La crise grandit, les attaques s’annoncent

Les partis qui ont reçu le plus grand soutien électoral au nord et au sud du pays ont mené une campagne électorale ayant un accent ‘social’. Le PS, présent au pouvoir depuis 1987, a mobilisé toutes ses forces contre le danger d’un gouvernement ouvertement de droite avec le MR à la barre. Le CD&V, architecte de la politique néolibérale dans les années ‘80 et ‘90, a ressorti les vieilles recettes en se présentant comme le seul parti politique sérieux représentant toutes les couches de la société afin de mieux viser le bien commun.

Par Peter Delsing

Mais cette campagne « sociale » ne risque pas de déboucher sur une politique « sociale ». Ce sera immanquablement une politique antisociale qui nous attend, conséquence directe de la plus terrible crise économique depuis les années ’30 et de choix politiques faits depuis trente ans… et qui ne sont nullement remis en cause aujourd’hui.

UN SOL QUI SE DEROBE DE JOUR EN JOUR

Selon l’OCDE, la contraction économique sera cette année d’au moins 4% en Belgique. Le Bureau du Plan table sur 3,8%, la Banque Nationale sur 3,5%. Mais, au début de l’année, le gouvernement Van Rompuy et ses spécialistes avaient bricolé leur budget sur base d’une baisse de seulement 1,9% (alors que Leterme en novembre misait encore sur une croissance de 1,2 !). L’assureur-crédit Euler Hermes estime que le nombre de faillites en Belgique augmentera de 27% en 2009 et passera le cap des 10.000. La Banque Nationale parle de 200.000 chômeurs en plus d’ici fin 2010, portant le chômage total à 9,2% de la population. Le Bureau du Plan pense même que d’ici fin 2011, le chômage aura explosé jusqu’à 15,5% ! Des chiffres dramatiques.

Selon Guy Quaden, le gouverneur de la Banque Nationale, les usines tournent à 70% de leur capacité de production, ce qui «n’est plus arrivé depuis des décennies». Jan van den Nieuwenhuijzen, l’administrateur-délégué du secrétariat social SD Worx, a déja prévenu que, si la production ne repart pas à la hausse après l’été, les « budgets de personnel des entreprises pour 2010 » devraient être « adaptés ». Selon une enquête de HR Managers réalisée pour SD Worx, 3 entreprises sur 4 préparent des «mesures de réduction des coûts». Ce qui veut dire que le chômage va faire un nouveau bond, bien au-delà des 250.000 chômeurs temporaires actuels.

Par ailleurs, la CSC a publié fin juin des chiffres montrant que le nombre de licenciements collectifs en Belgique depuis le 1er janvier 2009 s’élevait déjà à 14.740 (dont 2.913 dans le secteur automobile et 1.900 dans le secteur bancaire). Chez ArcelorMittal, à Liège, 1.500 employés et cadres ont été obligés de travailler à 4/5 temps. Si la situation économique perdure, des dizaines de milliers de travailleurs risquent de tomber au chômage complet.

CATASTROPHE BUDGETAIRE: DES ECONOMIES A QUEL RYTHME ?

Les économistes affirment maintenant que nous connaîtrons un rétablissement de l’économie d’ici deux ans. Mais une longue période de récession avec des périodes de redressement et de faible croissance (pas suffisante en tout cas pour faire chuter le chômage) est beaucoup plus probable. Le capitalisme mondial doit guérir d’une bulle de dettes qui a gonflé hors de toute proportion et cela va lui prendre très longtemps.

Pourtant le Premier ministre Van Rompuy a déclaré qu’il voulait «préserver l’Etat-providence». On ne voit pas très bien comment il va y arriver si, comme l’annonce La Libre, ce sont 20 milliards d’euros qui doivent être épargnés d’ici 2015. Chômage massif, diminution des revenus, remise en cause des systèmes de pension alors que le vieillissement de la population s’accentue: c’est en réalité un cocktail de catastrophes sociales qui nous attend.

Au vu des difficultés que pose en plus la question nationale, la question est de savoir si le gouvernement fédéral sera en état d’annoncer un plan d’austérité en septembre ou si l’option de laisser la dette de l’État grossir – ce qu’elle fera de toute façon – sera prise pour ne mener qu’à un plan d’économie à court terme (pour 2010-2011)… et reporter les décisions les plus douloureuses au gouvernement suivant.

Les gouvernements régionaux eux non plus n’échapperont pas aux plans d’économies. En Wallonie, l’Olivier veut lancer un nouveau plan «Marshall 2.vert», mais la marge financière est minimale. Il ya gros à parier que ce plan comportera surtout des mesures symboliques – et bien sûr des cadeaux aux patrons. La coalition «de gauche» de l’Olivier risque de montrer rapidement son vrai visage, celui d’une coalition d’austérité continuant de mener une politique néolibérale. En Flandre, la situation n’est pas meilleure. Le temps des équilibres budgétaires est passé. Kris Peeters veut épargner 1,9 milliard d’euros en 2010, soit 8 % des dépenses. Et cet effort devra continuer plusieurs années pour ne pas laisser la dette s’emballer. Si la bourgeoisie n’arrive pas à «responsabiliser financièrement les régions», les appels pour une scission (totale ou partielle) de la sécurité sociale refleuriront. Mais ce ne sera qu’une autre manière de mettre la pression sur les régions pour qu’elles mettent en œuvre une politique d’austérité dure. Les travailleurs ne doivent pas se laisser tromper: scissionner la sécurité sociale (ou des pans de celle-ci), c’est le meilleur moyen de se monter les uns contre les autres pour un gâteau qui rétrécit.

La bourgeoisie s’apprête à « rentrer dedans » sur tous les terrains au cours des prochaines années. Les travailleurs et les jeunes auront besoin de syndicats combatifs et d’un parti qui les représente et les organise pour organiser la riposte contre l’appauvrissement collectif de grande ampleur qui nous menace.


Rubrique "politique" de socialisme.be

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