Plan Marshall 2.vert – Beaucoup de Com’… et beaucoup de libéralisme!

Les fruits de l’olivier ont une teinte bleu foncée. Le MR a beau être dans l’opposition, il n’a visiblement pas le monopole des idées néolibérales. La coalition PS-CDH-ECOLO a sorti son plan Com’, un texte qui n’est qu’une compilation de poncifs néolibéraux avec le verni progressiste de rigueur pour faire passer la pilule et donner aux journalistes de quoi ne pas trop se creuser la tête. C’est pour votre bien on vous dit!

Par Alain (Namur)

Ce fameux plan comporte six axes:

  1. le capital humain, un atout à valoriser
  2. les pôles de compétitivité et les réseaux d’entreprises, un succès à amplifier
  3. faire de la recherche scientifique, un moteur d’avenir
  4. mettre en place un cadre propice à la création d’activités et d’emplois de qualité
  5. les Alliances Emploi-Environnement, une stratégie d’avenir
  6. conjuguer emploi et bien-être social

Nous n’allons ici aborder dans le détail que ce premier qui a trait au capital humain comme atout à valoriser. Rappelons à ce titre que la campagne électorale avait laissé une place importante à l’enseignement, à l’éducation et à la lutte contre les inégalités en milieu scolaire. Les enseignants auront pu apprécier la concrétisation de ces belles paroles à la rentrée… (voir notre rubrique «enseignement»)

En guise d’amuse bouche, il est intéressant de revenir sur une production intellectuelle de l’actuelle présidente du parlement de la région wallonne, Emily Hoyos (Ecolo). Dans le texte:

«(…) Pas question bien sûr de revoir à la baisse nos ambitions pour l’école. Pour les écologistes, l’école est un levier essentiel pour changer la société en profondeur : elle est chargée d’un enjeu fondamental de transmission entre générations et de réinvention culturelle. Elle a en outre pour mission de contribuer à réduire les inégalités et de rendre ainsi notre monde plus juste. Si les différentes étapes de la scolarité obligatoire sont autant de paliers vers l’émancipation, celle-ci sera, pour Ecolo, autant sociale que personnelle, citoyenne et culturelle.» ( C’est promis Théo on leur mettra dans le nez PISA, E Hoyos, Chercheuse-associée, Etopia)

C’est baveux de progressisme et de bonnes intentions, mais voyons l’enfer que ce genre de réflexion est devenu dans le plan Marshall.

Pour l’olivier et son réseau d’intellectuels, le capitalisme est l’horizon indépassable

La base fondamentale d’une société est son système de production dont découle la culture, entre autres. C’est ainsi que bien des théories savantes n’ont pour autre but que de pérenniser le système d’exploitation d’une petite minorité sur la majorité de travailleurs. À cet effet, nombre de beaux esprits, d’intellectuels et de penseurs produisent des analyses qui ont pour fonction de justifier le fait suivant: une minorité se sert de la majorité à son unique avantage.

La plupart des sociologues du travail, des économistes et les experts de toutes sortes qui ont l’oreille des dirigeants affirment que le problème du chômage n’a rien à voir avec le système de production de biens et de marchandises que nous connaissons actuellement. Selon eux, le problème principal réside dans le fait qu’il y a une inadéquation entre l’offre d’emploi et la demande. Pour palier à cela, il suffirait donc de former les demandeurs d’emplois, ou d’adapter les formations aux besoins du marché, tout en découvrant de manière prévisionnelle les tendances évolutives de celui-ci. Le problème du chômage de masse serait ainsi résolu.

Évidemment, ces experts ne remettent pas en question la nature même du système. Les lois générales de l’économie sont donc ignorées par beaucoup. Dans la littérature économique et dans les études qui sont menées dans le domaine, on ne trouve pourtant jamais l’affirmation selon laquelle le niveau de qualification de la main d’œuvre va déterminer le niveau de chômage. C’est une fable, un conte néolibéral.

