Pour un parti syndical !

Avec et autour de la base syndicale, un nouveau parti des travailleurs est nécessaire :

Voilà déjà plus d’un an que la crise économique se précise peu à peu mais, pour la première fois, il semble probable que la Belgique entre actuellement dans une vraie récession. En bref, le pire est encore devant nous : restructurations et fermetures d’entreprises, chômage en forte croissance et sacrifices douloureux.

Par Eric Byl

De nombreuses familles de travailleurs devront faire face à cette situation, sans réserves ou en puisant dans une épargne déjà fortement entamée par l’inflation galopante de ces derniers mois. Les patrons ont déjà prévenu que la compétitivité des entreprises devrait être garantie avant toute autre chose. Dès lors, si les travailleurs ne bougent pas, eux et leurs familles seront, une fois de plus, les victimes.

La politique aujourd’hui : à sens unique.

Les propositions patronales fusent de tous côtés : continuer à détricoter le lien entre les salaires et les prix assuré par l’index, diminuer fortement les prestations des services publics et donc le nombre des fonctionnaires, et surtout réduire linéairement les charges des entreprises. Les patrons disent – comme le FMI, la Commission Européenne et la Banque Nationale – qu’il faut absolument éviter la « spirale infernale salaires-prix ». Dès lors, pour éviter que les prix augmentent – et puisqu’il est impensable pour eux de réduire leurs profits record – il faut donc bloquer ou réduire les salaires.

Chaque débat politique est une attaque à sens unique contre les acquis des travailleurs et leurs familles. Lorsque nous descendons à plusieurs dizaines de milliers dans la rue, comme lors de la semaine d’actions en juin, aucun politicien ne se montre. Mais lorsque quelques centaines de demi-portions viennent brandir le drapeau au Lion flamand, le pays s’en trouve retourné pendant une année entière. Les sondages montrent pourtant qu’en Flandre, seule une petite minorité de la population adhère à la surenchère nationaliste. Comment cela se fait-il ? Une petit minorité est politiquement sur-sur-sur-représentée.

Les politiciens, déjà bien payés durant leur carrière, obtiennent encore un salaire supplémentaire à la fin de celle-ci, grâce à des postes bien rémunérés dans les organes de direction des entreprises du pays. Les libéraux, les démocrates-chrétiens, les nationalistes flamands et, hélas aussi, les « socialistes », représentent tous des secteurs – parfois différents, d’autres fois identiques – de l’establishment du pays. Si un parti ne satisfait plus, alors, à partir de rien, on en recrée un dont l’image est sans cesse imposée dans les médias et qui, grâce à une campagne publicitaire qui coûte des millions d’euros, franchit rapidement le seuil électoral. Les patrons utilisent leur pognon et leur influence pour s’attacher des représentants politiques loyaux.

Les travailleurs devraient utiliser leurs syndicats afin de veiller à avoir leurs propres représentants politiques. Ceux-ci sont, hélas, aujourd’hui toujours rivés à la social-démocratie pour les Rouges, et à la démocratie-chrétienne pour les Verts. La dernière fois qu’ils ont pu réaliser une revendication défendue par les syndicats remonte à un demi-siècle avec la création du statut des VIPO. Depuis lors, ils hurlent avec les loups néolibéraux. Quand la base syndicale FGTB et ses représentants se permettent de rappeler le PS à l’ordre, on leur reproche de « faire le jeu de la droite ». Les supposés représentants de la CSC dans le PSC puis le CDH sont noyés parmi les notables et les représentants des classes moyennes et du patronat.

Le manque de représentants sérieux des travailleurs explique pourquoi les gouvernements respectifs ont pu traverser les grèves de 1993 contre le Plan Global et de 2005 contre le Pacte des Générations et, ensuite, faire passer leurs plans de façon quasi-unanime au parlement.

La Centrale Générale FGTB : « Il faut en finir complètement avec la politique libérale »

En automne, les travailleurs devront à nouveau descendre massivement dans la rue. Le 28 juillet, la Centrale Générale de la FGTB a déjà lancé un appel dans ce sens. Le MAS soutient cet appel. On peut lire dans celui-ci : « S’il existe encore une gauche politique dans ce pays, elle doit réunir toute son énergie et sa créativité afin d’élaborer une autre politique fiscale et salariale. Il faut en finir complètement avec la politique libérale ».

Nous supposons que c’est une manière de parler et que la Centrale Générale sait pertinemment que la « gauche politique » qui devrait réaliser cela n’existe, hélas, pas de nos jours au parlement. Et, malgré tout le respect pour les deux plus grands partis non-parlementaires, le PTB et le MAS – et bien qu’un cartel de ces deux partis lors des élections européennes serait un signal épatant – aucun des deux, ni même les deux ensemble, ne dispose des moyens nécessaires pour former cette « gauche politique » à partir de rien.

C’est en partant de la même inquiétude que celle de la Centrale Générale que le MAS appelle déjà depuis quelques années à la création d’un nouveau parti large des travailleurs qui réunirait tous les courants prêts à lutter contre la politique néolibérale. A la suite de la lutte contre le Pacte des Générations, le CAP semblait être un bon début dans cette voie. Hélas, ses responsables, les anciens députés SP.a Sleeckx et Van Outrive et l’ancien secrétaire général de la FGTB Debunne, ont laissé passer les chances aux moments décisifs.

Le MAS continue de penser que la FGTB doit rompre avec le PS et le SP.a et la CSC avec le CDH et le CD&V. Nous sommes partisans d’un nouveau parti large des travailleurs, construit avec et autour de la base syndicale. Un parti syndical donc, pas dans le sens d’un parti qui traduise politiquement les intérêts de l’appareil syndical, mais bien d’un parti qui donne la parole à ceux qui vivent à la base.

Un tel parti devrait prendre appui sur la riche expérience de la base syndicale, tant en ce qui concerne son programme que ses principes d’action. Il pourrait sélectionner ses représentants parlementaires suivant les mêmes principes que la FGTB et la CSC quand elles présentent 115.000 candidats lors des élections sociales : des candidats qui représentent leurs collègues à leurs propres risques et sans percevoir le moindre cent ! En gardant pour eux le salaire moyen d’un travailleur, ces représentants élus pourraient consacrer fort utilement le reste de leur salaire de parlementaire à soutenir les travailleurs dans leurs luttes et pour construire le mouvement.

La présence d’un parti syndical avec de tels principes ferait disparaître les châteaux gonflables que sont la Liste Dedecker et même le Vlaams Belang. Sur le lieu de travail, chaque délégation syndicale est confrontée à des opinions de toutes sortes. Pour être forte face au management et au patron, elle a pourtant besoin d’unité. La seule façon d’atteindre cette unité n’est pas d’imposer le silence sur le lieu de travail mais bien de mener un débat démocratique et, aux moments cruciaux, de prendre les décisions à l’aide de votes démocratiques, ce qui n’empêche pas de rediscuter l’affaire par après, si les conditions se mettent à changer. Pour un parti des travailleurs qui utiliserait ces méthodes démocratiques, la diversité ne constituerait pas une menace mais bien une force.

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