Lidl. Six mois après la victoire, la bataille pour un ‘‘travail faisable’’ n’est pas finie

La chose était tout aussi symbolique qu’historique : le 1er mai dernier, après une intense semaine de grève, la direction de Lidl a dû battre en retraite. 42 heures de travail supplémentaires allaient être déployées par semaine et par magasin (soit l’équivalent d’un temps plein) pour une durée indéterminée. La charge de travail insupportable et les mauvaises conditions de travail avaient conduit à cette vague spontanée de grèves. Où en sommes-nous plus de six mois plus tard ? Nous en avons discuté avec Dylan, délégué SETCa.

Ces 42 heures supplémentaires par magasin ont-elles été complètement et correctement appliquées ?

“C’est ce que prétend la direction. Mais, sur le terrain, la charge de travail reste très élevée. Chaque conquête arrachée de haute lutte est constamment remise en question ou vidée de sa substance.

“La direction a tout d’abord tenté, en vain, de modifier le nombre d’heures d’un magasin à l’autre alors qu’il avait été convenu que 42 heures seraient ajoutées dans chaque magasin. La direction a ensuite interprété ces 42 heures comme étant des heures contractuelles disponibles. Mais ce n’est pas la même chose que les heures prestées. Le nombre d’heures effectivement prestées est déterminé par le chiffre d’affaires. Si ce chiffre est faible, toutes les heures contractuelles disponibles ne sont pas utilisées. Il est possible de procéder de la sorte en raison des contrats flexibles du personnel, généralement à temps partiel de, par exemple, 24 heures. Nous travaillons 12 heures de plus ou de moins, jusqu’à 36 heures les semaines de pointe.”

Des négociations devaient porter sur le ‘‘travail faisable’’. Où en sommes-nous ?

“Nous sommes encore fort loin d’une nouvelle convention collective de travail (CCT). Après des négociations difficiles, nous sommes parvenus à obtenir certaines choses. Les équipes volantes (qui effectuent des remplacements pour maladie ou circonstances imprévues) sont passées de 69 à 112 employés. Ces derniers reçoivent également une meilleure indemnité kilométrique. D’autre part, les malades de longue durée ne sont plus obligés de passer par un ‘‘processus de réinsertion’’, mesure qui avait entraîné de nombreux licenciements pour indisponibilité médicales.

“La direction souhaite également mettre en place une équipe qui s’occuperait d’un certain nombre de tâches comme la publicité, la réorganisation des magasins et l’inventaire. Selon la direction, cela se traduirait par 10 heures supplémentaires par magasin et par semaine, mais ce que cela signifiera concrètement dans la pratique est toujours un mystère. Chez Lidl, la vigilance constante est de mise. La direction est capable de transformer chaque pas positif en son contraire. Elle vise à atteindre le plus grand chiffre d’affaires et de profit possible avec le moins de personnel possible, rien d’autre.

“Parallèlement, la direction essaye d’accroître la flexibilité. Elle arrive soudainement avec l’idée de commencer le travail une heure plus tôt, avec l’annualisation du temps de travail,… Nous avons été en mesure de repousser tout ça, mais les mêmes mesures sont revenues sur la table aux négociations suivantes ! Heureusement qu’avec le SETCa, à la fin du mois d’avril, nous n’avons pas accepté la proposition d’introduire les 42 heures par magasin pendant six mois seulement en attendant une nouvelle CCT, parce qu’à ce rythme, il nous faudra encore beaucoup de temps avant d’atteindre une CCT !

“Pour la direction, l’étape suivante est l’introduction d’une nouvelle analyse du temps nécessaire pour chaque action au travail. Cela caractérise l’attitude de la direction : elle se moque des besoins de chaque magasin et du personnel, elle calcule froidement comment augmenter la flexibilité et la charge de travail du personnel.”

Quelles sont les réactions sur les lieux de travail ?

“Beaucoup de gens se disent qu’ils ont fait grève pendant une semaine sans sentir aujourd’hui la moindre différence dans leur charge du travail. Nous sommes sortis renforcés de cette semaine pour les négociations concernant la CCT, mais c’est la direction qui détermine leur agenda.

“Nous devons davantage déposer nos propres propositions. Développer un cahier de revendications n’est pas aisé : le personnel est réparti sur de nombreux sites et le roulement de personnel est important. Lorsque je me rends sur un site, je peux parler à cinq ou six collègues pendant qu’ils travaillent, ils ne peuvent donc écouter que d’une oreille. Mais notre groupe de militants syndicaux s’est renforcé et, sur base de notre expérience, nous sommes en mesure de travailler à une plate-forme de revendications.

“Cela peut aller dans le sens d’un plus grand nombre d’heures prestées sur base de ce qui est nécessaire dans un magasin, de la participation du personnel à la gestion du magasin, de l’augmentation du nombre de contrats fixes et à plein temps, etc. Avec ce type de mesures, le personnel se sentira plus à l’aise au travail, ce qui ne peut qu’être profitable à l’atmosphère dans le magasin, entre collègues et envers les clients. Mais cette direction ne va pas tout simplement accepter, il va falloir continuer le combat.”

 

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