Pour un syndicalisme de lutte!

Depuis plusieurs années, le mouvement syndical est sur la défensive. Aujourd’hui, il est de plus en plus nécessaire d’avoir recours aux méthodes offensives de revendications ouvrières en rupture avec les méthodes réformistes de collaboration de classe qui ont démontré leur inefficacité. Mais cela ne plaît pas à tout le monde. Au cours de son histoire, le mouvement ouvrier a progressé grâce à la lutte des classes, à la discussion et à la critique. La liberté d’expression est partie intégrante d’une stratégie syndicale combative.

Propos de Gustave Dache recueillis par Lutte Socialiste

Gustave Dache est un vétéran du mouvement ouvrier à Charleroi. Métallo durant des années, il a été délégué à Caterpillar et à Citroën. Il a aussi très activement participé à la grande grève générale de l’hiver 1960-61. Nous préparons l’édition d’un livre de Gustave sur ce sujet à l’occasion du 50e anniversaire de cette grève qui est restée dans les mémoires comme “la grève du siècle”.

Pour les élections de ce 13 juin, Gustave est 4e candidat effectif sur la liste Front des Gauches pour la Chambre dans le Hainaut.

A lire également:

– “La crise remet les luttes révolutionnaires à l’ordre du jour” (2009)

– Les leçons de la grève AGC-Splintex (2005)

Le 9 octobre 2009, 12.000 personnes avaient défilé dans les rues de Charleroi. Lors de l’assemblée interprofessionnelle qui avait précédé la manifestation, Gustave Dache, militant de longue date de la FGTB, était intervenu pour dire, entre autres: ‘‘Ce n’est pas en faisant une manifestation épisodique et puis plus rien qu’on fera reculer les attaques des patrons. Le patronat ne craint plus ce genre d’action. C’est comme lorsqu’il y a un orage: après la pluie le beau temps. D’ailleurs, de plus en plus de travailleurs dans les entreprises se posent des questions sur l’efficacité d’actions régionales ou nationales laissées sans suite, qui ne donnent aucune réponse et aucune perspective anticapitaliste s’attaquant à la crise capitaliste. Cette pratique des directions syndicales d’actions sans lendemain est complètement inefficace, elle ne résout rien. Le capitalisme continue à faire des ravages avec son cortège de misères alors qu’il réalise des profits. Il est nécessaire pour la FGTB d’établir un plan d’action et de mobilisation s’attaquant au système économique du régime capitaliste avec la nationalisation des banques et des industries les plus performantes.’’

Suite à cette intervention, une fois de plus, le président de la FGTB de la régionale de Charleroi, Antonio Di Santo, s’est encore illustré dans ses attitudes antidémocratiques en donnant comme seule réponse à cette intervention: ‘‘Je n’accepte plus la critique.’’ Après la réunion, Gustave Dache s’est fait accrocher par le permanent Métal de Charleroi, qui a surenchéri en disant devant témoins que ‘‘Pour la classe ouvrière, il y a deux grands dangers; l’extrême-droite et le gauchisme. Et toi Gustave, tu es un gauchiste.’’ A ce moment, Di Santo, visiblement encore agacé par l’intervention de Gustave Dache, est arrivé en proférant des insultes et en disant : ‘‘Va au diable Dache, tu m’emmerdes.’’

Être insulté et amalgamé à l’extrême-droite, voilà ce qui attend un ex-délégué FGTB et ancien membre coopté du Comité exécutif du métal, un militant syndical aujourd’hui pensionné qui a derrière lui plus d’un demi-siècle de syndicalisme dans les rangs de la FGTB et qui a participé aux terribles luttes de 1950 ainsi qu’à la grève générale de l’hiver 60-61. Ces permanents syndicaux sont-ils payés pour accomplir un travail de sape anti-démocratique et empêcher une liberté d’expression réelle? Il n’est pas dans nos principes et encore moins dans nos habitudes de rendre publiques des attaques et insultes semblables, mais il y a des limites, et elles ne peuvent en aucun cas être dépassées.

Lors de l’assemblée interprofessionnelle suivante, le 16 mars 2010, en présence de la secrétaire générale Anne Demelenne, Gustave Dache est à nouveau intervenu.

‘‘J’ai participé à une assemblée convoquée à la Centrale Générale qui a été rechercher 13 millions d’euros en guise de réparation d’une injustice concernant les maladies professionnelles et les accidents du travail. Ce combat n’est d’ailleurs pas terminé. Il faut savoir critiquer la FGTB, mais il faut aussi savoir reconnaître quand la FGTB obtient un résultat positif, il faut savoir le souligner. (…) Avec la FGTB, nous avons fait une action à Bruxelles pour dénoncer le système de sanctions contre les chômeurs devant différents sièges de partis politiques. Nous sommes revenus bredouilles. Il y a trop longtemps que nous entendons des discours creux de la part de responsables politiques et syndicaux. Il est grand temps que la FGTB décide un plan d’action et de mobilisation anticapitaliste dans la perspective de la nationalisation des banques et des secteurs-clés de l’industrie. C’est de la lutte contre le régime capitaliste qu’il s’agit ici.

‘‘Mais pour la mise en œuvre de ce programme de planification et de nationalisation sous contrôle ouvrier, on constate de fortes réticences de la part de certains fonctionnaires syndicaux de la FGTB. Dans ce sens, je tiens à rappeler à mes détracteurs la déclaration de principe de la FGTB (de 1945) qui définit que le syndicalisme «estime que la socialisation des grands trusts bancaires et industriels s’impose et qu’il convient également d’organiser, de diriger et de contrôler le commerce extérieur. Rejetant l’idée de la gestion étatique ou bureaucratique, il entend que la gestion des entreprises nationalisées soit confiée aux travailleurs (techniciens, ouvriers et employés). Dans leur lutte pour la démocratie économique, les travailleurs déterminent successivement et librement les réformes de structures les mieux appropriées et les plus efficaces depuis la planification et le contrôle ouvrier jusqu’à la nationalisation et la collectivisation.’’

Revenant ensuite sur les incidents de la précédente assemblée interprofessionnelle, Gustave Dache a déclaré: ‘‘On ne vient pas ici pour se faire insulter et, quand on a quelque chose à dire, ce n’est pas au café qu’il faut le dire mais ici, à la tribune, devant tout le monde. (…) Nous avons le droit et la liberté d’exprimer nos critiques même si elles ne plaisent pas à certains. Ils doivent nous répondre avec des arguments politiques et syndicaux et pas en nous disant qu’ils n’acceptent plus la critique.’’La secrétaire générale Anne Demelenne est intervenue à la fin des débats pour dire ‘‘Moi, j’ai un grand respect pour les anciens, car s’ils n’avaient pas été là avant, nous ne serions pas là aujourd’hui, ils méritent notre respect. Effectivement, la FGTB est une organisation démocratique où on a le droit de prendre la parole. D’ailleurs, avant, il y avait un slogan qui disant : avec la FGTB, j’ai mon mot à dire’’

Toutefois, ce n’était pas la première fois que de telles réactions avaient eu lieu. C’est même récurrent chez certains bureaucrates syndicaux réformistes qui ont des tendances typiquement staliniennes.

Ces fonctionnaires syndicaux qui se croient au dessus des statuts de la FGTB réagissent avec un grand mépris contre tous ceux qui pensent différemment d’eux et qui préconisent de revenir aux méthodes traditionnelles de la FGTB, c’est-à-dire l’action directe et la lutte des classes. Sans doute parce qu’ils sont à court d’arguments.

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