Notre Camarade Gustave Dache est l’auteur d’un livre intitulé ; « La grève générale insurectionnelle et révolutionnaire de l’hiver 1960/61 » Dans cet ouvrage, Gustave s’en prend beaucoup aux « Mandelistes (LCR) et aux Staliniens (PCB-KPB), ci-dessous , nous livrons à nos lecteurs le point de vue de Louis Van Geyt, ancien président du PCB-KPB.
Louis Van Geyt, Ancien président du PCB-KPB.
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Le rôle du PCB, avant, pendant et après la Grande Grève.
Louis Van Geyt (version ajustée et complétée par l’auteur, de la traduction brute par un(e) bénévole de l’article paru dans le Vlaams Marxistisch Tijdscrift – Revue marxiste flamande – n°21, été 2010).
« Concentré » :
- Qui prit la responsabilité du déclenchement de l’action ? Le rôle de G. Debunne, R. Beelen, F. Lauwers, F.Vandenbranden R. Dussart, M. Baiwir …
- L’importance de la date de déclenchement (20.12.60) et du mode de l’action ;
- Le contraste entre le « sentiment » dominant d’échec, voire de défaite parmi les participants, et la signification réelle de la grève ; comme barrage contre le virage social à droite tenté par l’establishment, et comme tremplin de la poursuite – même ralentie – pendant les vingt années suivantes, du modèle social belge d’après guerre.
Sources :
Les souvenirs personnels de l’auteur, alors collaborateur direct de René Beelen, le numéro 2 du PCB-KPB depuis la rupture d’avec le sectarisme de son XI ème Congrès (Vilvorde – décembre 1954). Ceci, en prenant appui sur les archives du PCB-KPB, conservées et gérées par les ASBL Carcob et Dacob*.
Développement synthétique du « concentré » :
1) La grève « généralisée » a été déclenchée le 1er jour du débat plénier de la Chambre sur l’ainsi dite loi unique, non seulement malgré A. Cool et L. Major (les présidents « droitiers » de la CSC et de la FGTB d’alors), mais encore à l’encontre de A. Renard (chef de file de la « gauche wallonne » de la FGTB) qui voulait se limiter à un arrêt de travail de 24 heures en janvier ’61.
Le point de départ de l’action se situait à la CGSP (avec G. Debunne, alors président général de cette Centrale, et F. Lauwers, secrétaire de la régionale d’Anvers du secteur Communaux de celle-ci) et l’initiative de l’extension interprofessionnelle revint au PCB-KPB (avec R. Beelen, secrétaire national de ce parti, R. Dussart, délégué syndical principal CMB aux ACEC de Charleroi, F. Vandenbranden, dirigeant du Comité d’action des dockers d’Anvers et M. Baiwir, chef de file de l’aile gauche de la délégation CMB de Cockerill, tous trois militants en vue du PCB-KPB).
A. Renard ne rejoignit la lutte qu’après plusieurs jours de résistance contre elle, pour ensuite se porter à sa direction et infléchir, début ’61, son objectif premier – « abattre la loi unique » – en la plaçant sous le mot d’ordre « fédéralisme et réformes de structure » (ces dernières parfois affublées du label discutable d’ « anticapitalistes ») – mot d’ordre sous l’égide duquel allait être fondé le Mouvement Populaire Wallon.
2) Le PCB-KPB, important acteur de la préparation et du déclenchement de la grève, par delà le secteur public, n’a pas seulement fortement contribué à l’ample et vigoureux déploiement de celle-ci. Il a en même temps, continûment mis l’accent sur le caractère « constitutionnel et non insurrectionnel » de la lutte. Ainsi, il s’est opposé, principalement par la voix de René Beelen, à une nouvelle marche sur Bruxelles, à des actions violentes comme aux Guillemins, au sabotage des pylônes électriques etc. Il a de la sorte riposté efficacement à la campagne « de l’autobus » de l’aile dure à l’intérieur et autour du gouvernement Eyskens – Lilar (avec entre autres Vanden Boeynants) – campagne selon, laquelle la grève, prétendument était de type « insurrectionnel ».Cette intervention du PCB-KPB fut pour une bonne part dans le fait que la grève allait déboucher sur les suites évoquées au point 3) ci-après.
3) Parce que la grève avait sensiblement régressé lors du vote final par la Chambre d’une loi unique quelque peu « rabotée », la plupart des grévistes ont repris le travail avec le sentiment que la lutte s’était soldée par un échec, voire par une défaite.
Or, dans les faits, celle-ci a débouché presque immédiatement sur la chute du gouvernement Eyskens Lilar, sur la dissolution de Chambres dominées par la droite, et sur la formation d’une majorité et d’un gouvernement « de centre gauche » (Lefèvre – Spaak). En somme, l’establishment s’était vu contraint de prendre ses distances d’avec la stratégie agressive de son aile dure.
Il faut dire que dans la plupart des « bastions » de la FGTB-ABVV, la reprise même résignée du travail s’était déroulée « dans l’ordre », délégués syndicaux en tête, tandis que dans bien des secteurs du mouvement ouvrier chrétien (et particulièrement de l’ACV-CSC) surgit une sérieuse crise à la suite de la non participation du syndicalisme « vert » à l’action décidée des principaux secteurs de son homologue « rouge ».
Et, tandis que A. Renard et ses compagnons allaient pratiquer la « stratégie de l’Aventin » (c à d se retirer jusqu’à nouvel ordre des instances dirigeantes de la FGTB) G. Debunne et consorts, accompagnés par le PCB-KPB, allaient s’appliquer bientôt à construire le Front commun syndical avec l’ACV-CSC, et à exercer continûment une pression directe sur le PSB (plus tard sur le PS et le SP) et indirectement sur le CVP-PSC.
Cette stratégie de la « mouvance Debunne » – avec laquelle, fort heureusement, allaient de plus en plus souvent converger celle des successeurs de A. Renard (prématurément décédé) et de ses successeurs à la tête du Mouvement Populaire Wallon, et non moins celle du PCB-KPB, allait faire beaucoup pour qu’en Belgique purent être préservées et même encore poursuivies pendant quelque vingt ans, les avancées sociales de l’après guerre. Ce n’est, en effet, qu’au début des années ’80, par delà la période des « grèves sauvages » d’après ’68, et les combats souvent « rentables », contre la vague de fermetures d’entreprises des années ’70, que la tendance au progrès social à la belge a commencé à s’inverser, notamment par les sérieux « coups de canif » portés au système de l’indexation. Cela alors que dans la plupart des pays voisins le tournant régressif (Thatcher et consorts) allait intervenir bien plus tôt.
Cette « spécificité » belge – à laquelle l’apport de la stratégie à la fois dynamisante et rassembleuse du PCB-KPB ne peut être sous estimé – ne fut du reste pas étrangère à la phase plutôt sociale de la « construction européenne » (jusques et y compris avec Delors).Mais sans doute ceci n’est-il que le début d’une histoire autre que celle à laquelle a été consacré le présent colloque.
Bruxelles, janvier et octobre 2010, publié en février 2011