Belgian Pride. Franchir les frontières du système

Activistes LGBTQI+ à Moscou

Le samedi 20 mai se déroulera la Belgian Pride. Cette 22e édition prendra place dans le cadre d’un festival de 2 semaines visant à ‘‘évoquer les épreuves que traversent les réfugiés LGBTQI (Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Transgenres, Queers, Intersexués), aussi bien dans leur pays d’origine que lors de leur arrivée en Belgique’’. L’année dernière, environs 60.000 personnes avaient défilé.

Par Clément (Liège)

La criminalisation des personnes LGBTQI est une réalité

Le texte de revendication de la plateforme organisatrice de le Pride explique notamment : ‘‘Environ un tiers de l’ensemble des Etats considèrent en 2016 les rapports homosexuels consentis comme un acte criminel’’. Et aussi : ‘‘Dans beaucoup de pays, modifier la mention de son genre sur les documents officiels est impossible, ou alors cette possibilité est accompagnée de violations des droits ou de la dignité des personnes.’’(1) Les persécutions dont sont victimes les personnes LGBTQI dans certains pays ont d’ailleurs été mises en lumière début avril. Un magazine russe révélait alors l’existence en Tchétchénie de camps de concentration pour personnes à la ‘‘sexualité non traditionnelle’’. Questionné sur ces camps et les tortures qui y prennent place, le porte-parole du président tchétchène Ramzan Kadirov a simplement répondu que ‘‘les homosexuels n’existaient pas en Tchétchénie’’ et que de ce fait, l’existence de telles prisons était une invention.

Dans l’Etat Turc, le non-respect des droits des LGBTQI a été mis en lumière en 2016 suite à l’assassinat d’une militante trans et à la répression successive de plusieurs Pride sous prétexte d’ordre public ou d’atteinte aux bonnes mœurs. Les changements d’identité de genre y restent conditionnés par la psychiatrisation et la stérilisation forcée. La justice ignore presque systématiquement les crimes commis à l’encontre de personnes trans (plus de 1993 assassinats depuis 2008)(2) et les violences et abus de la part de la police sont monnaie courante (89% de femmes transgenre déclarent avoir été victimes de violence lors de gardes à vue)(3). Cela sans parler des discriminations quotidiennes à l’embauche, au logement, dans l’espace public,…

Ce n’est pas dans la culture ou dans la religion que ces politiques homophobes trouvent leurs racines, mais bien dans la nature de classe d’Etats répressifs et autoritaires. La religion n’y est qu’un instrument parmi d’autres. Incapables de s’attacher une large base sociale, ces régimes ont recours à des politiques de répression et de contrôle social de l’ensemble des minorités afin de marginaliser certains groupes, d’affaiblir les différents foyers de résistance, d’alimenter les divisions entre différentes couches de la population et d’asseoir leur autorité. Stimuler les divisions pour mieux régner, c’est aussi ce que fait Théo Francken, défendu par Charles Michel, notamment lorsqu’il a opposé les migrants chrétiens et musulmans sur facebook, demandant en substance lesquels il fallait secourir…

Les politiques migratoires aggravent le problème

L’impossibilité de vivre suivant son orientation sexuelle ou son identité de genre dans le pays d’origine est une cause importante de migration, tout comme on trouve de nombreuses personnes LGBTQI parmi migrants fuyant la guerre et la faim. Inévitablement, ceux-ci sont confrontés aux politiques migratoires répressives de l’Union Européenne ou d’autres États. Certains peuvent prétendre au statut de réfugiés sur base des discriminations qu’ils subissent, mais doivent pour cela ‘‘prouver’’ leur orientation sexuelle et les persécutions qui en découlent à un fonctionnaire inconnu(4). Pour les autres, ce sera le même traitement que pour l’ensemble des demandeurs d’asile, préjugés et violences homophobes en plus. Dans le cas des personnes laissées sans-papiers et donc sans droits, la situation est plus pénible encore : une étude menée aux USA démontre que parmi les personnes LGBTQI, celles sans papiers étaient à peu près 3,5 fois plus susceptibles d’être confrontées à des violences physiques ou sexuelles.

Gagner l’égalité pour toutes et tous exige de changer de système

Tant que les politiques d’Europe-forteresse auront cours, de nombreuses personnes LGBTQI en feront les frais. Cependant, les politiciens traditionnels s’accordent pour dire que ces politiques sont une nécessité : ‘‘on ne peut pas accueillir toute la misère du monde’’. Et d’invoquer les innombrables pénuries – dans le logement, les services publics, les soins de santé,… – que leurs politiques ont pourtant contribués à créer. Développer des actions ciblées et des dispositifs à l’égard de certains groupes de migrants serait évidemment un grand pas en avant. Cependant, malgré le potentiel pour une amélioration des conditions de migration des personnes LGBTQI, cela ne règlera pas le fond du problème. Ainsi, des lois progressistes ont permis de sérieuses améliorations en Belgique, mais les préjugés, violences et discriminations homophobes restent bien présentes.

A l’inverse des politiciens traditionnels, nous pensons que le potentiel et les moyens existent pour garantir à tous, LGBTQI ou non, immigrés ou non, un accueil et une vie digne sans discrimination. Cela nécessitera de se battre pour chaque avancée, d’aller chercher les moyens financiers où ils se trouvent, mais aussi de lutter contre le système capitaliste qui porte dans ses gênes inégalités, injustices et discriminations. Seule l’action consciente et unifiée de tous les opprimés, à la fois condition et produit d’une telle lutte, pourra mettre fin à ce vieux système et construire une société socialiste démocratique basée sur la satisfaction des besoins de tous. Cette base est la condition pour que chacun et chacune puisse vivre librement selon son orientation sexuelle, ses préférences affectives et son identité de genre en toute égalité.

(1) http://rainbowhouse.be/actualites/nos-revendications-pour-la-pride-et-le-pridefestival/
(2) http://tetu.com/2016/08/18/hande-kader-brulee-istanbul/
(3) https://www.amnesty.ch/fr/themes/autres/identite-de-genre-et-orientation-sexuelle/docs/2011/turquie-discrimination
(4) Jusqu’il y a peu, cela incluait dans certains cas des preuves iconographiques ou de subir des examens soi-disant médicaux. Voir http://www.advocate.com/politics/2015/03/10/immigration-and-lgbts-denied-safe-haven-europe

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