L’extrême-droite à 28%, Haider sort de route
Dans la nuit du 11 au 12 octobre, le politicien d’extrême-droite Jörg Haider est décédé. L’alcool et une vitesse exagérée (142 km/h pour une limitation à 70) lui ont fait perdre le contrôle de son véhicule. La mort de Haider a massivement attiré l’attention des médias. Ces dix dernières années, il a été un des politiciens européens les plus controversés. A cette occasion, sa politique asociale et ses liens avec le néonazisme sont quelque peu passés « à la trappe ». Ne rien dire des morts si ce n’est en bien ?
Haider et son FPÖ néo-fasciste ont connu une forte poussée dans les années 1990. Après les 26,9% obtenus par le parti en 1999, il est entré dans le gouvernement autrichien aux côtés du parti conservateur ÖVP, à la grande indignation du reste de l’Europe. Les cercles néolibéraux ont pointé d’un doigt moralisateur ce scandaleux gouvernement de coalition. Bien entendu, l’establishment politique n’a pas pu expliquer pourquoi le succès de l’extrême-droite en Autriche n’était pas un cas isolé. Tout comme le VB chez nous, le FPÖ a pu se développer sur un sol riche en mécontentement passif. Ces déceptions se sont manifestées dans les années ’80 et ’90, à cause d’une politique néolibérale dure et de l’absence d’alternative à gauche. C’est d’ailleurs perceptible dans toute l’Europe: tandis que les politiciens et les organisations patronales limitaient les dépenses publiques et sociales, les entreprises ont fait des milliards de bénéfices.
Lorsque le FPÖ a participé au gouvernement autrichien, rien n’a fondamentalement changé. Bien au contraire : le gouvernement a lancé une attaque d’ampleur contre les pensions, ce qui a conduit Haider à une défaite électorale. Haider et son parti ont dû endurer l’opposition du mouvement des travailleurs (avec les grandes grèves de 2003) et a perdu les élections. Une scission est survenue par la suite, Haider, ses ministres et plusieurs parlementaires ont créé le BZÖ. La majorité des militants (en dehors de la province de Carinthie) sont restés au FPÖ.
Ce résultat d’une politique antisociale, dans laquelle le FPÖ a sa responsabilité, est souvent cité en exemple pour illustrer que mouiller l’extrême-droite au pouvoir est une bonne tactique pour l’affaiblir. “Laissons-les prendre part à la “bonne chère” du pouvoir et cela sera vite fini.” Nous nous sommes quant à nous toujours opposés à cette vision car un gouvernement incluant l’extrême-droite mènera une politique particulièrement dangereuse pour le mouvement des travailleurs.
Cela est, de surcroît, une vision statique. Lors des élections de septembre, Haider a fait un « come back ». Le BZÖ comme le FPÖ ont réalisé de bons scores (respectivement 10,7% et 18%) ; ensemble, ils ont obtenu plus qu’en 1999 et le décès de Haider ne signifie pas la fin de l’extrême-droite, même si le BZÖ pourrait avoir des difficultés après la disparition de son leader incontesté. Mais il n’y a rien de fondamentalement changé à la politique néolibérale. Sans réponse de gauche, la porte reste ouverte à l’extrême-droite. La nécessité de syndicats combatifs est là, mais aussi celle d’un parti politique des travailleurs.
A côté de cette leçon très importante, il y a, bien sûr, une deuxième leçon à tirer de l’expérience de Haider : la nécessité d’une conduite adaptée et sûre sur les routes!