Le gouvernement Michel est parti – comment éviter que sa politique d’austérité ne revienne ?

Après moins d’un mois de lutte contre la mort, le gouvernement Michel est décédé. Une tentative de redémarrage avec un gouvernement minoritaire s’est révélée vaine (ce qui conduit à la question surréaliste de savoir si le gouvernement Michel II a jamais vraiment existé). Les tensions avec la N-VA se sont encore exacerbées, rendant la coopération parlementaire impossible. La tentative d’ouverture à l’opposition de centre-gauche est arrivée trop tard et était trop vague pour sauver la peau du premier ministre. Gwendolyn Rutten (présidente de l’Open VLD) a immédiatement bloqué l’essai. Charles Michel ne pouvait que se rendre auprès du roi pour lui remettre sa démission. Cette destitution est à l’étude, peut-être que des élections anticipées seront évitées avec un gouvernement en affaires courantes jusqu’aux élections de mai.

Le gouvernement Michel Ier a dû être remanié après le départ des ministres de la N-VA suite à une discussion sur le droit d’asile. Mais son redémarrage sous la forme d’un gouvernement Michel II fut bloqué car la N-VA a lié l’approbation du budget et de l’accord d’été à une réforme de l’Etat sous la prochaine législature. Aux dires de la N-VA, les choses avaient été convenues ainsi dans des accords secrets conclus au début de cette législature – accords dont la N-VA avait explicitement nié l’existence en 2014 et qui, en cas de fuite, pourraient certainement nuire encore plus au MR. Cela donne une claire indication de ce que nous avons à attendre de la N-VA dans les mois à venir : un discours sur l’asile et l’identité encore plus raciste et une campagne liée à la question communautaire.

Cet accent sur le racisme est nécessaire à la N-VA. Tous les partis de la coalition suédoise ont subi des pertes lors des élections locales du 14 octobre dernier. La politique antisociale en matière de pensions, de pouvoir d’achat, de précarisation du travail, de démolition des services publics, etc. est particulièrement impopulaire. La N-VA ne voulait approuver le budget fédéral qu’à la condition qu’aucune mesure ne soit prise en matière d’environnement ou de pouvoir d’achat, puisque cela coûterait de l’argent. Ce faisant, le parti se positionne directement contre les 100.000 manifestants de la marche historique pour le climat du 2 décembre, contre les dizaines de milliers de travailleurs qui se sont mobilisés le 14 décembre et contre tous ceux qui regardent avec sympathie le mouvement des Gilets Jaunes.

Si les questions sociales dominent la campagne, alors la N-VA ne pourra l’emporter. Ce parti a besoin du débat sur l’asile pour sauver les meubles après quatre ans de politique de casse sociale thatchérienne. Cette approche n’a rien de nouveau : lors de son premier mandat, au début des années 1980, la première ministre britannique Margaret Thatcher a utilisé la guerre des Malouines comme un paratonnerre pour détourner l’attention et la colère sociale. Thatcher, soit dit en passant, s’en est tiré, a remporté les élections de 1983 et a intensifié son offensive néolibérale.

Pour les militants syndicaux, la question du racisme est parfois très frustrante : la propagande quotidienne a un impact sur les collègues. Nous devons très clairement défendre que ce ne sont pas les réfugiés qui sapent nos conditions de vie : c’est la cupidité des ultra-riches qui disposent de marionnettes volontaires et déterminées avec des politiciens tout acquis à leur cause. C’est ce que démontre l’exemple hongrois tellement cité par la droite et l’extrême droite : aucun réfugié n’est admis dans le pays, il n’y existe pratiquement pas de migrants, mais le niveau de vie des travailleurs est attaque par la ‘‘loi de l’esclavage’’ qui autorise jusqu’à 400 heures supplémentaires par an (et la réintroduction de la semaine de six jours au lieu de cinq !) en permettant que les salaires ne soient payés que trois ans après ! Jouer la carte du racisme – car c’est à cela que se résume la campagne sur l’asile et l’identité – est nécessaire pour la N-VA face au large mécontentement concernant les thématiques sociales. Mais le racisme n’apporte aucune solution aux pénuries sociales.

Le gouvernement de droite a toujours été mis en difficulté lorsque les questions sociales ont occupé le devant de la scène. Le gouvernement a dangereusement vacillé à la suite du plan d’action syndical de l’automne 2014. Plus récemment, la colère ressentie à l’égard des contre-réformes en matière de pension, notamment exprimée par la grande manifestation syndicale du mois mai et par la journée d’action syndicale du 2 octobre, a joué un rôle dans les pertes électorales subies par les partis au pouvoir le 14 octobre. Le mouvement ouvrier ne doit pas laisser le débat public être occupé par la droite, la droite populiste et l’extrême droite dans les mois à venir. Nous devons défendre nos revendications et entrer en action. Les négociations autour des salaires et de l’Accord interprofessionnel (AIP) qui débuteront en janvier peuvent jouer un rôle important à cet égard. Après des années de modération salariale et de baisse du pouvoir d’achat, il nous faut une augmentation conséquente des salaires. Le salaire minimum doit être de 14 euros de l’heure. La chute du gouvernement ne doit pas servir de prétexte aux dirigeants syndicaux pour supposer qu’il n’est pas possible de conclure un AIP, pour ne pas formuler de revendications salariales sérieuses ou pour adopter une position passive en l’attente des élections.

Ces derniers mois, la volonté d’entrer en action s’est accrue. Les deux journées d’action syndicale (du 2 octobre et du 14 décembre) ont dépassé les attentes. La marche pour le climat du 2 décembre a connu une participation historique. Plusieurs grèves ont eu lieu dans les entreprises (Aviapartner, Bpost,….) qui correspondent parfaitement à l’appel au respect et à la dignité qui sont aussi le moteur du mouvement des Gilets Jaunes. Cette volonté d’entrer en résistance active ne disparaîtra pas. Une prochaine marche pour le climat est déjà prévue pour le 27 janvier.

Les députés du PTB Raoul Hedebouw et Marco Van Hees ont garanti que la voix de la rue se fasse entendre jusqu’à l’intérieur du Parlement. Le PTB suscite néanmoins des réticences. Une campagne ouverte à toutes les personnes entrées en action sur les thèmes du climat, du pouvoir d’achat ou des pensions, par exemple, et réunissant le plus grand nombre possible de forces opposées au gouvernement Michel et à l’ensemble de la politique d’austérité, voilà qui serait un sérieux pas en avant. Cela maximiserait le résultat possible, ce qui représente certainement un défi à prendre au sérieux tout particulièrement en Flandre. Le PSL souhaite jouer un rôle à cet égard sur base de son programme de changement de société.

Le capitalisme est incapable de sortir de la crise dans laquelle il est plongé. Les mesures adoptées à la suite de la précédente récession arrivent à peine à leur terme que pointe la menace d’une nouvelle récession. Nos conditions de vie sont dégradées pour assouvir la soif de profits de l’élite capitaliste. Depuis l’éclatement de la crise il y a dix ans, l’autorité des institutions de l’establishment a profondément souffert, ce qui a ouvert la voie à une grande instabilité politique. Ce système ne peut être apprivoisé ou réglementé, il continuera de s’en prendre à nos salaires et à nos conditions de travail. Il menace même l’avenir de notre planète. Nous devons le remplacer par une société socialiste où les richesses disponibles seront utilisées dans l’intérêt de toute la population.

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