[INTERVIEW] Menace sur l’emploi chez Magotteaux (Vaux-sous-Chèvremont)

magotteauxCe dimanche 26 juin, dès 9h, quelque 350 personnes se sont réunies dans l’entité de Vaux-sous-Chèvremont devant les usines Magotteaux, dont une des unités de production a vu son activité interrompue. Familles de travailleurs avec enfants, anciens et habitants des environs ont ensuite sillonnés l’entité dans une marche pour l’emploi. Malgré l’atmosphère conviviale, l’émotion et surtout la colère étaient palpables.

Rapport par Clément (Liège), photos de Simon (Liège)

Un travailleur explique «Aujourd’hui, Magotteaux est un grand groupe, et il y a presque cent ans c’est d’ici que tout est parti. On subit une concurrence interne énorme ; ils disent que nous ne sommes pas rentables, mais ils font tourner l’usine bien en dessous de ses capacités de production. Avant, l’ancienne direction du site s’était battue pour qu’on ait de plus gros volume de production, mais la nouvelle laisse tout aller à vau-l’eau. Ils sont entrain de condamner le site.» Un autre : «Quand j’ai appris qu’on était repris par une multinationale chilienne, je me suis dit ça y est, «ils vont nous refaire le coup d’Arcelor», et avec la mise sous cocon du fourneau, c’est encore plus clair. Mais on ne va pas se laisser faire, on va se battre.» La marche s’est conclue par un bref blocage d’un rond-point de la petite ville, avant un rassemblement et des prises de paroles devant l’entrée du site, tout proche.

Dans le cadre de la grève nationale appelée par la FGTB ce 24 juin, nous avons eu l’occasion de discuter de la situation avec Eric Detaille, délégué principal FGTB.

Peux-tu nous expliquer quelle est la situation aujourd’hui ? Pourquoi cette attaque a-t-elle eu lieu et ce qu’elle signifie pour le site de Magotteaux à Vaux-sous-Chevremont ?

La direction du groupe nous a récemment annoncé la mise sous cocon du fourneau de l’unité n°1 (sur trois unités, ndlr), celle qui produit les boulets de broyage. 80 travailleurs ont été mis en chômage technique, mais cela impacte aussi une vingtaine de travailleurs externes à l’entreprise. La mise sous cocon est annoncée jusque fin octobre, mais dans les faits, il y a peu d’espoir que la production soit un jour relancée : les frais s’élèveraient à environ un million d’euros.

Cette mise sous cocon découle d’une baisse du volume de la demande de boulets de 40% pour le site de Magotteaux-Liège : ceux-ci sont aujourd’hui produits sur d’autres sites du groupe, à l’étranger. Ce n’est pas la première fois que ce genre de chose arrive : on développe régulièrement de nouveaux produits, et une fois le procédé de production est au point et est plus rentable, la direction externalise la production.

Ce qui est inquiétant avec l’arrêt de l’unité 1, c’est que les frais fixes du site resteront les mêmes, mais devront être supportés par deux unités de production au lieu de trois. Cela provoque des inquiétudes pour l’avenir de l’ensemble du site.

Quelle a été votre réaction face à cette attaque ?

On s’est dit qu’on devait avant tout informer les travailleurs. On a fait des assemblées du personnel et des arrêts de travail, mais on laisse travailler les ouvriers des deux autres unités, qui ont encore des commandes en cours. La semaine passée, les travailleurs au chômage économique ont fait trois jours de grève. Ils ont tenu des piquets pour sensibiliser les collègues et discuter des actions à entreprendre. Dimanche 26 juin, nous organiserons un rassemblement et une petite marche pour l’emploi à Vaux-sous-Chevremont (voir photos ci-dessous). On y fera également l’historique du site, qui a bientôt 100 ans, pour sensibiliser la population. On a distribué plusieurs centaines de tracts dans la localité et dans la région et on a lancé un appel sur facebook. Nous avons également rendez-vous avec Marcourt (PS), mais on doute que ça nous apporte quelque chose de concret. On essaie aussi de sensibiliser Bacquelaine (MR, minstre des pensions et bourgmestre de Chaudfontaine, NDLR), après tout, c’est de sa commune qu’il s’agit.

Ce que nous voulons, c’est que le groupe dont dépend le site nous rende plus de volume de production et nous donne des garanties d’investissement dans les usines qui produisent les pièces. D’autant que la santé financière du groupe Magotteaux est bonne. Sigdo Koppers (la multinationale qui possède le groupe) a dégagé 134 millions de bénéfice net en 2015, et sur le site de Magotteaux-Liège, la productivité a augmenté de plusieurs pourcents la même année. Il faut qu’ils arrêtent de nous faire croire n’importe quoi ; la seule chose qu’ils veulent, c’est gagner plus pour leurs actionnaire.

Dans le même temps le gouvernement Michel clame créer des emplois grâce à sa politique. Qu’as-tu à dire à cela ?

Il ne faut pas rire : la seule chose que ce gouvernement fait, c’est attaquer le monde travail, il ne joue que pour les riches. Peut-être qu’ils ont – et encore – créés quelques emplois dans des PME, mais les seuls emplois que leur politique peut créer, ce sont des emplois de merde, dans de mauvaises conditions de travail et mal payés. Chaque attaque que lance le gouvernement, c’est pour le patronat ; et leur but, c’est de dézinguer le monde ouvrier pour de bon.

Comment peut-on arrêter ce gouvernement selon toi ?

Dans un premier temps, les syndicats doivent s’organiser pour mettre le plus de gens possible dans la rue ; mais un jour d’un côté et un jour de l’autre, ce n’est pas suffisant. Il faut aussi arrêter de faire chacun son truc dans son coin. On a besoin d’un vrai plan d’action construit pour changer la donne. Ce gouvernement, il va continuer : il fonce droit devant. Il faut le faire sauter, sinon il ne s’arrêtera pas. Le plan d’action qu’on a là, il est trop saucissonné : on a besoin d’un vrai front commun, et les directions doivent plus écouter leur base pour qu’il soit vraiment efficace.


Café syndical à Liège : « Comment renverser ce gouvernement de malheur? » Ce mercredi 29 juin, 18h30,
au Centre culturel “Le Zénith” (15, Rue Jean d’Outremeuse, 4000 Liège). Venez partager vos expériences et envisager la préparation d’un automne chaud contre Michel 1er avec des militants syndicaux et notamment GUSTAVE DACHE, vétéran du mouvement ouvrier à Charleroi. Métallo durant des années, il a été délégué à Caterpillar et à Citroën et a également très activement participé à la grande grève générale de l’hiver 1960-61.


Menace sur l'emploi chez Magotteaux

Partager :
Imprimer :

Soutenez-nous : placez
votre message dans
notre édition de mai !

Première page de Lutte Socialiste

Votre message dans notre édition de mai