Comment éviter de devoir payer la crise?

Le 9 octobre ont eu lieu en même temps une manifestation à Charleroi et une concentration de militants à Bruxelles. A ces deux initiatives syndicales, la question centrale était : comment éviter de devoir payer la crise ?

Par Geert Cool, article de l’édition de novembre de l’Alternative Socialiste

Rester vigilant ne suffit pas

A Bruxelles, à Tour&Taxis, entre les concerts et les vidéos, quelques discours ont tiré des constats corrects sur la manière dont on essaie de faire porter le poids de la crise sur les travailleurs et leurs familles. Mais au-delà des constats, rien. La concentration de 2000 militants – avec des quotas maximum par syndicat et région – a été présentée comme un avertissement lancé au patronat et au gouvernement, et s’est conclue par un appel à rester «vigilant».

En comparaison, la manifestation de Charleroi était beaucoup plus combative. Là, au moins, une action a été menée, avec plus de 12.000 participants, sans aucune mobilisation nationale. Il y avait des métallos (notamment de Caterpillar), des ensei-gnants, des postiers, des chômeurs et même des agriculteurs. Cette mobilisation impressionnante a illustré le potentiel qui existe pour des actions décidées face aux tentatives de nous faire payer la crise. <p< L’absence de réponse syndicale conséquente vis-à-vis des attaques du gouvernement et du patronat est un handicap pour le mouvement des travailleurs. Il nous faut des revendications et une plate-forme d’action claires.

Pas d’économies “alternatives”

Les licenciements se multiplient et le chômage explose tandis que les services publics et les pensions sont dans la ligne de mire. Au meeting de Bruxelles, tant Cortebeeck et Rollin (CSC) que Demelenne et De Leeuw (FGTB) ont déclaré que la note devra être présentée aux véritables responsables de la crise.

Ils n’ont cependant avancé aucune idée de la façon de le faire. Car aux grands discours ne succèdent que des propositions pour organiser «autrement» les assainissements et les rendre plus «sociaux». La plate-forme de revendication distribuée à la concentration de Tour&Taxis appelait cela : «des efforts étendus dans le temps qui ne minent pas le reprise économique». Autrement dit: des assainissements moins lourds, mais des assainissements tout de même.

Rompez les liens

Pour comprendre l’incapacité syndicale à formuler une réponse face à la crise, les liens entretenus avec les partis traditionnels sont un élément important. Deux jours seulement après la réunion de Tour&Taxis, la direction de la FGTB a assisté au congrès du PS où Anne Demelenne a déclaré : «S’il existe encore un parti dans le gouvernement qui nous écoute et qui défende nos revendications, c’est bien le PS». Et, encore deux jours plus tard, le gouvernement a rendu public ses projets d’assainissement. En acceptant la logique du ‘moindre mal’, on ne s’oppose pas à la logique de ce système et aux causes de cette crise. Tous les partis traditionnels ont accepté la logique néolibérale et l’ont appliquée. Pourquoi les dirigeants syndicaux continuent-ils à soutenir des partis comme le PS ? Ne tirent-ils aucune leçon de leur longue participation gouvernementale? Combien de Pactes des Générations faudra-t-il encore ?

Sortir de la crise n’est en définitive possible qu’en la faisant payer soit aux capitalistes, soit aux travailleurs. L’ensemble des partis traditionnels ont choisi la dernière option, avec uniquement quelques nuances sur le rythme de l’offensive. Maintenir les liens avec ce genre de partis rend impossible le développement d’un mouvement de lutte capable de faire payer la crise aux vrais responsables.

Un programme anticrise

Un programme anticrise doit partir des besoins et des inquiétudes des travailleurs et de leurs familles : maintenir l’emploi en répartissant le travail disponible (avec par exemple une diminution du temps de travail à 32 heures par semaine sans perte de salaire et avec embauche compensatoire), garantir aux jeunes la chance d’obtenir un emploi décent et stable (ce qui implique le maintien de la prépension), défendre et élargir les services publics et le statut de leur personnel, augmenter les pensions légales jusqu’à un niveau acceptable,… Pour y parvenir, il faut organiser la résistance contre l’austérité, entre autres en plaçant les secteurs clés de l’économie sous le contrôle et la gestion de la collectivité.

Autour d’un tel programme, il est possible d’avoir une large mobilisation et de susciter le débat dans la société. Un tel programme pourrait unifier la résistance contre l’austérité des travailleurs du public et du privé (enseignants, fonctionnaires, AGC, Opel,…) et viser l’organisation d’actions communes sur base d’un plan d’action intersectoriel et démocratiquement élaboré.

Un nouveau parti des travailleurs

Ce n’est que par la lutte, tant au niveau syndical que politique, que nous pourrons réaliser ces revendications. Les mobilisations autour d’un programme anticrise peuvent constituer la base pour une discussion consacrée à la représentation politique des travailleurs, à partir de l’expérience de la base syndicale. L’existence d’un parti des travailleurs conséquent mettrait fin au vide politique auquel sont aujourd’hui confrontés les syndicalistes.

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