Manque critique de personnel aux centres d’urgences

noodEn juin, un homme est décédé parce qu’il n’est pas parvenu à joindre le centre d’urgence au numéro 112. Un temps d’attente de quatre minutes peut couter des vies. En cas de tempête ou d’orage, les centres sont presque toujours débordés. Mais le manque de personnel se ressent aussi dans des conditions ‘‘normales’’. Nous en avons discuté avec Ann, déléguée ACOD (la CGSP en Flandre) au centre d’urgence de Louvain.

Peux-tu expliquer brièvement le fonctionnement des centres d’urgence ?

“Il y a environ dix ans, il a été décidé que les appels d’urgences seraient pris en charge par du personnel civil. Avant, c’était la police. Le projet consistait aussi à utiliser le numéro 112 pour les appels d’urgences dans toute l’Europe. Cela demande évidemment du personnel pluridisciplinaire qui puisse envoyer l’aide adéquate.

“L’argent a manqué, de même qu’une vision de la situation à atteindre, pour créer un service unique performant en Belgique. Les ministres se sont succédé avec chaque fois des propositions différentes. Entretemps, il existe toujours deux numéros d’urgence opérationnels: 100 (ambulances et pompiers) et 101 (police). À Louvain, nous nous trouvons tous dans la même pièce, mais ce n’est pas toujours le cas ailleurs. Quand on téléphone au 112, on arrive d’abord au 100 parce que des éventuelles interventions médicales ont la priorité.”

Quels sont les problèmes principaux sur le lieu de travail ?

“Le manque de collègues. Dans mon service, le cadre n’est pas complet : nous sommes 21, au lieu des 28 prévus. Cela mène à une pression plus élevée et régulièrement à un manque de personnes, ce qui devient encore plus problématique lors d’orages, par exemple. La pression au travail augmente l’absentéisme et les gens partent dès qu’ils trouvent un autre boulot.

“Récemment, des collègues du 100 m’ont raconté qu’une nuit d’un dimanche, une seule personne était présente pour assurer le service. C’est irresponsable ! Finalement, après de nombreux coups de téléphone, ils ont trouvé une deuxième personne. C’est déjà arrivé qu’un collègue de Flandre Occidentale vienne faire un remplacement, car il n’y a personne d’autre. S’il y a quelques collègues en vacances lorsque d’autres sont malades à cause de la pression au travail, et que d’autres ont déjà dû faire trop de remplacements, c’est très difficile de trouver encore quelqu’un pour assurer le service. Imaginez-vous que deux personnes au service 100 doivent s’occuper d’un incident sérieux comme un attentat…

“Un appel qui n’est pas vite pris en charge à cause d’un manque de call takers peut être critique. On l’a vu dans les médias en juin : un homme a essayé de téléphoner en vain au numéro d’urgence, n’est pas parvenu à les joindre et est décédé. Des cas pareils ne sont pas toujours visibles dans les médias, on ne vérifie pas toujours les appels passés sur le GSM d’une personne décédée. Avec le manque de personnel, il y aura d’autres victimes.”

Cet été, les médias ont parlé du manque de personnel. Comment a réagi le ministre ?

“Le Ministre Jambon et son cabinet ne nient pas le problème. C’est déjà quelque chose. Ils disent à chaque fois que la problématique est connue et que les recrutements sont en cours. Mais nous n’avons pas vraiment d’information là-dessus.

“Auparavant, il y avait au moins une fois par an une concertation régionale pour le personnel du 100 et pour celui du 101. Depuis le gouvernement actuel, ce n’est plus le cas dans les centrales d’urgence néerlandophones. En fait, il n’y a aucune concertation. La raison, c’est que l’administration n’a plus de personnel pour présider ces comités de concertation et c’est difficile de remplacer du personnel de ce genre. Il n’y a qu’une concertation nationale sporadique. La dernière date du 22 mars, le jour des attentats. C’est évident qu’elle n’a pas eu beaucoup de résultats.

“Nous attendons toujours un renforcement urgent. On est à cran. Cela mène au mécontentement, mais cela se limite souvent à une seule centrale ou même une seule équipe à la fois. La pression au travail et le manque de personnel minent la solidarité et rendent difficile le développement d’une vue plus large sur la politique globale de ce gouvernement. Pourtant, le manque de personnel récurant et le refus d’y remédier montrent clairement que ce gouvernement ne se soucie pas des travailleurs des centrales d’urgence ou de la population, qui devrait pouvoir compter sur le bon fonctionnement de ce service vital où chaque seconde peut faire la différence.”

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