Saint-Gilles : pour un plan radical d’investissements publics pour 3000 logements sociaux de qualité !

Photo : Wikipedia

Des loyers abordables pour du logement de qualité !

Année après année, le problème du coût du logement ne cesse de s’aggraver à Bruxelles. Contrairement aux années 1970-1990, le taux de propriétaires n’augmente pas en raison de l’appauvrissement de la population. A Bruxelles, 60% des ménages sont des locataires. Le marché immobilier est de plus en plus concentré dans les mains de multipropriétaires. 93% des logements loués sont des appartements dont les loyers ont augmenté de plus de 100€ en 10 ans pour atteindre en moyenne de 710€ en 2016(1).

La pénurie de logements abordables est propice aux affaires, tout d’abord pour les spéculateurs fonciers qui revendent les terrains avec une marge maximum poussant les prix constamment à la hausse, mais également pour les promoteurs immobiliers qui ne produisent quasi pas de logements sous la barre de 2700€ le m². Un logement pour un Bruxellois au revenu moyen devrait être produit au maximum à 1500€ le m². Ainsi, la Région subsidie très fortement le secteur pour qu’une partie du parc immobilier soit tout de même plus accessible à l’aide de PPP (partenariat public privé) garantissant les bénéfices des promoteurs immobiliers avec l’argent public.Cette option particulièrement inefficace est très coûteuse pour la collectivité.

Les logements sociaux à Bruxelles (moins de 40.000) ne représentent aujourd’hui que 8% de l’ensemble des logements. 44.000 ménages sont sur une liste d’attente et les 10 ans décourage beaucoup de s’y inscrire. Pourtant, la moitié des Bruxellois remplissent les conditions pour y accéder. Soulevons que 3% de ces logements sociaux sont inoccupés, 145 occupés en moins en 2016 par rapport à 2004(2). Les investissements publics sont insuffisants même pour seulement maintenir le parc de logement social en état. La situation à Saint-Gilles est parmi les pires : seulement 4,3% de logements sociaux, dont 9,7% inoccupés faute de moyens suffisants alloués à leur rénovation ! Gauches Communes, initiative à laquelle participe le PSL, défend la nécessité d’un parc de logements comprenant 15 à 20 % de logements sociaux publics pour mettre pression sur les loyers du marché privatif.

On estime entre 15.000 et 30.000, le nombre de logements vides à Bruxelles – dont environ 800 sur le territoire de la petite commune de Saint-Gilles(3). Malgré environ 1 million de m² de bureaux vides, on continue à promouvoir des projets de nouvelles tours de bureaux dans le quartier du Midi… Saint-Gilles refuse d’utiliser le droit de réquisition, via la loi Onkelinkx de 1993, pour pouvoir y loger les sans-abris ou mettre une maison à la disposition des comités de sans-papiers à la recherche d’un bâtiment sur Bruxelles. C’est cela que ferait une véritable commune hospitalière.

Une politique communale de gentrification pour chasser les pauvres

MR et Open-VLD ont lancé leur campagne électorale à Bruxelles-Ville pour en finir avec le logement social dans la commune. Leur argument est que le logement social crée un appel d’air qui attire les pauvres. Leur idée est que les pauvres doivent déménager du centre-ville vers les autres communes pour pouvoir continuer la politique de city-marketing et de tourisme d’affaires.

En réalité, toutes les communes tentent d’attirer dans des quartiers modestes la classe moyenne aux revenus plus élevés ou bien des ménages qui disposent encore de deux revenus stables, de sorte à augmenter les revenus fiscaux. L’argent public est alors dépensé pour développer l’attractivité plutôt que le bien-être des habitants. Sous prétexte d’organiser une mixité sociale, il s’agit en réalité d’évacuer les plus pauvres, à la place de lutter contre la pauvreté en soi. Dans ce contexte, construire des logements sociaux serait, de leur point de vue, non seulement non productif, mais surtout cela engendrerait le risque pour les communes d’attirer les pauvres que les autres chassent.

Logement social ou logement public ?

La commune de Saint-Gilles possède la deuxième plus grande Régie foncière après Bruxelles-Ville. Pour les autorités communales, chaque partenaire public a son public cible. Le Foyer Sud(4) mise sur le logement social pour les allocataires sociaux via le financement de la Région, tandis que la régie opte plutôt pour ‘‘les revenus moyens’’ avec un financement de la commune. Saint-Gilles ne compte que 1123 logements sociaux sur un peu moins de 29.000 logements. Durant la campagne électorale de 2012, le PS saint-gillois s’était engagé à fournir 350 nouveaux logements publics à Saint-Gilles, mais aucun logement social ! La régie possède aujourd’hui près de 900 logements publics contre environ 800 lors de la législature précédente. Elle les loue à ‘‘loyer modéré’’, soit très légèrement sous le coût du marché privé.

