LE CAPITALISME MÈNE À LA CRISE

En 20 ans la valeur des biens et des services produits annuellement en Belgique a plus que doublé (de 106 à 268 milliards d’euros). Cependant les statistiques montrent que les pauvres officiellement recensés représentent 13% de population, contre 6% il y a 20 ans. Les listes d’attente pour les institutions de soins et pour les habitations sociales n’ont jamais été aussi longues. Le nombre de chômeurs, malgré les promesses de Verhofstadt, a progressé de 7% en un an. Le MAS pense que c’est le capitalisme lui-même qui crée ces contradictions.

Eric Byl

Dans toutes les sociétés précapitalistes la production était principalement organisée pour se procurer des biens utiles. L’argent n’était qu’un moyen d’échange. Le capitalisme a fait en sorte que la valeur d’usage d’un bien est devenue subordonnée à sa valeur d’échange. Les biens sont devenus des marchandises: non pas produits pour leur utilité mais pour la vente et pour en tirer plus d’argent qu’ils n’avaient coûté. L’argent est devenu le but, la marchandise un moyen.

Les marchandises contiennent une valeur d’usage. Cet usage dépend d’un individu à l’autre, en fonction des besoins. Bien que la valeur d’usage soit la base pour l’échange – un fumeur achète des cigarettes pour leur usage – cette valeur d’usage ne peut expliquer pourquoi un fumeur paiera autant qu’un non-fumeur. De même pour ceux qui achètent des parfums. A côté de la valeur d’usage existe donc une seconde valeur d’une marchandise: sa valeur d’échange.

Les valeurs d’usage peuvent aussi être trouvées dans la nature sans intervention du travail humain. L’air que nous respirons, par exemple. La valeur d’échange est par contre exclusivement produite par la force humaine de travail dans des conditions historiques spécifiques.

La formation du prix

A chaque fois la surproduction La valeur d’échange d’une marchandise est déterminée par la quantité moyenne de travail nécessaire pour la produire. Nous parlons ici de temps de travail moyen socialement nécessaire. Travailler plus lentement ou avec des outils vétustes n’ajoute pas un gramme de valeur d’échange, on parle alors de temps de travail superflu. Le degré d’instruction est aussi important. Le travail qualifié exige du temps de travail pour la formation et est donc égal à plusieurs unités de travail simple. Le prix naturel d’une marchandise est sa valeur d’échange.

La formation de monopoles et la pénurie peuvent momentanément faire grimper le prix au-dessus du prix naturel. D’autre part, une offre abondante de marchandises peut faire baisser le prix en-dessous du prix naturel. Mais cela n’explique pas pourquoi un cure-dents coûte immanquablement moins cher qu’une voiture.

Plus-value

Pendant longtemps on a pensé que le bénéfice était réalisé en vendant cher quelque chose que l’on avait acheté bon marché. Si c’était ainsi, chacun vendrait plus cher. Ce que l’on gagnerait alors en tant que vendeur d’une marchandise, on le perdrait en tant qu’acheteur d’une autre marchandise. Seul le travailleur est roulé de cette manière, car la force de travail est la seule force de production qui fournit plus que sa valeur d’échange originelle. Pour les machines, les immeubles et les matières premières le capitaliste paie à son fournisseur le prix correspondant à la valeur d’échange nécessaire pour produire ces marchandises. Il ne fait ni profit ni perte. Seul le fournisseur a fait du profit.

Le secret de l’exploitation capitaliste réside ailleurs. Le capitaliste achète la force de travail comme n’importe quelle autre marchandise: à la valeur nécessaire de (re)production de cette force de travail. Cela s’appelle le salaire. C’est la somme du salaire brut et des cotisations dites «patronales» à l’ONSS. Il n’achète pas le résultat du travail mais un nombre d’heures de capacité de travail. Il organise la production de telle sorte que le travail rembourse le plus vite possible ce qu’a coûté son salaire. Le temps restant pendant lequel le travailleur continue de produire, il offre gratuitement sa force de travail. On appelle cela la plus-value ou encore le travail non rémunéré.

Le taux d’exploitation

Le rapport entre le travail non-payé et le travail payé détermine le taux d’exploitation. Les capitalistes essaient constamment d’élever ce taux d’exploitation en allongeant la durée du travail ou en installant des machines plus performantes pour réduire le temps de travail nécessaire (qui sert à couvrir le salaire). Aujourd’hui on essaie d’augmenter le taux d’exploitation en éliminant les temps morts (comme le temps pour aller pisser) et en faisant appel au travail intérimaire quand il y a beaucoup de travail.

