Procès de l’explosion à la cokerie d’Ougrée

Procès de l’explosion à la cokerie d’Ougrée

Le tribunal correctionnel de Liège a rendu son verdict dans le dossier de l’explosion de la cokerie à Cockerill Ougrée en octobre 2002. L’accident avait fait 3 morts et 26 blessés dont 13 graves. Sept personnes avaient été renvoyées devant le tribunal: le responsable de la division coke-fonte, 2 cadres, 2 contremaîtres et 2 ouvriers. A l’issue du verdict seul le directeur a été acquitté. Les 2 ingénieurs et les 2 cadres bénéficient de la suspension du prononcé, et… les 2 ouvriers sont condamnés trois mois de prison et à des amendes de 250 euros assorties d’un sursis de trois ans. C’est le monde à l’envers! Plus on occupe un poste important dans la hiérarchie moins on a de responsabilité!

Guy Van Sinoy

Le tribunal a aussi établi une discrimination entre le personnel de Cockerill et les travailleurs de la sous-traitance. Les travailleurs de Cockerill seront indemnisés forfaitairement selon la loi sur les accidents du travail. Pour les travailleurs des firmes de sous-traitance (notamment les trois tués) Cockerill paiera des indemnités (plus élevées) de dommages matériel et moral.

A la lecture du verdict scandaleux, la colère a éclaté dans la salle d’audience: «C’est facile de condamner les travailleurs! Combien vaut la vie d’un ouvrier!» La FGTB/Métal a immédiatement annoncé qu’elle irait en appel. A l’usine, dès l’annonce du verdict les ouvriers ont arrêté le travail pour protester contre ce jugement inique. La FGTB et la CSC ont annoncé qu’elles couvraient tous les arrêts de travail.

Il faut replacer l’accident et le jugement dans le contexte social. Arcelor a planifié la fermeture de la phase à chaud (fours à coke, hauts-fourneaux, aciérie, coulée continue) et les directions syndicales s’y sont résignées. La manifestation de 50.000 travailleurs protestant contre cette fermeture planifiée est restée sans lendemain. C’est dans ce contexte de détérioration du rapport de forces au détriment des travailleurs qu’il faut replacer l’accident et le procès.

Comme l’expliquait Silvio Marra, ancien délégué Sécurité et Hygiène aux Forges de Clabecq, dans une interview parue dans Alternative Socialiste de mars 2004 («La sécurité n’est pas une fatalité…»): «Dans une situation de restructuration le fatalisme commence à s’installer tant du point de vue politique que sur le plan de la sécurité. Il faut continuer la prévention comme si l’entreprise allait continuer. Cela dépend une fois de plus de la conscience politique des militants syndicaux. Il ne faut jamais dire “Puisqu”on va fermer, on ne sait plus rien faire…’ car alors c’est la catastrophe. C’est la situation la plus dangereuse qui puisse exister dans une usine: si on laisse tomber les bras, les accidents se multiplient.»

Le verdict du tribunal de Liège est celui d’une justice de classe qui défend les profits à tout prix: un verdict digne de l’époque de Germinal. Mais il est aussi le reflet d’une détérioration du rapport de forces au détriment des travailleurs. Une large mobilisation dans les entreprises pour envoyer des délégations massives au palais de justice aurait donné aux travailleurs plus de poids dans ce procès où les cartes étaient truquées. Le procès en appel sera l’occasion de rattraper le terrain perdu en mobilisant non seulement dans le bassin liégeois mais nationalement. Car les enjeux de ce procès concerne tous les travailleurs de ce pays.

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