Quel avenir pour nos enfants?
Le ministre de l’Enseignement pour la Flandre, Frank Vandenbroucke, a annoncé de nouvelles mesures d’austérité dans l’enseignement. Cela suscite l’indignation des enseignants noyés dans des classes surpeuplées et l’inquiétude des parents.
Marijke Decamps
L’organisation de l’enseignement n’est pas tombée du ciel. Dès que le mouvement ouvrier a commencé à s’organiser, il a formulé des revendications pour un enseignement gratuit et de bonne qualité. Quand les ouvrières ont commencé à s’organiser, elles ont systématiquement essayé d’envoyer leurs enfants sur les bancs de l’école plutôt qu’à l’usine. A l’époque les classes étaient nombreuses et la pédagogie s’appuyait fort sur l’apprentissage par cœur et sur la sélection.
Les mouvements de révolte de la classe ouvrière ont provoqué beaucoup de changements au 20e siècle. Après Mai 68, un processus de démocratisation de l’enseignement s’est mis en route et de nouvelles méthodes pédagogiques ont été mises en place.
Gratuit
“Chaque année scolaire c’est la même chanson: il y a de nombreux frais supplémentaires et on ne sait jamais d’avance à combien cela va se chiffrer. Dans notre ménage, on peut payer. Mais dans beaucoup de familles cela devient de plus en plus difficile. Le comité des parents s’occupe de récolter de l’argent pour essayer d’aider financièrement l’école. Ceux qui n’ont pas l’argent pour acheter des lots de tombola ou pour participer à la fancy-fair sont regardés de travers et les enfants sentent aussi cette pression.” (Ann)
De 1989 à 1999, les coûts pour l’école secondaire ont augmenté de 82%. Ceux de l’école primaire de 93%. Selon un appel de SOS Dettes à l’Ecole, il y a des écoles où 10% des parents ont un plan d’apurement pour payer les frais scolaires. De plus, les bourses scolaires sont devenues inaccessibles : on dépasse très vite le plafond pour y avoir droit.
De qualité
Souvent l’école est perçue par les jeunes comme un lieu où l’on est condamné à user ses fonds de culotte jusqu’à 18 ans en écoutant sagement et en apprenant par cœur. Il y a toujours une forte pression lors des tests pour obtenir le plus de points possible et ne pas être relégué derrière les autres. Notre enseignement est peut-être un des plus développés en Europe, mais il est aussi celui où beaucoup de jeunes quittent l’école sans diplôme.
Depuis 20 ans, l’enseignement connaît des coupes budgétaires et chaque tour de vis budgétaire laisse des traces. Beaucoup de bâtiments scolaires sont délabrés. Il y a des restrictions sur l’encadrement et l’accompagnement des élèves: ceux qui ne peuvent pas suivre sont largués. L’enseignement est un lieu où les inégalités sociales se renforcent, au lieu de s’atténuer.
L’enseignement socialiste
Dans une société socialiste l’enseignement ne sera plus conçu comme aujourd’hui. Il donnera l’espace aux jeunes pour se développer complètement, apprendre ce qui les intéresse, et cela d’une façon que tout ce qui est appris découle de la pratique des travailleurs.
Un exemple intéressant est celui de l’enseignement immédiatement après la Révolution russe. La gratuité de l’enseignement a tout de suite été instaurée. En 1918 les écoles ont été transformées en "écoles de travail unifié", où le travail productif était à la base du développement des jeunes. Les écoles étaient ouvertes sept jours sur sept pour que les jeunes puissent y apprendre les choses qui les intéressaient, et pas seulement pour suivre des cours.
Les Bolcheviks ont essayé de proposer un programme complet, basé sur la vie et sur la production. En 1918, par exemple, Lénine recommandait que les cours d’électricité soient combinés à des visites de centrales électriques. La compagne de Lénine, Kroupskaya, encourageait les enseignants à prendre la vie quotidienne des travailleurs et des paysans locaux comme points de départ pour des projets pédagogiques. Ainsi tous les adultes deviennent des "enseignants".
Lounatcharsky, Commissaire du Peuple à l’Enseignement, insistait pour que les écoles mettent au centre de leurs pré-occupation l’acquisition d’outils sociaux plutôt que l’apprentissage de recettes techniques. Lénine a défendu la nécessité d’un enseignement critique orienté sur le développement des individus indépendants et sur le développement de leurs capacités, aux antipodes du bourrage de crânes superflu et sans vie.
En 1918 le libre accès à l’université, sans examen d’entrée ni de minerval, a été instauré. Les écoles étaient organisées par des conseils démocratiques où les jeunes avaient leur mot à dire sur les matières enseignées et sur la pédagogie. Les membres de ces conseils, élus par les élèves, les parents et le personnel étaient révocables de façon permanente.
L’enseignement gratuit et de qualité n’existe pas dans notre pays. C’est le moins que l’on puisse dire. La lutte permettra d’améliorer la situation, mais ce n’est que dans le cadre d’une société socialiste, où les lois du marché seront abolies, que l’enseignement sera un véritable outil d’émancipation.