C’était il y a tout juste 50 ans: le 21 décembre 1960

Le 21 décembre, les journaux soulignent la puissante extension de la grève générale dans tout le pays. Les directions ouvrières, incapable de faire barrage plus longtemps, décident de reprendre la direction du mouvement en marche avant que celui-ci ne leur échappe définitivement.

Cet article, ainsi que les prochains rapports quotidiens sur la  »Grève du Siècle », sont basés sur le livre de Gustave Dache  »La grève générale insurrectionnelle et révolutionnaire de l’hiver 60-61 »

Dans la matinée, les enseignants – qui s’ étaient déjà lancés dans la grève la veille – augmentent massivement leur participation, ils manifestent dans la même effervescence. Dès midi, les grévistes des différentes entreprises se rassemblent et décident de manifester dans le centre des villes, les travailleurs FGTB et CSC sont ensemble, au coude à coude dans la rue.

Dans les petites usines, là où le travail n’ est pas encore complètement arrêté, des équipes de grévistes se répandent partout pour convaincre les autres entreprises de débrayer à leur tour. Au soir de cette seconde journée de grève, il est clair que le mouvement s’est partout étendu avec une rapidité extraordinaire, dans tous les bassins industriels de Wallonie et dans les grandes cités ouvrières flamandes. De nombreux piquets de grève motorisés sillonnent les régions du pays ; ce sont ceux-ci qui sont le moteur de la grève générale. Celle-ci est présente et s’organise partout.

Dès midi, les directions syndicales FGTB de différentes régionales décident de se mettre à la tête du mouvement. Dans certaines régionales, les comités de grève qui avaient été constitués et élus par les ouvriers eux-mêmes en assemblée générale sont dissous par les bureaucrates syndicaux. Ceux-ci préconisent que, pour que le mouvement de grève soit efficace, ce doit être au syndicat de s’occuper de tout.

C’est ainsi que la régionale FGTB de Liège décide : «l’ élargissement au maximum du mouvement de grève engagé par la classe ouvrière liégeoise, propose de donner le mot d’ ordre de grève générale à outrance ; (la régionale) rappelle aux travailleurs qu’ils doivent suivre les seuls mots d’ ordre de l’ organisation syndicale. Les seuls comités responsables sont ceux qui ont été librement choisis au sein de l’ organisation par les affiliés. La régionale FGTB de Liège, fidèle a ses principes d’ indépendance syndicale, rejette toute intrusion politique ou autre dans la conduite du conflit.»

Partout, le climat se dégrade entre les grévistes et les dirigeants du PSB et de la FGTB. A Charleroi les dirigeants socialistes qui se rendaient à une réunion au Palais du Peuple sont hués par les grévistes. Toujours ce 21 décembre, Louis Major, qui était Secrétaire Général de la FGTB déclare que «La FGTB n’ est pas pour la grève générale. Elle n’ a donné aucun mot d’ ordre en ce sens.»

En de nombreux endroits ce jour là, on signale que les travailleurs chrétiens participent activement au mouvement. C’ est le signe de l’ ampleur extraordinaire de la grève, qu’elle emporte aussi les travailleurs chrétiens, malgré l’ hostilité des dirigeants de la CSC qui publient un communiqué affirmant: «que les grèves actuelles sont inutiles et prématurées pour obtenir les satisfactions que les travailleurs attendaient. Elle invite ses membres à ne pas participer à des grèves qui, visiblement, ont un caractère politique.» Mais les travailleurs de la base ne l’entendent pas de cette oreille…

C’est ainsi que la centrale chrétienne des services publics d’ Anvers a dû se résoudre, après plusieurs refus, à finalement convoquer une assemblée générale. Lors de celle-ci, les débats entre la base et le sommet de la CSC sont tumultueux et violents. Finalement, les travailleurs flamands de la CSC finissent par l’emporter. Cette décision de rejoindre les travailleurs de la FGTB dans la lutte sera fatale au port d’ Anvers, où 100 navires seront bloqués au port. Les dockers y constituent spontanément un comité d’ action, comme dans la partie wallonne du pays. Ils parcourent également les grands centres et incitent les autres entreprises à débrayer immédiatement, contre la volonté des appareils syndicaux de la FGTB et de la CSC.

Le port de Bruxelles est lui aussi immobilisé par les débrayages spontanés. Tout comme les dockers d’ Anvers, les travailleurs bruxellois sont conscients que les ports sont des endroits stratégiques dans la lutte des classes.

Tous ensemble, les grévistes de la FGTB, de la CSC et les non syndiqués s’ organisent dans les piquets de grève devant les entreprises, mais aussi sur la voie publique où ils installent en permanence des barrages et contrôlent la circulation, vérifient les laissez-passer.

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