‘‘C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches’’

Cette citation, vous la connaissez probablement déjà. Elle nous vient du 19e siècle, de la plume de Victor Hugo. Elle refait régulièrement surface dans les médias à l’occasion de chaque rebondissement dans les affaires de scandales fiscaux.

Par Nicolas Croes

Les Paradise Papers, révélés en novembre 2017 par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), concernent des montages d’optimisation fiscale pratiqués par des multinationales et célébrités planétaires. L’économiste français Gabriel Zucman estime que cette optimisation fiscale des entreprises et des grandes fortunes représente 350 milliards d’euros (le FMI parle de 800 milliards), de pertes fiscales par an aux États du monde entier. La colère et l’indignation face à ce chiffre est d’autant plus grande qu’il prend place dans un contexte de crise et de politiques d’austérité.

Cette fuite constitue la deuxième plus grande révélation de documents exploités par les médias après les Panama Papers en avril 2016. Depuis lors, il y a encore eu les Malta Files (mai 2017) et les Bahamas-Leaks (septembre 2016). Avant cela, il y a eu les SwissLeaks (février 2015), les Luxembourg Leaks (novembre 2014), les China Leaks (janvier 2014) et les Offshore Leaks (avril 2013).

Ces scandales – qui ont levé un coin du voile sur le monde des paradis fiscaux, de l’évasion fiscale et du blanchiment d’argent – ont tous été l’oeuvre du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), à l’exception des Malta Files.

Il ressort des premières analyses des Paradise Papers que s’il y a eu quelques fraudes, la plupart des cas dévoilés sont ‘‘a priori légaux’’, selon le journal français Le Monde (qui participe au ICIJ) mais ‘‘l’ampleur des sommes échappant à l’impôt est telle que la question se pose aussi en termes d’éthique’’.

Pour Gabriel Zucman (qui a étroitement collaboré avec l’ICIJ pour analyser ces documents), les personnes ou entreprises qui recourent à de telles pratiques de fraude ou d’évasion fiscales, c’est le 0,01% des plus riches. Pour lui, il y a une réelle concentration de la fraude chez les plus nantis, qui peuvent recourir à une armée de juristes et d’avocats pour masquer leurs pratiques. Les banques privées ont bien compris que les ultras riches deviennent de plus en plus riches. Elles se spécialisent donc dans la gestion de leurs fortunes (des ménages dont les avoirs atteignent les 50 millions d’euros). Leur fortune augmente beaucoup plus rapidement que l’économie, ce qui explique que l’argent augmente dans les paradis fiscaux.

De la dénonciation à l’action

A l’époque, les Panama Papers avaient conduit à la démission du premier ministre islandais, touché de plein fouet par le scandale. Sans l’entrée en action des masses, sans que la colère et l’indignation ne s’expriment dans la rue, nous pourront encore assister à d’autres révélations de ce genre sans que rien ne bouge. Nous vivons des temps où la jeunesse et tous ceux qui souffrent de ce système tolèrent de moins en moins des pratiques en cours depuis longtemps pourtant. C’est ce qu’ont illustré la colère et les sondages dévastateurs autour de Publifin ou du Samusocial. C’est le même processus qui avait mis hors course Fillon lors des élections présidentielles françaises. Le succès des hashtags #mettoo et #balancetonporc a aussi montré que la coupe était pleine contre les discriminations ancrées dans cette société.

Les Paradise papers & Co sont autant d’arguments à utiliser pour renforcer la lutte contre les politiques d’austérité et contre leur monde, celui de l’arrogance des riches. Ce sont également autant d’arguments en faveur de mesures drastiques telles que la nationalisation sous contrôle démocratique de la totalité du secteur financier et d’autres mesures de type socialiste. Une fois de plus, le capitalisme nous démontre qu’il n’est un paradis que pour les riches tandis qu’il organise la misère de la large majorité sociale. Un tel système n’a de place que dans les poubelles de l’histoire.

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