Enseignement : inégalités sociales et violence… voilà le résultat de leur politique

Alors que les politiciens traditionnels mettent ce thème en avant lors de chaque élections, le constat est sans appel pour les élèves : inégalités, échec scolaire massif et redoublement, violence (16 actes de violences par jours, dont 1 acte à caractère sexuel par jour dans nos écoles),… et sans appel pour le personnel : réduction du personnel, attaque contre les acquis sociaux, délabrement des écoles, difficulté d’exercer son métier par manque de cohérence des programmes,… Un petit état des lieux des maux qui touchent notre système éducatif.

Par Alain (Namur)

Le thème de l’enseignement est cher aux yeux de la classe des travailleurs. Les luttes menées pour l’instruction publique et pour la démocratisation de celle-ci ont l’été avec l’espoir que l’école permettrait l’ascension sociale et l’émancipation face à l’exploitation. Les politiques de coupes budgétaires menées ces dernières décennies nous montrent combien la lutte pour un enseignement de qualité accessible à tous, reste plus que jamais d’actualité.

L’inégalité structurelle de l’enseignement

Entre les buts et valeurs défendus par le décret-mission de 1997 qui cadre les objectifs généraux de l’enseignement en Communauté française et la réalité vécue par les élèves et le personnel, il n’y a pas seulement un monde de différence mais bien des galaxies…

L’enseignement en communauté Française est l’un des plus inégalitaires au monde. Au test Pisa, la Belgique trône en tête de l’inégalité. Les données de cette étude ont été analysées par Nico Hirrt de l’APED (Appel pour une école démocratique). On y découvre sans surprise que selon l’origine socio-économique de l’élève les résultats aux tests sont plus ou moins bons. Notre système d’enseignement est celui pour lequel l’écart entre les élèves riches et pauvres est le plus grand.

En Belgique, seuls 56% des élèves de 15 ans sont à l’heure. Le redoublement en Belgique est utilisé comme un outil de sélection sociale. En effet, la majorité des redoublants sont réorientés dans une autre filière. Quand on y regarde de plus près, on constate que pour les élèves du décile le plus pauvre, 65% sont en retard scolaire à 15 ans, contre 18% pour le décile le plus riche.

Lorsque l’on parle de filière d’enseignement, là encore il faut voire que celle-ci sont socialement marquées. Ainsi, les élèves du décile le plus riche sont encore à 83% dans la filière générale alors que seulement 11% du décile le plus pauvre reste dans le général ! Ce qui conduit l’Aped à parler d’un enseignement de classe.

La violence scolaire conséquence d’un système inégalitaire

La violence en milieu scolaire est un thème que les médias aiment mettre en avant. Lorsqu’un prof ou un élève se fait agresser violemment, la presse en fait ses choux gras. Ce faisant, elle déforme la réalité. Les actes de violences commis contre les biens et les personnes et qui sont pénalement répréhensibles constituent plus l’exception que la norme. Par contre, les moqueries, les injures, l’exclusion sociale sont le plus souvent le lot quotidien des élèves, surtout des plus jeunes d’entre eux, et du personnel.

D’où vient cette violence, plusieurs études ce sont penchées sur cette question et les conclusions de leurs recherches vont dans le même sens : encore une fois, l’inégalité sociale.

Selon l’établissement que l’on fréquente et le public scolaire qui compose l’école, on est plus ou moins confronté aux problèmes de la violence. Les recherches indiquent que «parmi les effets liés à la composition des écoles, l’élément qui revient le plus souvent est le niveau moyen de retard des élèves. Plus la proportion de doubleur dans un établissement est élevée, plus l’équipe éducative rapporte une fréquence élevée d’atteinte contre les biens, d’atteintes physiques, d’incivilités et d’absentéisme. Peut-être des élèves disqualifiés par le système scolaire adhèrent’ ils moins facilement aux normes de celui-ci…’’

Des effets se marquent aussi concernant la répartition des élèves par filière pour les atteintes contre les biens et les atteintes verbales contre l’équipe éducative. Les chercheurs constatent aussi que les équipes éducatives rapportent plus de problème lorsque la proportion d’élèves issus de l’immigration est plus importante. Ils mettent en avant l’hypothèse que les professeurs ne seraient pas suffisamment formés pour gérer la multi-culturalité. De plus ils pointent un possible écart entre le milieu social des enseignants et celui des élèves.

La compétition et la mise en concurrence, ça ne marche pas en économie ni en éducation.