Une étude a été réalisée auprès de plus de 500 jeunes flamands diplômés en juin dernier et détenteurs d’un diplôme de master ou de bachelier. Parmi eux, la moitié seulement a pu trouver un emploi. Mais encore il y-a-t-il emploi et emploi… 27% des jeunes diplômés qui travaillent ont un emploi d’intérimaires. Autre donnée d’importance, 48% de ces nouveaux travailleurs qualifiés gagnent moins de 2.000 euros brut par mois. Difficile de débuter une vie indépendante dans de telles conditions.

En fait, les solutions que mettent en avant ces experts ne sont donc pas pragmatique mais bien idéologiques.

L’éducation comme instrument du marché

Concernant ce premier axe, le Plan Marshall 2.vert dégage plusieurs lignes-forces (de manière non exhaustive):

  1. créer des emplois et multiplier les collaborations et les synergies entre les acteurs de l’éducation et de la formation.
  2. Faire de la «formation tout au long de la vie» une réalité qui serve l’émancipation de chacun et le développement régional.
  3. Encourager les synergies entre les établissements des différents réseaux au niveau des bassins scolaire
  4. Harmoniser l’offre de formation et construire de véritables filières qui permettent de favoriser la continuité de la formation des futurs travailleurs
  5. Répondre au besoin du marché
  6. Pérenniser et développer l’emploi par L’APE marchand
  7. Créer des pôles de formation répondant aux besoins socio-économique locaux et rapprocher les différentes structures sous-régionales existantes
  8. Adapter l’offre de formation en lien avec les besoins des entreprises et des demandeurs d’emplois
  9. Améliorer l’identification et l’analyse des compétences disponibles et demandées sur le marché
  10. Renforcer l’orientation et la formation des publics vers les métiers en demande ou liés au développement durable.

Tout d’abord, il faut noter que le but visé de manière générale n’est plus de créer de l’emploi, mais bien de créer de l’emploi APE ou PTP. Ces contrats sont des cadeaux déguisés aux employeurs qui reçoivent des primes pour engager de jeunes chômeurs. Une fois la prime épuisée, le travailleur est jeté à la porte et un nouveau citron à pressé est engagé pour pouvoir à nouveau bénéficier de l’avantage. La crise a détruit des dizaines de milliers d’emplois, et qu’elle va continuer à faire des dégâts, et le taux de chômage des jeunes en Région wallonne était déjà de 27,8% en 2007. Nul doute que les jeunes sont parmi les premières victimes de la crise. Face à cette situation, la seule chose que ce gouvernement propose, ce sont des contrats «Kleenex» où la collectivité paye les patrons!

Quand à la promesse de Hoyos à «Théo», c’est du vent. S’il n’entre pas en lutte, il va galérer Théo! Ce gouvernement, avec son Plan Marshall, planifie la destruction de l’enseignement. Lors des discussions relative aux mesures d’austérité, la ministre de l’enseignement avait déjà présenté quelques mesures qui attaquaient les conditions de travail des profs (et donc les conditions d’apprentissage des étudiants). De plus, avec les réductions voulues dans le service public, le nombre de profs diminuera inexorablement si on ne met pas plus de moyen dans le secteur.

Ce gouvernement antisocial considère l’enseignement comme un instrument pour aider les patrons et les actionnaires à engranger du profit. Fini l’éducation comme outil d’émancipation, bienvenue à la formation comme outil d’adaptation aux mutations du marché «libre». On ne cherchera désormais plus à donner une formation générale, scientifique critique, technique et artistique, on développera des compétences qui peuvent être valorisées sur le marché du travail. L’employeur ne doit plus se soucier de former son personnel, l’Etat s’en charge, au détriment des apprentissages plus globaux qui permettront à l’individu de se réaliser et de s’émanciper.

A quoi bon étudier la Grèce antique, jamais dans un entretien d’embauche on ne va vous demandé qui est Sisyphe, quelle est sa relation avec Zeus et pourquoi il a mis en échec Thanatos. Dans votre travail de tous les jours il est fort peu probable que vous ayez besoin de connaitre les derniers raffinements du matérialisme et du constructivisme pour résoudre vos tâches. On vous demandera de savoir vous servir d’une interface informatique. D’être à l’heure, obéissant et sachant travailler en équipe. On vous demandera d’être flexible et de pouvoir vous adapter à de nouvelles formes de travail.

