Tuerie de Liège. Après des années de politique répressive, la violence augmente.

Le boulevard d’Avroy, où les meurtres ont été commis. Photo : Wikimedia.

Une fois de plus, le pays s’est retrouvé en état de choc. L’horreur et la tragédie ont cette fois touché la ville de Liège ce mardi 29 mai lorsque Benjamin Herman a tué deux policières, Lucile Garcia et Soraya Belkacemi, puis Cyril Vangriecken, un étudiant de 22 ans qui se trouvait en voiture et a été tué sous les yeux de sa mère. Nous exprimons nos sincères condoléances aux proches des victimes ainsi que notre solidarité envers toutes les personnes impliquées dans ce drame, parmi lesquelles les élèves et le personnel de l’athénée Léonie de Waha, dont la femme de ménage prise en otage qui a courageusement tenté de raisonner le criminel avant qu’il ne soit abattu.  

Depuis la tuerie de Liège, la semaine dernière, les commentaires de la droite ne manquent pas. On oublierait presque que la droite est au pouvoir depuis des années et qu’elle est donc aussi responsable des problèmes rencontrés actuellement. Les propositions que l’on a pu entendre vont du ‘‘travail citoyen’’ volontaire des détenus pour les mettre sur le « droit chemin » à la création d’une sorte de « Guantanamo sur l’Escaut » où les personnes radicalisées seraient enfermées sans procès jusqu’à ce que « la guerre avec Daesh ait pris fin ».

Par Sander (Termonde)

La droite instrumentalise les dramatiques événements de Liège pour mettre en avant des mesures dures et antisociales. La sympathie générale envers les victimes de cette terrible violence est utilisée à cette fin. C’est aussi une fuite en avant pour éviter de discuter de la politique de sécurité défaillante des autorités. Comment expliquer que nous en sommes toujours là après des années d’utilisation intensive de rhétorique martiale et ‘‘plan Canal de lutte contre la radicalisation’’ (mis en place à Bruxelles début 2016, quelques semaines après les attentats de Paris) ? La vérité, c’est que le droit économise sur tout, y compris dans les prisons. Les agents pénitentiaires s’étaient d’ailleurs révoltés en 2016 contre les conditions de travail inhumaines et les conséquences que cela avait, notamment pour les détenus. La Belgique a été critiquée à plusieurs reprises pour son attitude à l’égard des prisonniers. Assuré que ces derniers puissent s’intégrer dans la société exige un travail social conséquent, que ce soit en prison ou par la suite, mais aussi qu’il existe suffisamment d’emplois décents et de logements abordables. Toutes ces choses, la droite y est allergique.

La proposition du Syndicat libre de la fonction publique (SLFP) visant à permettre aux prisonniers de faire un ‘‘travail citoyen’’ à l’extérieur des prisons essaie au moins de trouver une manière de préparer le retour des détenus dans la société. Mais cela risque avant tout d’instaurer une pression supplémentaire sur les salaires. Quelle commune recrutera encore du personnel pour l’entretien des espaces verts si des détenus peuvent effectuer ce même travail pour 2 euros de l’heure ? Aux États-Unis, le travail carcéral est d’ailleurs devenu une activité très rentable.

Avec sa proposition de détention sans procès pour une durée indéterminée, Bart De Wever lorgne lui aussi vers les États-Unis et plus particulièrement sur Guantanamo Bay. Il est assez hypocrite d’exiger des réfugiés qu’ils signent la déclaration des droits de l’homme alors que le président du plus grand parti au pouvoir propose que les conventions relatives aux droits de l’homme ne s’appliquent pas à tous. De Wever & Co préféreraient d’ailleurs que cela ne s’applique pas à tous ceux qui représentent un danger pour leur avidité néolibérale.

Aux Etats-Unis, l’échec de décennies de politiques sécuritaires répressives et de mesures d’exception a encore été récemment illustré par les mobilisations de la jeunesse contre les fusillades dans les écoles, qui sont d’ailleurs en augmentation constante. A l’instar des événements de Liège, il s’agit là aussi de terroristes issus de la « même culture ». En dépit de cet échec flagrant, c’est exactement ce que la droite nous propose comme logique : des mesures sévères mais inefficaces.

Cette logique refuse de s’en prendre au terreau fertile sur lequel l’extrémisme et même des éléments du terrorisme peuvent prospérer. Cela nécessiterait un débat sur les relations sociales dans la société, ce qui veut par-dessous tout éviter l’élite capitaliste qui s’enrichit de plus en plus. Il est pourtant évident qu’il ne saurait être question de sécurité au beau milieu d’un désert social. Tout comme il est évident que la situation de guerre interminable au Moyen-Orient – encore aggravée depuis 2003 et l’invasion de l’Irak, sur base de mensonges, pour accéder aux réserves de pétrole du pays – a conduit à l’émergence de groupes réactionnaires tels que Daesh. Si la Syrie et l’Irak restent en ruines, Daesh peut bien être rayée de la carte, mais ce ne sera qu’une question de temps avant que de nouveaux groupes réactionnaires similaires ou pires encore se développent.

Le fait que même ici des gens soient suffisamment aliénés de la société pour chercher une perspective dans le fondamentalisme réactionnaire en dit long sur la profondeur de la crise du capitalisme.

Combattre le terrorisme exige un plan d’investissements publics ambitieux dans les services publics (enseignements,…), pour plus de logements sociaux, plus d’emplois décents (et donc l’introduction de la semaine des 30 heures sans perte de salaire et avec embauches compensatoires). Cela serait de nature à offrir une perspective d’avenir à ceux qui peinent actuellement à garder la tête hors de l’eau.

Des investissements dans le système carcéral et le soutien adéquats sont bien entendu également nécessaires pour assurer que les détenus puissent retrouver une place dans la société. Cela implique une société reposant sur une économie où la production est orientées vers la satisfaction des besoins de la population et non pas vers l’avidité des multinationales et autres parasites ultra-riches. Ce n’est que de cette manière qu’il est possible de donner naissance à un monde débarrassé du terrorisme et de l’exploitation.

 

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