Le week-end dernier, le quotidien Le Soir a publié un dossier très intéressant consacré aux conditions de vie de la population tamoule au Sri Lanka. Après 30 années de guerre civile et une ‘‘phase finale’’ particulièrement sanglante (40.000 morts en trois semaines…), la minorité tamoule continue d’être discriminée et continue de connaître une situation des plus terrible. La correspondante du Soir, Vanessa Dougnac, envoyée spéciale au Sri lanka, livre un rapport des régions tamoules.
Cette journaliste a eu plus de chance que ses collègues hollandais, attaqués par ce qui semble bien avoir été des agents du régime. Les deux journalistes hollandais ont dû quitter le pays après leur agression. Depuis 2008, pas moins de 4 journalistes ont été tués au Sri Lanka. Le régime du président Rajapakse fait tout ce qui lui est possible pour s’opposer à la publication d’articles et de nouvelles au sujet des crimes de guerre et des problèmes qui persistent au Sri Lanka.
Deux ans après la fin ‘officielle’ de la guerre, le sort de 146.000 personnes reste inconnu tandis que des milliers de jeunes vivent encore dans des camps. Le régime applique une dictature militaire sévère au nord du pays et les journalistes n’y sont pas tolérés. Le rapport des Nations Unies décrivant les crimes de guerre et la violence de l’armée a été accusé par le régime d’être une vulgaire ‘‘falsification’’. Le régime nie tout en bloc.
Le Soir écrit : ‘‘230.000 Tamouls se retrouvent enfermés dans les camps de Menik Farm, ils y restent plusieurs mois dans des conditions déplorables. Quant aux ex-Tigres, au nombre de 12.000 d’après les autorités, ils sont isolés dans des centres de détention.’’ Il est impossible d’obtenir des chiffres exacts comme le gouvernement ne donne pas de chiffres. Mais plus de 146.000 personnes ont disparu. Un documentaire de Channel 4 a montré des images de prisonniers tués par des soldats. ‘‘La page de la guerre civile au Sri Lanka n’a pas été tournée le 18 mai 2009’’, conclu Le Soir. Le documentaire allait dans le même sens et livrait également des témoignages d’attaques de l’armée contre des hôpitaux.
Malgré toute la répression, les marxistes continuent leurs activités au Sri Lanka. Notre parti-frère, l’United Socialist Party, est actif parmi les populations singhalaise et tamoule. La semaine passée, l’USP a eu des candidats aux élections régionales de Jaffna, la capitale de la région tamoule au nord du pays. Bien que le gouvernement ait tout fait pour saboter notre campagne et malgré le total manque de droits démocratiques, nos camarades ont réussi à finir troisième parti, devant l’opposition de droite traditionnelle de l’United National Party.
Sur le plan international, nous menons la campagne ‘Solidarité Tamoule’, qui soutient ou organise des actions et des discussions. Avec cette campagne, nous organisons aussi des Tamouls en Belgique, dont quelques-uns qui ont rejoint le PSL à Anvers. La campagne principale de ‘Solidarité Tamoule’ est consacrée à la nécessité d’une enquête internationale concernant les crimes de guerre. Nous avons soutenu cette revendication avec notamment une action devant le Parlement Européen le 18 mai 2011, soit deux ans après la date officielle de la fin de la guerre, mais aussi avec une petite action à Anvers le 18 juillet dernier. Entretemps, nos camarades au Parlement Européen ont organisé un meeting officiel sur le Sri Lanka, et le député européen du CIO Paul Murphy essaie de mettre sur pied une délégation de parlementaires européens pour aller au Sri Lanka cet automne.
La ligne officielle du régime est toujours de nier les crimes de guerre. Après le meeting au Parlement Européen, la presse du régime a écrit que Paul Murphy soutient les Tigres Tamouls du LTTE (Liberation Tigers of Tamil Eelam), bien que nous ayons des critiques sur leur approche de guérilla et sur leurs illusions envers le capitalisme (l’idée fausse selon laquelle un pays Tamoul indépendant pourrait devenir un nouveau Singapour). Le Soir a essayé d’obtenir une réaction de l’armée. Ubaya Medawala, le porte-parole de l’armée à Colombo, a déclaré, entre autres, que : ‘‘Nous n’avons jamais tiré sur les civils, et jamais dans la zone de ‘non-tirs’. Nous avons sauvé les civils : ils étaient 300.000 et ont été tous recueillis.’’ Il dit encore que seulement des ‘‘terroristes du LTTE’’ ont été tués par l’armée. Les 40.000 morts en trois semaines (d’après le rapport des Nations Unis) seraient donc tous membres des LTTE ?
La dictature de Rajapakse essaie de masquer sa politique néolibérale et ses crimes derrière une rhétorique anti-impérialiste. Ce n’est pas un hasard si le président Rajapakse a déjà déclaré que le dictateur Kadhafi de Lybie serait la bienvenue au Sri Lanka si la situation dans son pays devenait intenable pour lui. Entretemps, le régime utilise le soutien chinois, suivi par celui de l’Inde et celui de l’Europe, afin de briser la population tamoule et de mettre enfin sur pied des zones spéciales économiques avec des conditions de travail horribles. Le but de la guerre est de créer une armée d’esclaves qui seront disponibles pour les entreprises chinoises et pour d’autres multinationales. Les partis traditionnels, y compris dans notre pays, sont complices de cette situation de par leur silence.