L’approche par compétence implémentée par le décret mission allait déjà dans ce sens. Dans les filières de l’enseignement technique, les programmes se faisaient déjà via les profils de formation avec le monde des entreprises (les patrons). On va renforcer à fond ces logiques. Pour le gouvernement ce n’est pas aux professeurs, aux pédagogues et au mouvement social de déterminer quels sont les savoir utiles, c’est au patronat. L’école va renforcer sa fonction de reproduction des inégalités.

Le même raisonnement est adopté pour la recherche scientifique. Les budgets alloués aux facs ont été sabrés. On va orienter la recherche vers les besoins du marché et non vers les besoins sociaux alors que de plus en plus le besoin se fait sentir d’une recherche publique et contrôlée démocratiquement. On va dans le sens de plus d’investissements privés dans ce secteur. Le but de cette politique est de créer des spin-off. Des microsociétés qui développent pour le marché les applications de la recherche. Évidemment, la viabilité de ces entreprises dans un monde économique qui tend à la concentration des capitaux pour faire face à la concurrence n’est pas envisagée.

De manière transversale, ils veulent inculquer à notre jeunesse le goût d’entreprendre. Pour cela, rapprocher le monde de l’enseignement et de l’université au monde de l’entreprise est nécessaire. L’illusion est ici dans le fait que tout le monde peut lancer sa petite entreprise aidée l’Etat qui octroie des crédits et alloue des formations en gestion ou met à disposition des coachs. Outre la faisabilité budgétaire de ce genre de politique, c’est indécent de faire croire au gens que chacun peut lancer son commerce alors que le retournement actuel détruit des centaines de PME mois après mois. Au-delà de l’illusion, la fonction attribué à «l’esprit d’entreprise» , c’est de laver le cerveau des gens avec l’idéologie des patrons: si je ne suis pas riche, beau et célèbre, je suis un perdant, ce qui est normal parce que je n’ai pas assez travaillé, mon entreprise a fait faillite car j’ai mal gérer, je n’ai pas proposer le bon produit par manque de formation sur les besoins du marché. En bref, je ne peux m’en vouloir qu’à moi-même. Ainsi donc Théo, fini la contestation, si je suis pauvre et en galère ce n’est pas de la faute du système, je ne peux en vouloir qu’à moi-même ou à limite aux autres plus en dessous de moi (étranger, parasite, assistés sociaux,…).

Voilà l’avenir qu’on te réserve Théo, un monde laissé à l’arbitrage cruel du marché, où le taux de profit passe avant tout le reste. En dernière analyse, le but ultime de ce Plan Marshall 2.vert est de prolonger la survie de ce système qui de toute part prend l’eau et a des effets néfastes sur le social, l’humain et l’environnement. Nous n’avons ici abordé qu’une des facettes de ce plan, mais le reste est du même tonneau.

Il faut que le secteur de l’enseignement (profs, étudiants mais aussi parents), l’ensemble des syndicats, les travailleurs et les allocataires se préparent à lutter massivement contre les changements structurels que tentent de réaliser les capitalistes à la faveur de la crise. Nous n’avons aucune confiance à accorder à ces partis traditionnels qui ont fait de la logique de marché leur seule base de réflexion. Il est plus que temps que le mouvement des travailleurs mette en avant son propre parti qui puisse revendiquer que l’argent de la collectivité ne soit pas utilisé pour sauver les banques sur notre dos. Nous voulons un enseignement gratuit et de qualité! Nous voulons au moins 7% du PIB dans l’enseignement!

Mais ces revendications, comme d’autres concernant la nécessité de nationaliser le secteur financier, demandent de briser la logique à court terme du capitalisme. Selon nous, la seule société qui pourrait faire à la fois face à l’éducation des générations futures, à la défense de l’emploi ou encore à celle de l’environnement est une société démocratiquement planifiée, une société socialiste. Pour paraphraser encore une fois madame Hoyos: Pour nous c’est promis Théo, on leur promet de lutter jusqu’au bout…. Un mot d’ordre: Socialisme ou barbarie!

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