Elections municipales britanniques. Il faut concrétiser la rhétorique de gauche !

Jeremy Corbyn. Photo : Wikimedia Commons

Ces dernières années beaucoup de turbulences politiques ont secoué la Grande Bretagne. Cela n’a pas l’air de devoir se calmer de sitôt.

Par Els Deschoemacker

Il y a eu la ‘‘révolte Corbyn’’, qui a vu des centaines de milliers de jeunes et de travailleurs se ranger à plusieurs reprises derrière le président de gauche du parti travailliste Jeremy Corbyn en opposition aux partisans de Tony Blair dans le parti. Puis le vote dramatique sur le Brexit, une véritable insurrection des couches les plus pauvres de travailleurs contre la brutale politique d’austérité de l’Union européenne et de l’establishment britannique. Ce tremblement de terre politique continue de hanter l’élite, tant britannique qu’européenne. Finalement, Theresa May, première ministre, a perdu sa majorité conservatrice au parlement à l’occasion d’élections anticipées. Elle doit dorénavant naviguer en plein turbulence à la barre d’un gouvernement minoritaire et d’un parti conservateur où règne la discorde. La droite pourra toutefois continuer ses méfaits, à moins que la gauche ne s’organise et saisisse l’occasion pour contre-attaquer.

Tout cela ne tomba pas du ciel. L’austérité a ravagé la société britannique. Depuis 2010, plus d’un million de personnes handicapées ont perdu leur allocation, en totalité ou en partie. Les loyers ont doublé en dix ans. Plus d’un demi-million de travailleurs municipaux ont perdu leur emploi (enseignants, pompiers,…). Divers services publics locaux ont été privatisés ou sujets à des partenariats public-privé (PPP).

La réaction ne s’est pas uniquement traduite sur le terrain électoral. Des dizaines de campagnes locales, voire nationales, ont pris place pour sauvegarder des hôpitaux et des bibliothèques publiques, pour exiger des hausses de solaire, s’opposer aux licenciements,…

Corbyn et le politique municipale socialiste

Souvent, cette lutte s’oppose à des majorités municipales, y compris du parti travailliste. Cela rend très concret l’enjeu de la lutte entre l’aile gauche et l’aile ouvertement pro-capitaliste du parti travailliste. A quoi sert un programme de rupture anti-austérité et en faveur de plus d’investissements publics si cela n’assiste pas la lutte pratique pour l’obtention de ces revendications ?

Ainsi des centaines d’habitants de Haringey ont protesté contre la privatisation des logements sociaux dans de district du Grand Londres dirigé par le parti travailliste. Cela a conduit à l’écartement de candidats travaillistes favorables à la privatisation, remplacés par des candidats de gauche. La décision de privatiser a depuis été repoussée jusqu’après la tenue des élections municipales, en mai prochain. Sous la pression de la lutte, Haringey peut ainsi devenir une des premières localités à suivre Corbyn. La collectivité veut récupérer ce qu’elle a perdu ces dernières années.

Tout cela suscite un vif débat sur la manière de trouver les moyens publics nécessaires pour rompre avec l’austérité. Le Socialist Party, le parti-frère du PSL en Angleterre et au Pays de Galles, est résolument en faveur de budgets municipaux anti-austérité, en faisant appel aux réserves des localités mais aussi avec la possibilité de faire des prêts à bon marché. Il ajoute que cela ne suffira probablement pas et qu’il faudra combattre pour arracher plus de moyens de la part des autorités nationales.

Un mouvement unifiant des majorités municipales de gauche en lutte via des groupes d’actions locaux, avec l’implication de la jeunesse et des travailleurs, pourrait donner le coup de grâce au gouvernement affaibli de May. Cela ouvrirait la voie à Corbyn pour former un gouvernement travailliste qui pourrait diriger la politique nationale vers une orientation socialiste.

Jusqu’ici, Corbyn et son entourage ont essayé de concilier la gauche et la droite au sein du parti travailliste afin de parvenir à un compromis. C’est une illusion. Chaque pas en avant réalisé l’a été lors de moments où une politique résolument de gauche a été adoptée par-dessus la tête de la droite. C’est ce que l’on a pu constater lors de la publication du manifeste de Corbyn pour les élections de juin dernier, et encore une fois encore avec l’écartement des candidats de droite à Haringey.

Le Socialist Party appelle Corbyn à saisir le moment pour rompre avec la droite du parti, à démocratiser le parti travailliste, à faire appel aux centaines de milliers de jeunes et de travailleurs qui ont rejoint le parti travailliste ces dernières années, à renforcer de nouveau le poids des syndicats dans le parti et à réintégrer dans le parti tous ceux qui, dans le passé, ont été exclus en raison de leur combattivité de gauche.

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