En front commun, CSC et FGTB ont lancé ce mercredi 29 septembre une appel à une grève de 24h dans le bassin sidérurgique liégeois. Cette action a été menée (tardivement hélas…) en réaction à la légitime colère des travailleurs contre le verdict du tribunal correctionnel de Liège, tribunal qui a préféré, ce 20 septembre, condamner des ouvriers plutôt que de reconnaître la responsabilité du groupe ARCELOR dans l’explosion de 2002.
Nicolas Croes
Les ouvriers ont donc tenu des piquets de grève et se sont rendus à 9h au Palais de Justice de Liège, où les quelques 200 travailleurs n’ont trouvé que la porte close de l’orgueilleux bâtiment, forteresse des droits et des lois du patronat. Les directions syndicales y ont réaffirmé leur volonté de faire tout ce qui est judiciairement possible pour casser les condamnations, seconde blessure, bien plus grave, pour les ouvriers blessés. Mais pourquoi la justice changerait-elle d’avis ? Les juges se sont déjà positionnés, et ils ne sauraient de toute manière s’enfoncer plus encore dans le ridicule et l’arrogance.
Il est bien plus facile de condamner une entreprise publique – par exemple la SNCB, condamnée récemment pour l’accident de Pécrot – car l’investisseur ne risque pas d’en profiter pour partir. Et puis, reconnaître la mauvaise gestion de l’Etat est un argument supplémentaire pour bien enfoncer dans les esprits que les services publics seraient bien plus efficaces dans le privé… Question de point de vue, selon que l’on accorde la priorité au bien-être de la population ou à celui des actionnaires. De plus, politiques et juges ont cruellement besoin d’Arcelor pour la reconversion des emplois qui seront perdus lors de la fermeture de la phase à chaud. Quand on sait comment sont gérées les reconversions dans notre économie de marché et les efforts déjà effectués par Arcelor, on ne peut qu’être étonné : tant d’attentions pour si peu !
Il est pourtant très clair que les patrons du numéro 1 de la sidérurgie mondiale ont acquis cette place en sacrifiant la sécurité des travailleurs… Il n’y a eu aucun accident mortel durant les six années qui ont précédé l’arrivée d’Usinor (ancien nom d’Arcelor) en 1998 dans la sidérurgie liégeoise, mais cette situation à bien changé depuis lors. Dans la seule région liégeoise, 8 familles ont eu à pleurer la mort d’un proche entre octobre 2002 et février 2004. Il ne saurait en être autrement alors que la politique du groupe est d’engager de plus en plus d’intérimaires, deux fois plus touchés par les accidents par manque de formation. Arcelor se targue pourtant d’être un champion de la sécurité, probablement en parlant de celle de ses actionnaires ?
Ceux-ci n’ont vraiment pas à s’en faire, car, malgré la crise qui « oblige » les gouvernements à attaquer nos acquis sociaux, Arcelor s’en sort plutôt bien : 25,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2003, chiffre qui sera probablement en-dessous des résultats de 2004 (la direction a annoncé fièrement une progression par rapport au précédent semestre).
L’action de mercredi restera probablement isolée, mais elle met une nouvelle fois en lumière la nécessité de combattre ce système assassin et l’urgence de construire une alternative à la politique des patrons et gouvernements.