Interview de Wouter Wanzeele délégué FGTB au CAW (Centre d’aide sociale générale) à Bruxelles
Le 7 octobre dernier, le personnel au CAW (Centre d’aide sociale générale) de Bruxelles a mené une grève de solidarité avec leurs collègues d’Anvers qui sont menacés d’une commercialisation de certains projets. Cette solidarité est importante : les propositions de la ville d’Anvers ne sont pas seulement limitées sur le plan local. Elles sont un bélier pour mettre en œuvre une commercialisation complète du secteur. Nous en avons parlé avec Wouter Wanzeele, délégué FGTB au CAW Bruxelles.
Comment vois-tu la progression de la commercialisation dans le secteur ?
“Il faut d’abord dire que le secteur du bien-être est très large. Il comprend l’assistance aux sans-abris, l’assistance financière, assistance aux personnes handicapées,… En bref, l’amélioration de la qualité de vie de ceux qui tombent dans l’oubli aujourd’hui. Avec la politique d’austérité, il s’agit d’un groupe en forte augmentation.
‘‘Le plus grand problème du secteur est la commercialisation et la marchandisation. De grandes parties du secteur sont déjà en mains privées, avec des petites ou grandes ASBL. Il y a déjà des pénuries à cause des économies sur le personnel et des tâches supplémentaires. Mais avec la commercialisation, ces organisations entrent en compétition l’une contre l’autre pour l’accès aux ressources publiques limitées. Cela conduit à une logique commerciale dans laquelle on parle moins des problèmes sociaux que de questions telles que la gestion des compétences.
‘‘L’austérité et la mise au point sur les chiffres mettent plus de pression sur le personnel. Cela conduit à une augmentation de problèmes comme le burn-out. Un grand nombre de travailleurs sociaux a le sentiment de ne plus faire de travail significatif et utile.’’
Le problème ne se limite donc pas à Anvers ?
“Sûrement pas. Le fait que G4S reprend l’accueil des sans-abris est bien sûr un précédent énorme. Les soins seront limités à ‘‘lit, bain, pain’’ avec moins de soins et des conditions pires pour le personnel afin que l’entreprise puisse faire davantage de profits. Mais aussi ailleurs, il y a une commercialisation.
‘‘Il y a déjà un grand nombre d’entreprises privées actives dans le secteur. Des centres d’accueil pour demandeurs d’asile, par exemple, ont été exploités par des entreprises privés comme G4S à Gand.’’
Que pouvons-nous faire ?
“Les premières actions étaient très positives. Le réseau SWAN (qui réunit des syndicalistes, des acteurs de terrain,…) a été capable d’unifier non seulement le personnel du secteur, mais aussi des clients et des étudiants. Nous ne sommes qu’au début de la construction d’une relation de force. Avec les travailleurs sociaux à Bruxelles, nous avons montré l’exemple avec la grève de solidarité du 7 octobre. Espérons que d’autres suivront cet exemple.
‘‘Nous ne pouvons pas nous limiter à une position défensive contre la commercialisation d’un ou de quelques projets du travail social. Pourquoi ne pas dire clairement qu’il existe une alternative : des investissements massifs dans l’avenir de tout le monde, avec le développement de services publics qui travaillent, dans notre secteur, surtout de façon préventive et structurelle. De telle manière, nous pouvons réaliser l’objectif émancipatoire du travail social de devenir ‘inutile’. Une société dans laquelle personne ne tombe du bateau nécessite un autre système. Aujourd’hui, on nous dit toujours qu’il n’y a pas de moyens pour des logements sociaux, des centres de quartier, de l’infrastructure pour le sport et les loisirs,… Il y a pourtant beaucoup d’argent dans la société, mais nous ne l’obtiendront pas en le demandant gentiment. Il faut lutter pour un meilleur avenir pour tout le monde !’’