Bolivie. L’insurrection populaire a chassé le président

Presque deux ans après le mouvement de lutte qui a contraint en Argentine quatre présidents successifs à démissionner, la Bolivie a suivi l’exemple pendant ce mois d’octobre. Un mouvement de grève générale de durée illimitée de la classe ouvrière à laquelle se sont ralliés les paysans pauvres et les peuples indigènes, a évincé le président détesté Gonzalo Sanchez de Losada.

par Andrés Aravena, membre de Socialismo Revolucionario (Chili)

"Le président déchu était détesté par les travailleurs et par les pauvres. C’est le patron fortuné d’une compagnie minière, éduqué aux États-Unis et parlant l’espagnol avec un accent américain. La Bolivie est le pays le plus pauvre du continent. 5,6 millions de Boliviens sur 8 millions souffrent de la pauvreté. Chaque heure, 20 Boliviens de plus viennent grossir les rangs des affamés. Alors que l’entourage du président roule en limousine, amasse fortune et séjourne fréquemment à Miami, le lieu de séjour huppé de l’élite latino-américaine. Gonzalo Sanchez a été incapable de résoudre le chômage et la question agraire. 3 millions de Boliviens n’ont pas accès à l’eau potable ni à l’électricité. La police a durement réprimé l’insurrection, tuant plus de cent personnes. La grève générale a été appelée pour le 29 septembre. Les revendications principales du mouvement portaient sur la nationalisation de l’industrie du gaz que le gouvernement voulait exporter aux USA, et la démission du président. Les autres revendications réclamaient l’arrêt des privatisations, la fin du rabotage des pensions et une réforme agraire.

Après la démission du président, le vice-président a pris la relève. La classe dominante reste donc au pouvoir. Tandis que certaines franges du mouvement, dont le MAS(*) de Evo Morales, ont provisoirement suspendu les actions pour tester le nouveau gouvernement, d’autres continuent la grève. Le nouveau gouvernement capitaliste s’est vite avéré incapable de résoudre la crise sociale. Il faut mettre en avant un programme révolutionnaire qui lui seul soit capable de donner une issue à la crise. Sinon, la lassitude s’emparera des activistes si le mouvement piétine. Ainsi, des comités de grève doivent être constitués, coordonnés sur le plan local, régional et national. Ils peuvent être l’embryon d’une Assemblée constituante révolutionnaire, composée des représentants des travailleurs, des paysans, des peuples indigènes, des soldats et des petits commerçants. Une assemblée capable de diriger le mouvement et de coordonner la lutte. Face aux illusions réformistes des directions syndicales et du MAS (par exemple, Morales a appelé à une médiation de l’ONU dans la question du gaz), nous devons avancer la nécessité d’une direction révolutionnaire du mouvement ouvrier pour se débarrasser du capitalisme. Une telle direction avancerait l’idée d’un gouvernement ouvrier et paysan qui en finirait avec la domination des capitalistes et des grands propriétaires fonciers liés à l’impérialisme. En entamant le processus de transformation socialiste du pays, il donnera une impulsion et la confiance en soi des classes opprimées latino-américaines qui soutiendront la lutte pour une Amérique latine socialiste, seule base sur laquelle le continent peut être unifié."

(*) Evo Morales est le leader des paysans cultivateurs de coca et ex-candidat à la présidence pour le Mouvement vers le Socialisme (MAS: Movimiento al Socialismo). Interrogé par le quotidien Le Monde pour savoir si le MAS soutenait la passation de pouvoir au vice-président, Morales déclare «soutenir cette solution, mais le nouveau gouvernement devra défendre le gaz de la nation, convoquer une Assemblée constituante (ce que le gouvernement va hésiter à faire, NDLR) et suspendre les programmes d’éradication de la coca.»

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