Les chercheurs qui étudient les phénomènes de violence en milieu scolaire rapportent qu’on enregistre plus d’actes de violence lorsque les pratiques pédagogiques sont basées sur la concurrence et la compétition. Lorsque l’on met en avant des pratiques pédagogiques qui visent à la coopération et à la gestion collective, moins d’actes de violence sont rapportés.

L’école comme produit de la société de classe

Le système capitaliste est structurellement inégalitaire. Il n’est donc pas étonnant que l’école – qui est une institution du système – reflète l’inégalité que l’on constate dans le système de production. En tant que socialistes de lutte, nous ne pensons pas qu’on puisse créer une société égalitaire à partir de l’école uniquement. C’est pourquoi nous ne pensons pas que les mesures qui visent à instaurer l’égalité par décret peuvent changer la situation. Nous pensons que seule la lutte de classe menée par le personnel (enseignant et non-enseignant) et les élèves pour plus de moyens publics, liée à la lutte de l’ensemble des travailleurs et des jeunes pour une société où l’on produit en fonction des besoins sociaux, peut permettre de réellement s’attaquer aux maux qui rongent notre école.

Le décret mixité constitue un exemple à ce sujet. Ces dernières années, les différents ministres qui se sont succédés à l’éducation en communauté française ont mis en avant des décrets visant à instaurer l’égalité dans les inscriptions pour le secondaire, peut-être animés de bonnes intentions, et souvent conseillés par des pédagogues progressistes de tendances idéaliste et soutenus par les syndicats (notamment la CGSP). Selon des sondages, 80% des directeurs liés à la CEGEC disent que ces décrets n’ont pas rencontré l’objectif affiché… Alors que l’inégalité trouve ses racines dans les bases matérielles de la société, décréter l’égalité et la mixité à l’école alors qu’elle fait défaut en termes de salaire, d’accès à l’emploi, de logement, de qualité de soins… est totalement illusoire. Cela a en plus crispé des fractions de la bourgeoisies et de la petite bourgeoisie qui voyaient d’un mauvais œil que l’on touche à leur plate-bande, mais aussi une partie des couches moyenne qui ont eu peur que ces mesures ne diminue la qualité d’enseignement de leurs école d’élites. L’ASBL-ELEVES qui regroupe des parents et des enseignants opposés à ce décret s’est d’ailleurs illustrée dans la presse par la voie d’une de ces porte- parole, psycho-pédagogue, qui disait qu’on ne rend pas compte du traumatisme pour un enfant blanc qui est dans une école de noirs ou d’un enfant noir dans une école de blancs… L’esprit de la ségrégation raciale n’est alors plus très loin dans le chef de cette asbl !

La ministre est revenue à la charge en ce début d’année avec son décret Robin des bois qui consiste à prendre aux écoles dites ‘‘riches’’ des moyens pour les donner aux écoles dites ‘‘pauvres’’. En juin de l’année dernière, la mobilisation syndicale en période électorale avait forcé la ministre à mettre de côté ce plan. Nous disions alors au PSL que la victoire obtenue n’était que temporaire et fortement conjoncturelle. Sans mesure structurelle de refinancement, il était clair que ce genre de plan allait se représenter.

Pour cette année, la communauté Française affiche un déficit de 600 millions d’euros. Au début de la législature régionale, pas mal de coupes dans différents services ont été mises en applications. Ici pour Robin des bois, suite au mécontentement syndical, la ministre qui voulait que le mécanisme se chiffre à 35 millions a redescendu la note à 7 millions de transferts. Cela ne sera absolument pas assez pour répondre aux besoins des écoles en difficulté, mais ce sera en tout bien assez pour diminuer la qualité de l’encadrement dans les écoles donneuses. Ainsi, à Champion (une école de Namur), le directeur se plaignait de devoir perdre des heures de remédiation qui permettaient aux élèves de revoir la matière en petit groupe. Nul doute que seuls alors les plus fortunés d’entre eux pourront se permettre d’aller prendre des cours particuliers… Même dans cette école dite ‘‘riche’’ et réputée de la province de Namur, dans le primaire, l’école demande des frais de garderie pour le temps de midi afin de payer la personne qui s’occupe des enfants. Les parents qui font un véritable effort pour scolariser leurs enfants dans une bonne école, malgré leurs moyens limités, seront donc les premiers touchés par le décret.

