lui avait permis. L’auteur de "La grève générale insurrectionnelle et révolutionnaire de l’hiver 60/61 » aborde notamment la nécessité d’un plan d’action contre l’austérité, et défend la nationalisation par expropriation des banques et des secteurs clés de l’économie, sans indemnités ni rachats et sous contrôle ouvrier, comme intégré dans le programme de la FGTB dans les années ’50.


Étant donné que les intervenants à cette assemblée n’avait droit qu’à trois minutes. J’en ai d’ailleurs fait la critique à la tribune, car sur 3 minutes il n’est pas permis de développer une intervention que j’ai été obligé d’écourter. C’ est la raison pour laquelle je l’ai mise par écrit. Encore une fois les interventions de la base sont limitées bureaucratiquement, alors que la situation est d’une gravité exceptionnelle et exige la pleine liberté d’expression ainsi que le temps nécessaire pour que la base s’exprime entièrement qui elle demain se retrouvera dans la rue.

Gustave Dache


Camarades,

Après 50 ans, la situation a changé et nous savons tous que chaque époque garde sa spécificité. Mais ce que nous savons aussi avec certitude, c’est que les antagonistes de classe sont restés les mêmes. En effet, le capitalisme et son cortège de misère existent toujours. Ils font toujours des ravages sociaux et économiques. La pauvreté n’a cessé d’augmenter partout alors que les capitalistes font continuellement des bénéfices faramineux. Les bénéfices des entreprises belges sont passés de 47 milliards d’euros en 2000 à 82 milliards d’euros en 2009 : une hausse de 75 %. Les dividendes des actionnaires sont passées de 9 à 26 milliards d’euros dans la même période : une augmentation de 200 %.

Et pendant que les capitalistes remplissent leurs coffres, les travailleurs sont licenciés, les chômeurs sont exclus de leurs indemnités et les pensions en Belgique sont parmi les plus basses d’Europe. Il y a environ 25 % des pensionnés qui vivent sous le seuil de pauvreté, et il y a dans notre pays 15 % de taux de pauvreté. Il y a socialisation des pertes alors que les bénéfices des banques et des entreprises restent strictement privés.

Le socialiste français Jean Jaures avait parfaitement raison lorsqu’il disait il y a longtemps que :  »le capitalisme porte en lui la guerre, comme la nuée porte l’orage. » Il en va de même pour la misère. La lutte entre les deux classes antagonistes est permanente, elle est toujours d’une brulante actualité. Aujourd’hui comme hier, la lutte des classes reste la priorité absolue.

 »La FGTB Wallonne espère faire progresser la réflexion et le débat sur le fait que penser l’après capitalisme est maintenant une nécessité absolue » a-t-on pu lire dans le Syndicat de septembre 2011. Tous les syndicalistes doivent souscrire à cette nécessité absolue, car ce qui est posé avec encore plus de nécessité aujourd’hui qu’hier, c’est le remplacement du capitalisme par le socialisme démocratique.

Je pense, camarades, que vous partagez le même sentiment que moi. Je m’adresse ici aux plus anciens qui, comme moi, ont fait grève en 1950 et en 60/61. Je considère qu’il y a aujourd’hui beaucoup de similitudes avec la situation qui existait juste avant la grève générale de 60/61. Rappelez-vous camarades, à l’époque, il y avait des grèves un peu partout. Aujourd’hui, il y en a beaucoup plus, presque tous les jours dans tous les secteurs, ce qui démontre que la situation s’est dégradée constamment et devient explosive. A l’époque, le gouvernement de droite du premier ministre Gaston Eyskens voulait nous imposer avec la Loi unique une austérité de 10 milliards de francs belges. Aujourd’hui, le futur gouvernement veut nous imposer une austérité de 22 milliards d’euros, ce qui représente 880 milliards de FB. Ce n’est pas vrai qu’il se limitera à 10 milliards d’euros, Ce n’est qu’un début pour 2012, le reste viendra les années suivantes. Cette austérité n’a aucune comparaison avec celle de 60/61. Elle est 88 fois supérieure.

C’est la plus grave offensive contre la classe ouvrière et les petites gens de toute l’histoire de la Belgique. Si on laisse faire les politiciens ou vont-ils s’arrêter ?

Devant une austérité de 10 milliards de FB, la classe ouvrière de l’ensemble du pays s’est dressée massivement et spontanément dans une grève générale insurrectionnelle et révolutionnaire. Cela peut paraitre osé aujourd’hui de rappeler que cette grève générale de 60/61 était insurrectionnelle et révolutionnaire. Pourtant, il n’en est rien. Elle était bien insurrectionnelle dans ses actes et révolutionnaire dans ses objectifs.

Rappelez-vous camarades, une grève générale historique,  »la grève du siècle » qui a duré 35 jours, paralysant toute l’économie du pays, avec ses plus de 100 actes de sabotages par jour, ses nombreuses arrestations arbitraire, ses nombreux blessés et ses 4 morts abattus par la gendarmerie.

Rappelez-vous camarades, nous étions descendus dans la rue contre la loi unique, mais aussi pour changer la société.

Rappelez-vous camarades nous voulions marcher sur Bruxelles, comme en 1950, pour affronter l’Etat bourgeois dans la capitale. Nous pouvions réussir, toutes les conditions objectives à une insurrection étaient réunies. La bourgeoisie tremblait sur ses bases, et ce n’est pas par hasard si toutes les gares du pays étaient occupées militairement, si toutes les armureries du pays étaient vidées de leurs munitions, si la fabrique nationale (FN) était également occupée militairement. Des mitrailleuses étaient postées sur les routes conduisant à la capitale. Toutes ces précautions exceptionnelles ont été prises par le gouvernement et la bourgeoisie parce qu’ils craignaient que la masse des grévistes montent spontanément sur Bruxelles. Mais toutes les directions traditionnelles nous ont empêchées, André Renard y compris.

