FILM
Plus de trente années après sa mort, que reste t-il encore de la révolte qu’avait réussi à insuffler le Che à ses contemporains? L’image du grand révolutionnaire, complètement dépolitisée, ne sert plus aujourd’hui que d’icône publicitaire, au même titre que les stars préfabriquées pour ados. Fort heureusement, Diarios de Motocicleta ne participe aucunement à ce phénomène.
Nicolas Croes
Ce qui est conté ici est la transformation du jeune Ernesto Guevara, l’évolution qui fera de lui le Che. En 1952, accompagné d’Alberto Granado, il décida de partir à la découverte de l’Amérique latine à l’aide d’une moto, baptisée ironiquement la «Poderosa» (puissante). C’est au court de ce voyage qu’il fut confronté aux réalités sociales du continent, et qu’il se dirigea vers le marxisme.
Pour réalisé ce road-movie magistral, Walter Salles a bénéficié de l’aide d’Alberto Granado, qui est toujours en vie et habite à Cuba, tout en ce basant sur les notes que le Che avait prises, et publiées. Mais si le film est avant tout l’histoire de deux amis, la mise en scène ne délaisse pas l’aspect social et politique de ce voyage initiatique, loin de là.
On ne peut que compatir aux problèmes que rencontre le duo, notamment à la fin de la «Poderosa», véritable départ du film puisque c’est à partir de ce moment que les deux médecins vont réellement entrer en contact avec la population. Pourtant, très rapidement, et ce malgré leur situation parfois très pénible, ils se rendent compte qu’ils restent des privilégiés, libres qu’ils sont de ne pas avoir à vendre leur force de travail. Et c’est l’esclavage salarié, et la misère qui en découle, qui va amener Ernesto à changer l’orientation de sa vie, pour devenir le porte-parole d’une Amérique Latine des peuples, enfin libérée de la soumission à l’impérialisme.