La lutte de Martin Luther King : de Montgomery jusqu’au Vietnam

Cette année marque le 50e anniversaire de l’assassinat du Dr Martin Luther King Jr., qui a été abattu le 4 avril 1968 alors qu’il soutenait les éboueurs noirs en grève à Memphis. Cependant les commémorations officielles de M.L. King nous donnent souvent une version édulcorée de sa vie et de l’histoire du mouvement des droits civiques aux Etats-Unis.

Par Will Soto, Socialist Alternative (USA)

Aux USA, il est courant d’entendre des politiciens de droite citer King pour parler de discrimination positive ou pour justifier des attaques contre le niveau de vie. Comme c’est le cas pour beaucoup de défenseurs des opprimés, la classe dirigeante les craint et les combat avec acharnement de leur vivant, puis tend à rendre inoffensif leur message politique après leur mort. L’establishment américain craignait particulièrement la radicalisation croissante de Martin Luther King à la fin de sa vie, lorsqu’il se prononça brusquement contre la guerre du Vietnam et commença à remettre en question le système capitaliste et même à parler de ‘‘socialisme démocratique’’.

Une stratégie de lutte de masse contre la pauvreté

La montée en puissance de King a commencé avec le Boycott des bus de Montgomery en 1955-1956. La stratégie de lutte de masse non-violente contre Jim Crow (les lois ségrégationnistes), d’abord suivie par King à Montgomery, contrastait avec la stratégie traditionnelle de la direction plus modérée de la NAACP (Association Nationale pour la Promotion des Gens de Couleur), qui estimait que l’action directe des masses effrayerait leurs alliés dans les partis démocrate et républicain.

King a répondu à cela dans sa fameuse Lettre de la prison de Birmingham : ‘‘Nous savons par une douloureuse expérience que la liberté n’est jamais donnée volontairement par l’oppresseur; cela doit être arraché par les opprimés.’’ King a donc joué un rôle important dans l’organisation des manifestations de masse à Birmingham en 1963, qui furent réprimées brutalement, mais dont le courage étalé a suscité la sympathie de larges couches de la population.

Seule la crainte de voir l’exemple de Birmingham s’étendre à d’autres villes, ainsi que l’impatience grandissante des Noirs du nord, convainquirent l’administration démocrate de John F. Kennedy que quelques lois fédérales sur les droits civiques devaient être promulguées. Les autorités américaines craignaient aussi que la publicité négative créée par les attaques racistes à Birmingham permette à l’Union soviétique d’affaiblir l’emprise américaine en Afrique et dans le reste du monde néocolonial. Et ceci, en contraste frappant avec la mythologie répandue créditant le Parti démocrate du côté des droits civiques.

L’expérience du mouvement des droits civiques montre que la clé du changement ne repose pas sur l’establishment politique capitaliste ou dans le lobbying, mais plutôt sur la construction de mouvements de masse par le bas. King est également entré en conflit sérieux avec les autorités pendant la guerre du Vietnam, lorsqu’il s’est opposé à la guerre et a dénoncé de plus en plus les discriminations vécues par les Noirs américains comme étant liées à la politique étrangère des États-Unis.

Dans ses dernières années, King se tourna de plus en plus vers les problèmes d’injustice économique et d’inégalité. Ce qui a été particulièrement important dans son cheminement, ce sont ses expériences dans les ghettos du nord où les problèmes de la classe ouvrière et des Noirs pauvres ne pouvaient pas être résolus en se limitant à la lutte contre de la discrimination. Dans sa quête d’un moyen de gagner une égalité réelle pour les Afro-Américains, King a commencé à tirer la conclusion qu’une lutte sérieuse contre la pauvreté et l’oppression était nécessaire.

‘‘Peut-être que l’Amérique doit se diriger vers un socialisme démocratique’’

Il considérait de plus en plus l’idée qu’une répartition équitable des ressources de la société signifierait rompre avec les règles du capitalisme, qui repose sur la pauvreté des travailleurs noirs (et latinos) comme une source importante de superprofits.

King a également commencé à parler de la nécessité du socialisme. Dans un discours prononcé en 1966, il a déclaré : ‘‘Vous ne pouvez pas parler d’une résolution du problème économique des Noirs sans parler de milliards de dollars. Vous ne pouvez pas parler de la fin des bidonvilles sans dire d’abord que les profits ne doivent plus être faits sur les bidonvilles. Vous falsifiez vraiment parce que vous avez affaire à des gens maintenant. Vous avez affaire à des capitaines d’industrie […] Maintenant ça signifie que vous vous déplacez dans une mer agitée, parce que ça signifie qu’il y a quelque chose qui ne va pas avec […] le capitalisme […]Il doit y avoir une meilleure distribution des richesses et peut-être que l’Amérique doit se diriger vers un socialisme démocratique.’’

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