Le revenu annuel maximum pour accéder à un logement public de la régie est fixé depuis en 2009 à des montants très élevés : 40.000 € pour un isolé et 70.000 € pour un ménage(5). Cela revient quasiment à ne pas fixer de limites, si ce n’est celle de ne pas être propriétaire. Le revenu médian net imposable est très bas à Saint-Gille : soit 16.600 € 6). La majorité des Saint-Gillois remplissent donc les conditions d’octroi d’un logement social (22.500 € pour un isolé, 28.500 € pour un ménage sans enfants). Mais la commune ne souhaite pas que les bas revenus aient accès à ces logements publics de la régie. Pour ce faire, elle a introduit une limite minimale de revenu empêchant le loyer de dépasser 40 % des revenus du ménage, alors que près de la moitié des ménages bruxellois doivent consacrer plus de 50% de leurs revenus à ce poste.

Cathy Marcus, échevine du logement, déclare : ‘‘Dans le haut, la commune laisse faire le privé, ce n’est pas là que la régie a envie d’investir’’. Dans les faits, cette régie achète les bâtiments peu entretenus dans les quartiers pauvres, les rénove et les remet sur le marché locatif à destination de couches à plus hauts revenus. Elle intervient ainsi pour transformer les quartiers les moins ‘‘rentables’’ en nouveaux quartiers attractifs aux investissements. Dans ce contexte, le logement social est clairement mis sur une voie de garage.

3000 nouveaux logements sociaux publics à Saint-Gilles : irréaliste ?

Pourtant, le nombre de logements sociaux construits à Bruxelles par les pouvoirs publics atteignait jusqu’à 7.000 unités par an dans les années ‘70. Mais quasiment rien n’a été fait pour le logement social depuis 40 ans, le retard accumulé est considérable et nécessite un plan de création de logements sociaux d’une ampleur inédite.

Certains rétorquent que l’espace est inexistant au vu de la densité de l’habitat, comme si le logement social ne peut se faire que via des tours type HLM et qu’agir rue par rue est uniquement l’apanage de la régie pour du logement moyen ! Il semble que la mixité sociale ne va que dans une seule direction : en installant des personnes aux revenus plus aisés dans les quartiers du bas de la commune, mais pas ceux aux revenus modestes dans les quartiers plus aisés du haut de la commune, laissée en pâture au privé. Ceux qui tiennent ce discours veulent laisser la part belle aux spéculateurs et à leurs profits et n’ont pas la volonté politique d’enrayer la hausse des loyers. La logique de Gauches Communes est tout autre : celle des besoins de la population et de chercher un chemin pour les rencontrer.

Créer 3000 logements sociaux publics de qualité et écologiquement neutres au cours de la prochaine législature communale est la seule façon d’exercer une pression réelle sur les loyers en attribuant 15 % du parc de logements au logement social, comme première étape vers l’objectif de 20 %, en ne concentrant pas tout le logement social dans le bas de la commune et l’est du centre, mais en l’étalant sur tout le territoire de la commune.

Créer, cela ne signifie pas seulement construire de nouveaux logements. Rien n’empêche de revoir les conditions d’accès au logement de la Régie pour reconvertir les 900 logements publics vers du logement social, ainsi que d’élargir les activités de la régie sur la moitié haute de la commune. Nous pouvons agir via l’acquisition et la réquisition, entre autres des 800 logements vides et des bureaux vides et nous devons rénover urgemment les dizaines de logements sociaux inoccupés.
Pour parvenir à la création massive de 3000 nouveaux logements sociaux publics, nous devrons lutter pour obtenir les moyens suffisants de la Région et du Fédéral. Pour y arriver, la commune devra construire un rapport de force en favorisant l’émergence d’un front de communes de gauche et en stimulant l’action massive des habitants et du mouvement ouvrier organisé.

1) Enquête réalisée par Marie-Laurence De Keersmaecker, professeure de géographie à l’UCL, en collaboration avec Sonecom. L’enquête sur la situation et l’évolution des loyers dans la capitale s’est focalisée sur 5004 logements échantillonnés sur le territoire bruxellois dans le cadre de l’Observatoire des Loyers de la Région de Bruxelles-Capitale durant l’été 2016.
2) Chiffres de la Société du Logement de la Région de Bruxelles-Capitale.
3) Codes, Comité de Défense de Saint-Gilles.
4) Sisp, Société Immobilière de Service Public.
5) Ces montants auraient été indexés, mais nos interpellations téléphoniques et nos courriers écrits à la Régie sont restés sans réponse.
6) SPF finances, 2015.

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