France. La colère contre le système exige une alternative politique

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Plus d’un million de personnes rien que dans la capitale, 1,3 million dans tout le pays ! Le 14 juin, des heures durant, les manifestants se sont déversés dans les rues de Paris. Les travailleurs de tous les secteurs s’étaient une fois de plus mobilisés contre la Loi El Khomri et la destruction de la législation du travail qu’elle veut imposer. Mi-juin, des sondages montraient que 64% des Français veulent le retrait du projet de loi, et 60% soutiennent le mouvement social.

Par Stéphane Delcros. Article tiré de l’édition d’été de Lutte Socialiste

Une puissante lame de fond sociale

Après plus de 3 mois de résistance, ils étaient nombreux à penser que la contestation de la Loi Travail allait s’estomper début juin. Mais la contestation a repris fin mai et en juin, de nouveaux secteurs rejoignant même la valse des grèves. Des corps de métiers aussi divers que pilotes d’avion, taximen et dockers ont été rejoints par les travailleurs des 19 centrales nucléaires et des 8 raffineries de pétrole présentes en France, avec 24 h de grève pour certaines et même plusieurs jours pour d’autres. Certains travailleurs se mobilisaient par ailleurs également contre d’autres offensives antisociales sectorielles : cheminots, travailleurs du secteur automobile, intermittents du spectacle,…

La jeunesse aussi a joué un grand rôle, par la mobilisation lors des différentes journées d’action, mais aussi notamment avec le mouvement Nuit Debout, qui a montré que le débat politique n’est pas la propriété des politiciens, mais est, au contraire, dans la rue, dans la lutte.

Perspectives pour la lutte

L’impact de la manifestation du 14 juin et de ce mouvement en général aura des répercussions pendant longtemps. Le gouvernement a tremblé, sur base des grèves et des manifestations massives. Sans ce mouvement, on peut être certain que le gouvernement irait encore plus loin dans la destruction de nos acquis sociaux.

Très vite, le mouvement contre la Loi Travail s’est mué en contestation du système capitaliste et sa course aux profits. De très nombreuses personnes ont pris conscience de la force du collectif pour refuser la régression sociale; c’est l’action de masse et collective qui peut faire reculer la politique des gouvernements et changer la société

Mais malgré ses forces, le puissant mouvement n’a malheureusement pas bénéficié d’un appel clair à une grève générale massive et correctement préparée. La dynamique de grèves était forte, mais souvent peu coordonnée. Les exemples sont nombreux, en France comme ailleurs. Pour aller vers une victoire, la résistance a besoin d’un blocage total du pays par une grève générale consciemment coordonnée, construite par un grand nombre d’assemblées générales du personnel et avec un objectif déterminé. Une manifestation de masse est toujours utile pour se rendre compte l’ampleur de la résistance et pour discuter des expériences et des mots d’ordre, mais elle ne peut pas se substituer à la force et à la puissance d’une grève générale.

Aucune confiance ne peut être accordée à ceux qui appliquent la politique au service de l’élite économique. Mais la grande majorité de la population n’a malheureusement encore aucun outil politique conséquent pour défendre ses intérêts. Cela ouvre pour le moment encore la voie à la droite réactionnaire et raciste du Front National de Marine Le Pen, qui profite de la colère contre les élites. Une réelle alternative politique de gauche est plus que jamais nécessaire pour lui barrer la route.

Potentiel pour la gauche et candidature de Mélenchon

Porté par une partie du mouvement social la candidature de Mélenchon pour les présidentielles de 2017 a pris de l’ampleur ces dernières semaines. Cela exprime le potentiel immense qui existe pour une alternative politique de gauche. Certains sondages de juin montraient que Mélenchon dépasserait Hollande ou Valls aux élections présidentielles. Début juin, un meeting de masse a réuni près de 10.000 personnes à Paris pour le soutenir. Et la pression est grande à la base du PCF pour rallier le parti à cette candidature, et ainsi tenter de relancer l’énorme dynamique qui avait existé autour du Front de Gauche vers les élections en 2012.

Mais des faiblesses existent, et notamment le fait que Mélenchon n’appelle pas à la grève générale, ce qui pourrait pourtant avoir un énorme impact sur la réussite d’une telle action. Son programme politique reste par ailleurs assez flou, certainement en termes d’objectifs. Or, inutile de tergiverser : la lutte contre l’austérité doit être une lutte de rupture avec le système capitaliste. Proposer quelques améliorations au capitalisme ne suffit pas ; nous avons besoin d’une réelle alternative à ce système économique.

L’unité dans la diversité, base pour l’efficacité

Mélenchon avance la nécessité de s’unir au sein d’un mouvement où le respect de la diversité des structures est un principe, ce qui garantit à chaque composante une autonomie de structure et de programme. De la diversité d’opinions, une position commune se forge ainsi par le débat démocratique. Il s’agit d’une condition importante pour rassembler et permettre à tous, individus organisés ou non, de construire un vrai outil de masse et de lutte contre le capitalisme le plus efficace possible, et d’y discuter démocratiquement et collectivement d’un programme de gauche conséquent. Un instrument large au service des travailleurs et des jeunes pour s’organiser et défendre ensemble nos intérêts et permettant d’avancer dans la lutte pour une société socialiste, débarrassée de l’exploitation et de la misère.


INSPIRONS-NOUS DES LUTTES…

> contre le ‘Plan Juppé’ en 1995

En novembre et décembre 1995, des mouvements de grève d’une ampleur sans précédent depuis Mai 68 ont été organisés contre le ‘Plan Juppé’ qui attaquait les retraites et la sécurité sociale. La grève, qui avait été préparée des semaines durant par des actions et assemblées générales a réussi à battre le plan du Premier ministre Juppé et du Président Chirac, qui ont notamment dû retirer leur offensive contre les retraites. Il aura fallu ensuite 15 ans pour que les différents gouvernements successifs aboutissent enfin à la volonté de Juppé, et encore, pas totalement.

> contre le CPE en 2006

Début 2006, le gouvernement Villepin lançait une attaque contre la jeunesse avec le projet de ‘Contrat première embauche’ (CPE), un plan de destruction des conditions de travail et de flexibilisation forcée. Un impressionnant mouvement de masse des lycéens et étudiants c’est immédiatement déclenché. Ils seront peu après rejoints par le mouvement syndical. Des grèves et manifestations partout en France rassemblant plusieurs millions de personnes sont arrivées à faire plier le Premier ministre Villepin et du Président Chirac. Alors que le projet de loi instituant le CPE avait été adopté au Parlement le 31 mars, Villepin a été contraint d’annoncer son retrait le 10 avril, après 2 mois de mouvement.

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