Les écarts salariaux perdurent, la lutte contre le sexisme reprend de la vigueur

Pendant de nombreuses années, en Europe, nous avons connu une amélioration lente, mais réelle, de la situation économique des femmes. Mais, selon l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques, qui regroupe 35 pays capitalistes développés), ce n’est plus le cas. Au classement mondial des écarts entre hommes et femmes, la Belgique arrive en 24ème position(1) ; excepté en termes d’accès à l’éducation, l’étude souligne que la Belgique a encore du chemin à faire.

Par Emily (Namur)

Une question de choix ?

Nombre de femmes constatent qu’elles ne gagnent pas autant que leurs collègues masculins. Et pour cause, l’écart salarial s’est accru et s’élève, toujours selon l’OCDE, à 9,8 % et selon Institut pour l’égalité des Femmes et des Hommes il est de 8 % en termes de salaire horaire et à 22 % sur base annuelle. Pour la droite, le constat est une aubaine : diminuons le salaire des hommes ! Voilà l’approche ahurissante de la campagne contre le sexisme de la FEL (Fédération des Étudiants Libéraux) qui considère que les collègues masculins ont ‘‘encore trop d’avantage’’.

Pour d’autres, ces salaires moindres s’expliquent à cause des choix d’études et de boulots. Mais, le problème, ce n’est pas la grande proportion de femmes travaillant dans les crèches, comme infirmière ou comme instit. Le problème, c’est le manque de valorisation de métiers pourtant cruciaux pour l’avenir de l’ensemble de la société. Ceux qui s’occupent de nos enfants, de nos proches malades, etc. ne sont-elles pas des personnes en qui on place notre confiance ? Pourquoi serait-ce un mauvais choix de carrière ? Il faut revaloriser ces secteurs et en faire des services publics forts, accessibles à tous et de qualité, tant pour le personnel que pour les usagers.

Le premier facteur explicatif des bas salaires, ce sont les temps partiels, toujours aux dires de l’OCDE. Près de la moitié des salariées sont à temps partiel contre 10 % des salariés(2). Un choix? Bien plus une obligation de s’adapter au manque d’infrastructures publiques d’accueil et d’accompagnement des enfants en bas âge, des personnes âgées ou encore des moins valides. Les horaires de travail ne correspondent par exemple pas à ceux des écoles. Et dans un couple, généralement, c’est celui qui a le plus petit salaire qui s’adapte, le plus souvent la femme…

Riposter contre les écarts salariaux, cela exige donc d’investir dans les soins de santé, les structures publiques d’accueil,… tout en luttant en faveur de la réduction collective du temps de travail sans perte de salaire, avec embauche compensatoire et réduction des cadences. Sans cela, parler d’équilibre entre vies privée et professionnelle revient à se limiter aux familles qui en ont les moyens.

Un accès aux soins de santé problématique

Pour de plus en plus de gens, il faut choisir : manger ou se soigner. C’est d’autant plus vrai pour les femmes. La Belgique se trouve à la 64ème place en matière d’accès des femmes aux soins de santé par rapport aux hommes(3) . Le Global Gap Gender Index 2016 met en lumière que ce sont les mères célibataires qui éprouvent le plus de difficultés. En effet, 80 % d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté et priorisent leurs enfants à leur santé lorsque cela s’avère nécessaire.

Ensuite, les mesures de protection de la santé maternelle des femmes restent précaires. Le congé de maternité de 15 semaines reste un des plus courts d’Europe. Les examens gynécologiques sont moins régulièrement remboursés et le nombre de jours à la maternité a été réduit d’une demi-journée. Les coupes budgétaires de 902 millions d’euros dans les soins de santé prévus par Maggie de Block ne peuvent qu’empirer cette situation déjà catastrophique. Les discriminations à l’embauche sont presque encouragées dans ses projets puisque l’employeur devrait payer 10 % des indemnités versées par la mutuelle (Inami) aux salariées enceintes écartées de leur travail.

Les luttes reprennent de la vigueur

En très peu de temps, nous avons vu l’impressionnante lutte victorieuse contre l’interdiction totale du droit à l’avortement en Pologne (voir notre édition de novembre) ou encore les mouvements de masse pour sa légalisation en Irlande. Aux États-Unis, des mouvements féministes appellent à rejoindre les mobilisations anti-Trump à l’occasion de son investiture officielle les 20 et 21 janvier prochains. En Islande, les femmes ont également fait grève le 24 octobre à 14 h 38 pour marquer la différence salariale de 14 % par rapport à leurs collègues masculins travaillant jusqu’à 17 h.

Des organisations féministes françaises ont ensuite repris l’idée qui a par ailleurs fait les gros titres de plusieurs journaux le 7 novembre. Notons que cette campagne a pris une ampleur toute particulière dans le groupe de communication du CAC40 Publicis d’Élisabeth Badinter, figure du ‘‘féminisme’’ en France. Les syndicats y dénoncent les inégalités salariales et l’important turn-over des travailleuses(4). Aucun changement réel ne viendra du monde des employeurs, c’est par des actions collectives de masses pour un changement de société que nous y parviendrons. L’idée fait visiblement son chemin et c’est tant mieux !

(1) World Economic Forum, Global Gender Gap Index 2016.
(2) Institut pour l’égalité des Femmes et des Hommes, L’écart salarial entre les femmes et les hommes en Belgique ; Rapport 2015.
(3) World Economic Forum, Global Gender Gap Index 2016.
(4) LCI, Des syndicats dénoncent les inégalités de salaires hommes-femmes dans l’entreprise de la féministe Élisabeth Badinter, 18 novembre 2016.

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