Nigéria : Les élections de 2011 et la quête d’un scrutin libre et juste

Ce jeudi 9 septembre 2010, la Commission pour le Développement de la Justice et pour la Paix (Justice Development and Peace Commission – JDPC) de l’Archidiocèse catholique de Lagos a organisé une manifestation à Lagos pour sensibiliser tous les Nigérians sur la nécessité de protéger le scrutin des élections de 2011 contre la fraude. C’était le dernier de toute une série de meetings organisés par différents groupes en vue des élections nationales.

Rapport par Keye Ewebiyi

La manifestation a démarré à l’église catholique Saint Léon, rue Toyin, à Ikeja, à exactement 10h45, après que des messages de solidarité aient été envoyés par Abiodun Aremu, co-secrétaire de la Coalition pour le Travail et la Société Civile, par le Révérend Frère E. A. Fadele, Directeur Exécutif de la JDPC, par Mme Ngozi Nwere et par d’autres activistes présents.

Cette procession a rassemblé environ 2500 personnes, y compris des vendeuses du marché, des commerçants, des artisans, des taxi motos, des acteurs, des enfants, etc. qui passaient par la rue Toyin, par l’avenue Mobolaji Bank Anthony, par la rue Kodesoh, par la route Obafemi Awolow et par l’avenue Allen, toutes situées dans Ikeja, capitale de l’Etat de Lagos. Dagga Tollar, membre du Comité Exécutif National du Mouvement Socialiste Démocratique (DSM, CIO- Nigéria), a pris la parole lors d’une des pauses prévues pour les discours le long du parcours.

Parmi les chants de solidarité, les danses, et la distribution de tracts, des slogans tels que «Ne vendez pas votre vote», «Un homme – une voix», «2011 : nos votes doivent compter», «2011 : nous devons défendre notre scrutin» ont été entonnés tout au long de la manifestation. Les discours adressés par différents orateurs étaient centrés sur la nécessité de s’inscrire sur les registres d’électeurs et de défendre sa voix. L’ambiance générale lors de la marche était un grand désir de changement de système, ce que les gens croient erronément possible de se produire à la suite d’un scrutin électoral libre et juste dans le cadre du système capitaliste actuel pro-riches et antipopulaire.

Les réactions de la part du public étaient en contraste véritablement pessimistes, beaucoup sont persuadés que rien de bon ne peut sortir des élections de 2011, et que la vie reprendra son cours par la suite. A un parking pour motos le long de l’avenue Bank Anthony, les taxis motos ont exprimé leur désenchantement par rapport au Gouvernement de l’Etat de Lagos dirigé par Raji Fashola après sa politique anti-pauvres. Un des conducteurs, un homme d’âge moyen, a tenu à dire ceci : «On ne votera pas pour Fashola ; il a chassé les vendeuses de leurs échoppes et du marché pour satisfaire son programme d’embellissement de la ville, et maintenant il se tourne vers nous, il veut nous jeter des routes de Lagos, alors comment on fait pour vivre ?» Poursuivant : «On va aller voter, mais on sait déjà que notre vote ne comptera pas». Une jeune dame sur le même parking disait ceci : «S’ils peuvent me payer, moi je leur vendrai mon vote ; après tout, je ne bénéficie pas non plus des fruits de la démocratie».

Le Gouvernement de Lagos, sous prétexte de bâtir une mégalopole, a continué à infliger de nombreuses souffrances et attaques néolibérales aux pauvres vivants dans cet Etat. Il a continué à mettre des propriétés privées à la disposition du profit privé et ce, aux dépens du peuple, avec son Programme Public-Privé (PPP), comme par exemple la concession de la route Lekki-Epe en cours en ce moment. Qui plus est, malgré d’immenses revenus provenant d’allocations mensuelles et de taxes multiples, la plupart des routes et des écoles publiques de l’Etat sont en mauvaise santé.

De manière ironique, le gouvernement de Raji Fashola est considéré comme étant le plus performant dans le pays à tous les niveaux. Ceci démontre à quel point l’élite nigériane se comporte comme un pays des aveugles, ou le borgne est roi. La population laborieuse du Nigéria ne mérite pas ça.

Ceci amène par conséquent la question cruciale d’un parti de la population laborieuse qui servira en tant que plate-forme alternative pour les travailleurs, pour les paysans, les artisans, les vendeurs et vendeuses, afin d’arracher le pouvoir des mains des partis pro-capitalistes et anti-pauvres qui occupent maintenant le pouvoir à tous les niveaux. Un tel parti mettra les ressources publiques à la disposition de tous. Le Labour Party formé par la NLC a été confisqué par des richards et des carriéristes politiques. Par conséquent, de la manière dont il est constitué et orienté, il ne pourra pas servir les intérêts de la population laborieuse pauvre lors des prochaines élections. Les syndicats doivent récupérer le parti ou, en alliance avec les organisations pro-masses et socialistes, doivent former un parti des travailleurs combatif. Ceci signifie qu’à environ quatre mois des élections de 2011, il se pourrait qu’il n’y ait aucun parti qui représente les aspirations des travailleurs au jour du scrutin. Il n’est cependant pas trop tard pour la direction syndicale si elle veut sauver la situation en se mettant sérieusement en lutte pour récupérer le Labour Party ou entamer le processus de la formation d’une véritable alternative politique pour les travailleurs, avec un programme socialiste. Même si le parti ne tire pas un très bon résultat des élections à cause du court délai, il pourrait offrir un programme socio-économique alternatif contre l’agenda pro-capitaliste et anti-pauvre en cours en ce moment, et une base solide aurait été posée pour l’édification d’une véritable alternative.

Il est important de constater qu’il y a eu toute une série de manifestations et meetings à la veille des élections, ce qui est un fait sans précédent. Ceci indique le désir de la population d’obtenir des élections libres et justes. Toutefois, ces manifestations n’ont malheureusement pas pu apporter quoi que ce soit de fondamental pour les masses. Ceci, parce que les élections ne seront qu’un concours entre les différentes sections des partis politiques anti-pauvres qui sont unis autour du même programme capitaliste néolibéral anti-pauvres.

Le parcours de la procession devait normalement se terminer au bureau du Gouverneur de l’Etat de Lagos, Alausa-Ikeja, mais n’a pas pu y aller à cause du jour de congé promulgué pour célébrer la fin de Ramadan. Quatre membres du DSM ont participé à la marche et y ont vendu 101 copies de notre journal Socialist Democracy.

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