L’Institut National de Statistiques (INS) donne un aperçu du rapport entre les coûts salariaux (le travail payé) et la valeur ajoutée (le travail non payé) en 2000. Dans toute l’industrie les entreprises ont reçu en moyenne 100 euros de travail non payé pour 60 euros de travail payé: un taux d’exploitation de 166%. Le coût salarial moyen par travailleur s’élève annuellement à 39.594 euros, la valeur ajoutée s’élève quant à elle à 65.991 euros! Dans la chimie, le taux d’exploitation se chiffre à 217%. Dans le textile: 165% (http:/ /statbel.fgov.be/figures/d422_fr.asp).

Ces chiffres sont des moyennes. Les traitement des managers sont compris dans le coût salarial. Au Benelux, les managers doivent se «contenter» en moyenne d’1,4 million d’euros par an. Cela permet cependant d’expliquer comment Albert Frère, le seul Belge figurant sur la liste des 500 personnes les plus riches au monde, a pu amasser une fortune estimée à un milliard d’euros. Il a commencé sa carrière sans diplômes comme marchand de ferraille. Il a aujourd’hui 77 ans. Il a donc amassé à ce jour 13 millions d’euros pas an, depuis sa naissance. Et cela on ne peut pas le faire uniquement en travaillant dur.

Surproduction

Parce que les travailleurs fournissent du travail gratuit, ils ne peuvent jamais acheter tout ce qu’ils ont produit. Les capitalistes, une petite minorité qui se restreint, ne sont pas non plus capables de le faire. On peut d’ailleurs se demander dans quelle mesure les capitalistes sont prêts à acheter la camelote produite par leurs usines. Résultat: un penchant constant à la surproduction.

Aujourd’hui celle-ci a atteint un point structurel. L’application des sciences modernes et des techniques atteint les limites du marché capitaliste qui ne peut déjà pas absorber tout ce qui est produit. Nous sommes arrivés à ce que l’on appelle une dépression: une longue période de croissance économique faible, de stagnation et de récessions périodiques caractérisées par un chômage structurel élevé.

La bourgeoisie essaie de repousser devant soi la crise en incitant les travailleurs, les entreprises et les pouvoirs publics à acheter à crédit. Ce qui provoque un amoncellement de dettes qu’il faut un jour apurer, mais cela peut aussi étrangler totalement l’économie. La bourgeoisie agit donc comme le ferait un toxicomane: se donner un dernier «shoot» de crédit.

Le taux de profit

Le capitaliste n’est pas seulement intéressé par le taux d’exploitation mais aussi par le rapport entre le travail non payé et la totalité de ce qui a été investi en capital. On appelle cela le taux de profit ou la quantité de profit par unité de capital investie. Celui-ci a constamment tendance à baisser ce qui signifie qu’il faut investir de plus en plus de capitaux pour maintenir les profits. La concurrence oblige les capitaliste a installer des machines de plus en plus performantes, qui coûtent de plus en plus chers et qui doivent être amorties de plus en plus vite. C’est pour cela que les patrons instaurent le travail en équipes et le travail en continu. Leurs investissements doivent tourner 24h sur 24. La demande croissante de capitaux à investir se fait au détriment des dépenses en force de travail, seule source de plus-value.

La bourgeoisie essaie de rétablir le taux de profit en augmentant le taux d’exploitation. Cela a pour conséquence de réduire le pouvoir d’achat. Résultat: les progrès scientifiques et techniques ne se traduisent pas dans la société capitaliste par plus de bien-être, mais par le chômage et l’affaiblissement du marché. Le taux de profit est tellement bas que la spéculation en bourse rapporte souvent plus.

La crise est structurelle. Chaque solution se heurte aux limites du capitalisme. Ne nous demandons pas comment prolonger l’agonie de ce système, mais comment satisfaire les besoins des travailleurs et de leur famille.

Le MAS est pour un partage équitable du travail disponible entre toutes les mains par l’application des 32 heures. Sans perte de salaire car nous ne voulons affaiblir le pouvoir d’achat et parce qu’il y a déjà suffisamment de travail salarié non payé. Nous n’avons rien contre le fait de consacrer une partie de notre travail pour les soins, l’enseignement et les services publics mais par pour remplir les coffres-forts d’une poignée de riches. Seule une société socialiste démocratique en est capable.

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