Cette fois ils ne nous arrêterons pas !

Pour nous, la rigueur ou l’austérité c’est kif kif. La rigueur, nous la subissons depuis plus de 35 ans. La rigueur on en veut plus, et ça, ce n’est pas négociable.

D’ailleurs, les plans de rigueur, ça ne fonctionne pas. La Grèce en est un exemple typique avec l’application de la rigueur et de l’austérité, la dette publique est passée de 120 % au début de l’année à 160 % du PIB sans rien résoudre, au contraire. La crise s’accentue profondément.

Avec ce plan d’austérité en Grèce, il y a environ 20 % de réduction des salaires et 15 % de réduction des pensions. Les politiques de rigueur sont des politiques aveugles et ceux qui les prônent vivent sur une autre planète. Le capitalisme connait la plus grave crise structurelle de toute son histoire. Aujourd’hui la crise structurelle du capitalisme a atteint un tel niveau, qu’elle a révélé au monde entier que cette économie capitaliste est tellement vulnérable qu’elle peut mettre toute l’économie mondiale à genoux.

D’ailleurs, les plus grand partisans de cette économie capitaliste en crise mortelle ne trouvent aucune solution de sauvetage. Toute ces crises à répétitions dévoilent au grand jour l’absurdité et l’inefficacité du capitalisme à l’agonie. Le cœur même du capitalisme mondiale, les Etats Unis d’Amérique, sont touchés de plein fouet par la crise, avec comme conséquence que le pays se trouve au bord d’une dépression avec son cortège de misère, comme dans les années 30. Jamais aux EU autant de personne n’ont vécu sous le seuil de pauvreté.

Pourtant, de l’agent, il y en a. Avec raison, la FGTB pose la question  »où est passé l’argent »?

Le gouvernement en affaire courant a déboursé 22 milliards d’euros pour sauver les banques en 2008. Les milliards d’euros absorbés par les intérêts notionnels (plusieurs milliards d’euros par an) et les 9 milliards d’euros de diminution de charge au patronat par an. Cette série d’avantages fiscaux a permis à ArcelorMittal de ne quasiment rien payer en Belgique alors que des milliards de bénéfices étaient réalisés. De fait, les grosses entreprises payent peu d’impôts et la fraude fiscale est estimée à + ou – 20 milliards d’euros. Tous ces plantureux cadeaux ont été accordés avec la participation du PS à tous les gouvernements successif. Dans ces circonstances, le MR n’a plus le monopole du libéralisme, le PS s’en charge.

Le capitalisme est atteint d’une maladie incurable, d’un cancer généralisé, et le PS joue le rôle de médecin au chevet du capitalisme malade. Nous, ce dont nous avons besoin, ce n’est pas d’un médecin, mais d’un chirurgien qui pratique l’euthanasie .

Autour de la table des négociations sur l’accord de BHV, c’était la joie, la droite et la gauche se sont congratulées pour avoir, d’après eux, trouvé un accord historique. Entre la droite et la gauche, les nuances politiques ont disparu. Pendant toute cette période de crise pour former un gouvernement, il y a eu des informateurs, des démineurs, des clarificateurs. Maintenant nous avons un démolisseur de nos acquis sociaux et de notre citadelle ouvrière qu’est les sécurité sociale !

Oui camarades, notre citadelle ouvrière est attaquée, pas seulement par la droite mais aussi par le formateur chef de file de la gauche. Comme le disait Nico Cué, secrétaire des métallurgistes :  »le formateur négocie une note qui fait injure au valeur du socialisme ».  

Ce n’est pas parce que nous sommes devenus des papys et des mammys, que nous courrons moins vite et que nous ne sommes plus actifs dans les usines que nous n’allons pas dire aux politiques que nous sommes toujours capables de faire ce que nous avons fait lors de la grève 60/61!

Aujourd’hui plus que jamais, nous devons rester mobilisés et en revenir à un syndicalisme de combat. Car, à la FGTB, qu’on en soit conscient ou pas, qu’on soit d’accord ou pas nous sommes les dépositaires d’une doctrine révolutionnaire, s’appuyant sur la pratique de la lutte des classes, qui doit nous conduire vers la transformation totale de la société et son remplacement par une société socialiste démocratique.

C’est principalement pour cela que la FGTB est née en 1945. Si nous voulons vraiment changer la société, nous devons avancer un plan d’action offensif anticapitaliste, qui s’attaque au fondement même du capitalisme. Ce plan, il ne faut pas l’inventer, il existe, il se trouve dans les tiroirs de la FGTB qui a été décidé par les congrès de la FGTB en 1954 et 1956 : la nationalisation par expropriation des banques et des secteurs clés de l’économie, sans indemnités ni rachats et sous contrôle ouvrier. Non à une caricature de nationalisation par rachat!

Je pense que vous serez d’accord avec moi pour dire que la FGTB nationale doit remettre dès demain matin au formateur un préavis de grève générale illimitée contre toute forme de rigueur qu’elle qu’elle soit!

Si le futur gouvernement s’obstine à nous imposer l’austérité ou la rigueur, nous devons lui dire que ses jours sont déjà comptés. Le PS nous dit régulièrement et depuis bien trop longtemps d’ailleurs que :  »sans nous, ce serait pire. » Pire que quoi ? La peste ou le choléra !

Nous sommes en colère, car tous ceux qui veulent nous imposer la rigueur sont complètement déconnectés de la réalité. C’est du terrorisme social contre toute la classe ouvrière du pays.

La vieille garde meurt mais ne se rend pas! Vive le classe ouvrière, vive le socialisme!

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