Des reculs sociaux qui ne rencontrent aucune opposition résolue

Avec la communautarisation de l’enseignement, les travailleurs du secteur ont perdu une bonne partie de leur force de frappe. Les luttes qui avant se déroulaient sur le plan national et contre le même ministre ont lieu au niveau communautaire à des rythmes différents.

La coalition Olivier a mis tout son savoir faire pour faire aller la machine du progrès vers l’arrière en reculant de 3 ans la possibilité de DPPR, la ministre Simonet a osé s’attaquer à un acquis social important pour le secteur. En effet, la pénibilité du travail d’enseignant qui fait que en moyenne 1 enseignant sur 3 arrête la fonction après 5 ans leur avait permis de dételer plutôt. Sans améliorer les conditions dans lesquelles s’effectuent la profession, la ministre a repoussé l’âge qui était fixé à 55 ans jusqu’à 58. Elle a été aidée par une direction syndicale qui n’a pas un seul instant voulu s’opposer à cette mesure, préférant négocier des mois et des mois (de novembre à presque fin mars) sans jamais vouloir construire de rapport de force, avec seulement 2 heures d’arrêt de travail sur toute la période de négociation, et sans profiter de la colère générale dans tous les secteurs contre l’AIP pour demander plus de moyen public pour l’enseignement.

La direction syndicale a demandé un os à ronger, pour pouvoir dire à sa base que l’accord n’était finalement pas si mauvais… La ministre Simonet a elle-même déclaré que les négociateurs syndicaux étaient très responsables au vu du fait qu’on repoussait de 3 ans le départ en prépension et que seules 2 heures d’arrêt de travail a été organisée… Au final, les profs auront 120 euros la première année et 60 euros l’année suivante ans comme augmentation de prime de fin d’année. Au vu de l’inflation, ce ne sera qu’un pis-aller…

L’accord a cependant été très mal reçu de la base qui a rejeté l’accord en grande majorité et a appelé à des actions prévues ce 5 mai. Une direction de combat aurait profité de l’atmosphère de lutte qui montait durant le mois de mars pour ne pas effectuer des mouvements isolés, mais la stratégie de la cgsp a consisté à s’abstenir pour l’AIP et à ne pas mobiliser pour des actions, ce qui ne va sûrement pas être très payant. La ministre et le gouvernement sont résolus à faire passer l’accord. La Ministre s’est assurée avoir des voix avec elle en modifiant la composition des négociateurs (en y incluant les pouvoirs organisateurs des écoles). Le gouvernement de la communauté française se sentent donc l’autorité pour appliquer l’accord. De plus, en l’absence de rapport de force suffisant, la ministre pourra se targuer d’avoir fait des pseudos concessions aux requêtes syndicales en passant d’un accord d’une enveloppe de 10 millions à une enveloppe de 34 millions.

Dans ce dossier aussi, le fédéralisme joue en défaveur des travailleurs, la ministre prétexte du fait que le passage de 55 à 58 ans de la DPPR a été fait en Flandre sans régime de transition. Elle joue ainsi habilement sur la différence du rythme de la lutte et le développement inégal du niveau de conscience de plus, elle omet de dire qu’en Flandre, les enseignants ont été revalorisés et gagnent mieux leur vie qu’en Communauté française.

Avec les tensions actuelles dans le système économique, croire en une amélioration possible des conditions de vie des travailleurs et des jeunes sur base d’un redémarrage de l’activité économique est un doux rêve. L’Etat fédéral va sûrement transférer de nouvelles compétences aux entités fédérées sans les pourvoir de moyens, ce qui aura comme effet de régionaliser une partie de l’austérité… Dans cette situation, les prochains accords sectoriels dans l’enseignement seront de la même teneur, voire pire, que ce qui est sur la table aujourd’hui. La seule solution pour que l’école rencontre les aspirations des élèves et des travailleurs de ces secteurs, c’est que ceux-ci s’organisent et luttent pour forcer les politiciens à aller chercher l’argent.

Mais même cet objectif atteint, les contradictions qui traversent la société capitaliste et qui sont engendrés par elle ne disparaîtront qu’avec la disparition du système lui-même. Si toi aussi tu as envie de te battre pour un enseignement où l’on ne nous apprends pas seulement la soumission aux normes en vigueur mais bien d’un enseignement qui permette une véritable éducation aux connaissances scientifiques, littéraires et artistique crées par la société, rejoins nous dans le combat pour une société socialiste.

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