Le personnel de la SNCB est en grève. Pas pour “harceler les voyageurs”, mais pour faire revenir la direction sur ses intentions. Celle-ci a proposé aux syndicats 8 scénarios concernant sa section de fret B-Cargo. De l’arrêt de toute activité à 7 variantes de filialisation. Les syndicats ont toute suite annoncé la grève. Si une solution tarde à venir, le travail sera stoppé chaque jeudi.
Ce que les médias vous racontent sur cette grève
"Les syndicats s’énervent pour rien, car personne ne sera licencié. On prend en otage le voyageur dans une vielle discussion idéologique, puisque la filialisation ne signifie pas privatisation. Le personnel des chemins de fer est nommé et, par conséquent, peu flexible et mobile. Les syndicats des cheminots s’attachent à leurs “privilèges” et menacent ainsi le futur de l’entreprise."
En réalité
La crise est utilisée pour imposer des “shifts coupés” de 11h, avec des prestations variées en durée dont le début et la fin varient quotidiennement. Parallèlement, on veut nous reprendre 13 journées de compensation, pour lesquelles nous avons subi des coupes salariales. On veut casser le statut du personnel, introduire des conditions de travail du 19ème et bientôt offrir aux spéculateurs une entreprise de transport de grand volume a prix bradés.
Vous connaissez sûrement la notion de “sous-traitance”, le fait de sous-traiter des “tâches” à des tiers. Le personnel de cuisine ou de nettoyage d’un hôpital par exemple, ou encore d’une école ou d’une entreprise privée. L’objectif est de réduire ‘les coûts de personnel’ et de miner la solidarité sur le lieu de travail. C’est ce que la direction de la SNCB a en tête lorsqu’elle plaide la “filialisation”, la transformation d’une branche de l’entreprise en une section autonome. C’est sa manière de se défaire à court terme de 1.200 “statutaires” et plus tard de 3.000. Les activités marchandises seraient principalement concentrées à Anvers, avec pour beaucoup de travailleurs un temps de déplacement supplémentaire pour aller au boulot.
Pour des salariés, des petits indépendants ou de petites entreprises familiales, la crise signifie l’insécurité et le recul social. Mais, pour les grands patrons, elle représente surtout une opportunité. Le trafic de B-Cargo a reculé de 38% et par conséquent, la société réaliserait une perte de 130 millions d’euros en 2009. Des cacahuètes comparées aux 25 milliards que les autorités ont donné aux banquiers/spéculateurs qui ont provoqué la crise. B-Cargo transporte quotidiennement le volume de 12.000 camions. Cela nous épargne beaucoup d’embouteillages et est en plus un moyen de transport sécurisé, écologiquement responsable. De ce transport, 60% (l’équivalent de 8.000 camions) sont du transport ”dispersé”, des trains composés de wagons d’origines diverses. En faisant abstraction des coûts entrainés par les embouteillages, cela ne peut être rentabilisé. Les entreprises privées de transport ferroviaire ne sont pas intéressées par ce transport dispersé, ce ne sont que les belles parties qui les intéressent.
Et pour le transport de voyageurs?
La filialisation de B-Cargo est un pied de biche pour casser le statut du personnel partout à la SNCB. La direction souhaite mettre différentes catégories de travailleurs en compétition, avec des types de contrats différents. Jannie Haek et Luc Lallemand, respectivement administrateurs-délégués du Holding et d’Infrabel, ont immédiatement annoncé qu’en ce qui les concerne, l’exemple de B-Cargo fera école. Bref: ils imposeront les mêmes conditions à leur personnel.
Comme beaucoup de voyageurs, les salariés de la SNCB ne peuvent compter que sur leur propre force et espérer le soutient de «l’opinion publique». Ils devront se méfier des politiciens traditionnels, qu’ils participent au gouvernement ou soient dans l’opposition: le “libéralisme” règne, même chez les “socialistes”. Saviez-vous que Haek et Lallemand se disent “socialistes”?
Le Parti Socialiste de Lutte soutient le personnel de la SNCB dans sa lutte pour défendre son statut. Nous sommes en faveur d’une société ferroviaire forte, moderne et publique sous le contrôle démocratique de la collectivité et non pas d’une poignée de “managers” qui ne regardent que les profits. La soif de profit privé nuit à notre environnement, à nos conditions de travail et à notre mobilité.
Comment ABX a été liquidé
Pour “assainir” le distributeur de colis, on a engagé des experts privés qui ont promu quelques cheminots pour les assister. Des grades spécifiques ABX ont étés créés. Le cadre a été diminué.
Après quelques années, ces mesures sont apparues insuffisantes pour survivre financièrement.
Une nouvelle diminution de cadres a suivi, accompagnée de conditions de travail menaçant le statut. Puisqu’aucun cheminot ne voulait encore travailler sous ces conditions à ABX, on a fait appel à des contractuels et à des statuts précaires. En fin de compte ABX faisait des pertes et a été vendue. Pour conclure cette vente, il a même fallu y mettre les moyens. Peu après, ABX a quand-même été viable puisque les nouveaux propriétaires l’ont revendue à un investisseur pour un multiple du prix qu’ils avaient déversé. Quelques malins avaient pris des participations à ABX et sont devenus milliardaires.
(Ecrit sur base de http://www.acod-spoor.be)