Jusqu’il y a peu, la présomption d’innocence constituait une part intégrante du système judiciaire des Nouvelles-Galles du Sud (l’Etat de Sidney). Cette situation a changé avec l’introduction de la Loi de Contrôle des Organisations Criminelles, également connue sous le nom de loi anti-motards.
Par Ger Hughes, Socialist Party (CIO-Australie)
Sans aucunement soutenir des comportements violents ou antisociaux, tels que le trafic de drogue ou les fusillades, cette loi devrait préoccuper tous ceux qui désirent protéger les libertés démocratiques.
Il n’a fallu que quelques jours pour que cette législation soit proposée, rédigée, votée dans les deux chambres du Parlement et mise en application. Cette loi constitue une réponse «réflexe» à un incident qui s’est produit à l’aéroport de Sidney, où un certain nombre d’hommes, identifiés par des témoins comme étant des «bikies» (motards), ont été impliqués dans une bagarre qui a causé la mort d’une personne et des blessures à plusieurs autres.
La rapidité avec laquelle cette loi a été instaurée signifie qu’il n’y a eu aucune réflexion sur la nécessité d’une telle loi, aucune consultation de la collectivité, aucune évaluation de lois similaires dans d’autres juridictions. Ce procédé est éminemment antidémocratique.
Cette loi de Nouvelles-Galles du Sud est basée sur une législation similaire d’Australie Méridionale. En Australie Méridionale, la loi contient une clause qui en exempt les partis politiques, mais qui n’est pas reprise dans la loi de Nouvelles-Galles du Sud. Dans les faits, cette loi peut donc être appliquée à tout type d’organisation. D’autres Etats, y compris le Queensland, désirent maintenant adopter le même type de mesures, et il semblerait qu’une version fédérale de cette loi est à l’ordre du jour.
La nouvelle loi permet à la police de demander à un juge de la Cour Suprême de déclarer illégale une organisation. Ceci signifie que l’association entre les (ex-)membres de cette organisation est considérée comme une infraction. Si le juge est persuadé qu’un assez grand nombre des membres de cette organisation prévoient ou sont impliqués dans une activité criminelle sérieuse, ce groupe peut alors devenir une «organisation déclarée». Une fois cela fait, des ordres peuvent donnés afin d’empêcher tout contact entre membres, que ce soit par téléphone, email ou de visu.
Les infractions à ces ordres peuvent être punissables par l’emprisonnement jusqu’à deux ans – cinq pour les récidivistes. Les individus peuvent également se voir interdire de travailler dans certaines industries. Ces restrictions n’ont aucune limite dans le temps, et peuvent donc demeurer jusqu’à révocation.
Il y aussi eu d’importantes modifications aux règles concernant l’apport de preuves et la procédure requise afin de mettre en vigueur les ordres de restriction. En outre, les preuves utilisées dans le cadre du processus pour faire d’une organisation une «organisation déclarée» ou pour énoncer des ordres de contrôle peuvent être protégées et gardées secrètes vis-à-vis des personnes concernées ou du public.
Cette loi comporte une ressemblance frappante avec les lois anti-terrorisme qui ont été implémentées après le 11 septembre et les attentats de Bali, dans le sens que c’est à l’accusé de prouver son innocence, et que des preuves secrètes peuvent être utilisées au cours du procès. Le Gouvernement de Nouvelles-Galles du Sud utilise la menace exagérée et plus ressentie que vécue de la violence perpétrée par des groupes de motards comme une excuse pour faire régresser les droits civiques.
Alors que le Gouvernement est extrêmement impopulaire à cause de ses tentatives de privatiser l’électricité ou les services aux prisons, une partie de son objectif en exagérant la violence des motards est de détourner l’attention des véritables enjeux actuels.
Il est clair qu’il y a déjà plus qu’assez de lois en vigueur visant à réprimer les comportements criminels. Mais cette loi-ci, bien qu’étant aujourd’hui dirigée contre les motards, va être utilisée contre d’autres organisations au cours des années à venir. Les prochaines cibles seront les syndicats, les partis politiques, et les autres organisations qui s’opposent à la politique du Gouvernement. Nous ne devons pas laisser encore reculer nos libertés démocratiques, et pour cette raison, cette loi doit être combattue.
Le Comité pour une Internationale Ouvrière, CIO
Le Socialist Party est la section du CIO en Australie.
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