Retour à la case départ: la répression continue

CANNABIS

UN ARRÊT DE la Cour d’Arbitrage a cassé la loi sur le cannabis adoptée sous le gouvernement arc-en-ciel. L’abrogation de cette loi est un retour à la case départ: la criminalisation complète pour tous les usagers du cannabis et pour ceux qui en font la culture.

Emiel Nachtegael

La loi abrogée permettait la consommation de cannabis pour les personnes majeures si cela n’était pas source de «nuisance publique» et ne relevait pas d’un «usage problématique». Avant cette loi tout était illégal, et donc punissable. Mais en pratique les poursuites judiciaires venaient en dernière priorité dans les parquets. L’abrogation de cette loi est un splendide exemple de l’hypocrisie du gouvernement précédent: donner une image progressiste qui maquillait un caractère répressif et droitier. La loi institutionnalisait la répression contre les usagers du cannabis: elle donnait carte blanche à la tolérance zéro pour les consommateurs mineurs et pour les consommateurs majeurs hors de la sphère privée. Seules les personnes majeures dans la sphère privée pouvaient consommer du cannabis. Les problèmes de drogue n’ont pourtant jamais diminué avec la répression, bien au contraire.

La répression n’apporte pas de solution. Les auteurs de telles lois restent à cent lieues des conditions réelles de vie des gens. Pour eux, l’usage de la drogue, la criminalité et la violence forment un tout. La création de clichés est encore plus forte au travers des reportages spectaculaires dans les médias. A les entendre, un jeune sur quatre serait un membre d’une bande brutale et consommateur de drogue. D’abord beaucoup d’argent sale circule dans les zones sombres de l’illégalité. Les jeunes qui «dealent» viennent souvent des couches les plus précaires de la société, qui gagne plus avec cette activité qu’avec un job intérimaire flexible et mal payé. Ensuite, la question est de connaître jusqu’à quel point l’usage problématique de drogue diminuerait par la tolérance zéro. Le cannabis est largement accessible mais l’alcool et les calmants le sont encore plus. Beaucoup de personnes ayant des problèmes sociaux fuient la réalité dans ces drogues à accoutumance. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, presque 1,5 million de personnes en Belgique – dont un million de femmes – ont pris l’année dernière des antidépresseurs ou des tranquillisants: une augmentation de 40% par rapport à 1997.

Autant dans l’enseignement que sur le lieu de travail, une pression contre-nature règne sur les conditions de travail. Les problèmes de drogues sont connus à La Poste, au travail à la chaîne,… L’usage de drogues au travail est dangereux, mais une attitude répressive des autorités ne va pas résoudre les problèmes, cela va juste rendre plus précaires les conditions de travail, en augmenter la pression,… tous ces facteurs entraînant une augmentation de l’usage des drogues. Avec une telle politique musclée, «de l’ordre et de la loi», le gouvernement prouve son incapacité à dépasser sa politique superficielle de lutte contre les symptômes.

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