FNAC. Une pilule amère pour les travailleurs

Interview d’une déléguée SETCa, Irène Kaufer

Présente en Belgique depuis 1981, la FNAC appartient aujourd’hui au groupe PPR (Pinault Printemps Redoute). En 2003, la filiale belge (Bruxelles, Anvers, Gand, Liège, Louvain, Wijnegem) a réalisé un bénéfice de 4 millions d’euros, entièrement distribué aux actionnaires. En 2004, elle était en perte. La direction a alors imposé un "plan de relance" qui va faire mal aux travailleurs. Nous avons rencontré Irène Kaufer, déléguée principale SETCa.

Propos recueillis par Guy Van Sinoy

En quoi consiste ce "plan de relance"?

“Une suppression d’emplois (25 équivalents temps plein), une nouvelle grille salariale basée sur le mérite au lieu de la grille basée sur l’ancienneté, 5% de contrats à durée déterminée, 5% d’intérimaires, 25 jours par an où l’employeur peut imposer l’horaire de travail sans l’accord du travailleur. Ce n’est donc pas un véritable plan de relance de l’activité commerciale, handicapée par des déficiences en matière d’informatique et de logistique, mais un plan de restructuration pour faire supporter par les travailleurs (baisse de la masse salariale et plus de flexibilité) des erreurs de gestion.”

Comment ont réagi les organisations syndicales et les travailleurs?

“Le 15 avril, nous nous sommes rendus à Paris, en bus, en front commun syndical pour rencontrer la direction et mener une action de protestation en commun avec les collègues de la FNAC Champs-Elysées qui manifestent tous les samedis pour de meilleurs salaires. Le 21 avril, les travailleurs du dépôt d’Evere, directement visés par la restructuration ont cessé le travail et ont mis en place des piquets de grève. La direction de la FNAC a immédiatement réagi en faisant appel au tribunal, par une procédure en référé. Le juge a décidé d’infliger une astreinte de 5.000 euros par heure à chaque gréviste présent au piquet ! Dans ces conditions, la grève a continué mais sans piquets.”

La grève s’est-elle étendue à d’autres sièges?

“Oui, surtout au siège de Bruxelles. Le personnel du siège de Liège, directement visé par la restructuration a aussi participé aux actions. Cependant, la direction a mis comme préalable à toute discussion l’arrêt de toute action de grève. C’est ainsi que trois rencontres ont été annulées par la direction : la première parce que les travailleurs du dépôt continuaient la grève, la deuxième parce que lors d’une assemblée du personnel j’ai évoqué l’idée d’une grève, la troisième parce que j’en avais parlé dans la presse.”

Comment a évolué le conflit?

“La direction de la FNAC a demandé l’intervention d’un conciliateur social qui a proposé de soumettre le plan de relance à un référendum postal. Les secrétaires syndicaux ont accepté. Comme certains travailleurs avaient décidé entretemps de quitter volontairement l’entreprise, l’objectif de supprimer 25 équivalents temps plein était atteint sans licenciements. La direction a déclaré à la presse que si le NON l’emportait lors du réfé-rendum on fermerait des sièges en commençant par les moins rentables (en clair, par Liège).

"Sur l’ensemble des 6 sièges, 75% de votants ont accepté le "plan de relance". La direction et les cadres ont voté, ce qui est anormal car ils ne sont pas concernés par les pertes de salaire. Les travailleurs en place peuvent choisir entre la nouvelle grille de salaires, au mérite, et l’ancienne, mais celle-ci est tellement remaniée qu’elle ne vaut guère mieux que la nouvelle. Pour certaines catégories de travailleurs, cela représentera en fin de carrière un manque à gagner d’environ 500 euros par mois!”

Et pour l’avenir?

“Rien n’est garanti. La convention signée prévoit que la direction "discutera de la possibilité d’ouvrir de nouveaux sièges", sans aucun engagement. Elle prévoit aussi de ne pas procéder à des licenciements économiques… si les objectifs de rentabilité des prochaines années sont atteints.”

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