Le retour de BHV

Pas de solution définitive sans garantie de droits démocratiques pour tous

Difficile d’échapper aux discussions sur BHV, même si cela passe totalement au-dessus de la tête de la plupart des gens. Pareil pour le compromis que Dehaene va essayer de sortir de son chapeau. Mais ce dernier est présenté par les médias comme la dernière chance, parce que ‘‘si même Jean-Luc ne sait pas le faire…’’

par Anja Deschoemacker

Dehaene est présenté comme l’ultime “homme d’Etat”, comme c’était le cas pour Van Rompuy, aujourd’hui président de l’UE. Après quelques années de querelles communautaires interminables, de chaos et de blocages, ce type de politiciens peut sembler être un soulagement. Mais ce sont précisément ceux qui ont fait des compromis pourris sur compromis pourris, chacun posant les bases de nouvelles discriminations et de nouvelles divisions. Il n’en ira pas autrement aujourd’hui.

Ce jeudi, l’Open VLD est sorti du gouvernement et a demandé d’inscrire à l’ordre du jour la proposition de loi scindant BHV. A destination de l’édition de mai de Lutte Socialiste, Anja Deschoemacker avait rédigé un article concernant le dossier de BHV. Nous le publions aujourd’hui.

Trouver une ‘‘solution’’ est impossible dans le système actuel. La très complexe division du pouvoir entre néerlandophones et francophones n’a pas mis fin à la division, elle l’a juste institutionnalisée. Les partis bourgeois ont depuis toujours instrumentalisé cette division pour diminuer les dépenses sociales, les réformes d’Etat étant presque toujours accompagnées d’austérité.

Donc, quand la presse affirme que la proposition sur laquelle travaille Dehaene est une ‘‘grande’’ réforme d’Etat avec adaptation de la loi de financement, cela ne doit en aucun cas nous rassurer. Cette réforme d’Etat sera surtout concentrée sur le démantèlement des restes de l’Etat-providence qu’avait imposées des décennies de lutte du mouvement ouvrier. Comme le dit Herman Van Rompuy; les citoyens doivent s’attendre à ‘‘beaucoup de mesures impopulaires’’…

Nous avons déjà dit et répété qu’aucune solution ne peut reposer sur une pratique antidémocratique et discriminatoire. Nous avons d’ailleurs traité cette question en profondeur dans notre document ‘‘La question nationale en Belgique – une réponse des travailleurs est nécessaire’’ (également disponible en commande à la rédaction). Comment imaginer résoudre une discrimination en la remplaçant par une autre? Nous luttons pour le droit de chacun à travailler et bénéficier de services publics dans sa propre langue. Les législations linguistiques ne peuvent être synonymes d’exclusion. Les chômeurs francophones ne peuvent pas être individuellement pénalisés parce qu’ils ne parlent pas le néerlandais à cause du manque chronique de moyens dans l’enseignement francophone. Apprendre une langue devient maintenant presque impossible avec des classes trop peuplées, trop peu d’enseignants et trop peu de moyens.

Le responsable de cette situation, c’est le patronat et ses exigences continuelles de transferts de moyens de la collectivité vers le privé: nationalisation des coûts, privatisation des profits. C’est ce mécanisme – inévitable sous le capitalisme et plus encore en temps de crise – qui entraîne la pénurie de moyens qui sanctionne les droits démocratiques tels que celui de bénéficier de services publics ainsi que d’avoir un emploi dans sa propre langue.

La ‘‘solution’’ de Dehaene ne sera qu’un emplâtre sur une jambe de bois. Les problèmes et les frustrations vont continuer à pulluler. Les travailleurs et leurs familles ne peuvent pas compter sur Dehaene, encore moins sur les durs à cuire communautaires des deux côtés de la frontière linguistique.

La seule force capable de s’en prendre à la base du problème, le manque de moyens, c’est la classe des travailleurs. Mais pour ce faire, elle a besoin d’un parti indépendant du patronat, avec un programme qui lutte pour le droit de chacun d’avoir un bon emploi, quelles que soit sa langue ou son origine nationale.

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