TECTEO – 2 jours de grève au finish: Le PS dit ce qu’il pense des syndicalistes…

Mardi, la journée des grévistes commence tôt. A 8 heures, une centaine de travailleurs sont massés sur la Place du Marché devant l’Hôtel de Ville dans l’espoir d’avoir une entrevue avec Willy Demayer, qui est non seulement bourgmestre de Liège, la plus grosse commune représentée dans l’actionnariat de Tecteo, mais aussi président de la fédération liégeoise du PS. L’attente a été un peu longue, le bourgmestre ne semblant pas être dans son bureau. Et pour cause, des travailleurs l’ont rencontré dans un café (non, vous avez bien lu, c’était Demeyer pas Daerden !) et obtenu la promesse d’une rencontre officielle pour l’après-midi.

Par Jean Peltier

Pour plus d’informations:

En attendant cette réunion, des groupes de travailleurs ont alors bloqué quelques temps des rues au centre de Liège, puis d’Ans où l’occupation d’une partie des installations se poursuit.

Quand le PS parle aux syndicalistes…

Au terme de cette rencontre, Willy Demeyer a promis de transmettre les motifs d’inquiétude des travailleurs et des syndicats à la direction de Tecteo. C’est gentil de sa part, mais personne n’imagine que Stéphane Moreau n’ait pas déjà une petite idée de ce que sont ces inquiétudes… On peut donc penser que leur discussion portera beaucoup plus sur les moyens de mettre fin à un conflit qui risque de ne pas améliorer l’image du PS dans la population. Et quelques indices font penser qu’ils n’ont pas envie de faire des cadeaux aux syndicats.

…et insulte les syndicalistes

La rencontre avec le bourgmestre a connu un début un peu surprenant. Après que la délégation CGSP ait exposé son point de vue, le bourgmestre a demandé au délégué principal CSC, Jean-Marie Kaddès, quelles étaient les revendications de son syndicat. Ayant confirmé que c’était bien les mêmes que celles de la CGSP, celui-ci s’est inquiété du consensus politique autour du plan d’économies de Tecteo, les représentants des quatre partis parlementaires ayant approuvé ce plan au dernier Conseil d’Administration. Demeyer lui a illico répondu qu’il ferait mieux de balayer devant sa porte, lui qui avait été tête de liste pour le PTB+! Nous voilà donc fixés: pour le principal représentant du PS liégeois – qui, au passage, s’emmêle gaiement les pinceaux en confondant le PTB et le CAP pour qui Jean-Marie Kaddès était effectivement candidat – un syndicaliste qui est aussi engagé politiquement n’est digne de représenter les travailleurs que s’il fait partie d’un parti établi qui appuie les politiques d’austérité. Les autres ont le droit de se taire… et d’en abuser. Pour ceux qui pensaient que Moreau était une «pomme pourrie» dans un PS sain, voilà de quoi réfléchir.

Mais certains font plus fort encore. Le journaliste du Soir a recueilli les confidences d’un «ponte socialiste» qui «sous couvert d’anonymat» précise le point de vue de ses collègues sur les questions de fond que pose le conflit. «Le problème Tecteo, c’est un problème de santé mentale et de quotient intellectuel dans la délégation [syndicale] et, je veux bien le concéder, d’un côté un peu caractériel en face». (1) Voilà qui a le mérite d’être clair.

Moreau et la prise d’otages

Et Moreau, demanderez-vous, que fait-il pendant ce temps? Eh bien, il se confie à la presse (2). Et le pauvre homme ne comprend pas. «On ne sait pas ce qui est souhaité. Le plan est d’application depuis le 7 septembre, les objectifs sont là et doivent être atteints». Réexpliquons-le lui encore une fois: ce qui est rejeté par tous les travailleurs, c’est justement son plan qui leur impose tous les sacrifices à seule fin d’augmenter les bénéfices de la société, c’est que ce plan a été imposé par le Conseil d’Administration contre la volonté du personnel, et c’est que la direction refuse toute négociation.

Ne pas comprendre ce qui se passe n’empêche pas Moreau de dénoncer vertueusement: «Cela tourne au règlement de comptes. Et, pour cela, on prend le personnel en otage – il ampute sa rémunération par des mouvements qui ne conduiront à rien si ce n’est à aggraver encore la situation de l’entreprise et, à la limité, à alourdir les mesures du plan – et on prend en otage la population». Un langage de patron de choc qui aurait sa carte au MR? Pas du tout, c’est un patron qui a sa carte du PS et d’ailleurs pas un des moindres (28 mandats politiques et économiques, dont celui de bourgmestre d’Ans). Et, non content de réaffirmer qu’il refuse toute discussion et qu’il ne cédera pas, ce «socialiste new look» se permet de traiter les syndicalistes de «preneurs d’otages». Par contre, on suppose que, pour lui, faire travailler les gens gratuitement deux heures par semaine, diminuer leurs revenus de 1.000 à 2.000 euros par an, multiplier les pressions et les intimidations, ce n’est pas de la prise d’otages. Non, c’est sans doute de la grandeur d’âme et de la pure bonté.

Et, pour couronner le tout, Moreau sort l’artillerie lourde: «Si les objectifs ne sont pas atteints, c’est dans les communes qu’on va licencier. Si Tecteo ne va pas bien, il n’y aura pas de dividendes, donc il y aura des plans de restructuration dans les communes et on a chiffré que, si le plan Tecteo n’est pas mis en application très rapidement, il y aura 350 emplois perdus dans les communes.» Les syndicalistes ne sont donc plus seulement des preneurs d’otages, les voilà carrément les fossoyeurs de l’emploi de leur région!

Une journée éclairante

A la fin de cette journée, il n’y a donc pas la moindre avancée vers des négociations. Mais, avec les déclarations de Moreau et du « ponte socialiste » évoqué plus haut, nous voilà quand même fixés sur ce que les « huiles » du PS pensent de nous : en résumé, les travailleurs sont des irresponsables et des preneurs d’otages, manipulés par des syndicalistes handicapés mentaux. On s’en souviendra…

  1. Le Soir, mercredi 23 septembre, p. 18
  2. Toutes les citations de Moreau sont extraites du reportage réalisé pour le JT de la télé locale RTC, mardi 22 septembre
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