Bolivie: Référendum frauduleux sur l’autonomie à Santa Cruz

L’opposition de droite et les riches tentent de diviser le pays.

Le moins que l’on puisse dire au sujet du référendum sur l’autonomie qui s’est tenu à Santa Cruz, en Bolivie, c’est qu’il était unique. Le référendum était contrôlé par un collège électoral pro-autonomie, administré par une entreprise privée contractée par les « autonomistes », supervisée par des observateurs électoraux qui étaient également pro-autonomie et enfin couvert par des médias pro-autonomie. Pas besoin d’être un fin observateur pour se rendre compte qu’il s’agit là d’une fraude.

Celso Calfullan, Santiago, CIO Chili, (article publié le 6 mai 2008).

Mais le plus incroyable, c’est qu’après une campagne menée par tous les médias pro-autonomie, après l’intimidation, après les menaces violentes de groupes comme « Unión Juventud Cruceñista » (un groupe avec des caractéristiques fascistes), les « démocrates » de Santa Cruz n’ont pas réussi à atteindre leur objectif. Plus de 50% de la population a voté contre l’autonomie ou s’est abstenu.

Néanmoins, les forces pro-autonomie ont déclaré que 85% des personnes avaient voté en faveur de leur proposition. Même Pinochet, l’ancien dictateur de droite du Chili, qui semble être d’une certaine inspiration aux forces pro-autonomistes en Bolivie, n’aurait pas eu le cran de sortir avec de telles conclusions après un référendum.

Ce référendum sur l’autonomie est la première étape d’un plan réactionnaire. Le mois prochain, d’autres référendums sur l’autonomie auront lieu dans les départements de Tarija, de Beni et de Pando. L’idée sous-jacente est de stopper le gouvernement de Morales et d’empêcher les changements que le gouvernement propose.

Le département de Santa Cruz et ces trois autres départements représentent ensemble deux-tiers du territoire bolivien, un tiers de sa population et plus de 50% du PIB de la Bolivie. Ce plan est également considéré par deux autres départements – Chuquisaca et Cochabamba – qui voudraient suivre les pas des séparatistes.

Le racisme et la division vont de pair

Même s’ils font de leur mieux pour l’occulter, l’attitude « diviser pour mieux régner » et le racisme des partisans de l’autonomie de Santa Cruz ressortent évidement des déclarations de ses dirigeants les plus importants. Les porte-paroles publics des « autonomistes » peuvent à peine cacher leur haine et leur mépris pour Evo Morales (qui est un indigène) quand ils l’accusent d’être un centralisateur, un autoritaire, un radical et un fondamentaliste. Leur slogan principal devrait être : « Pour une Bolivie sans indigènes ».

Le cynisme de ces dirigeants n’a aucune limite. Rubén Costas par exemple, le préfet du département de Santa Cruz, a dit que le référendum sur l’autonomie est une réponse au centralisme du gouvernement. Il est clair que l’objectif des « autonomistes » est de créer une telle tension et une telle polémique qu’on en vienne à une confrontation ouverte, chose qui inévitablement aura des conséquences dans les autres pays de la région.

Mais même avec le contrôle de l’économie et des médias dans les mains des « des autonomistes réactionnaires », ces derniers n’ont pas pu convaincre la majorité de la population de Santa Cruz de leur division et de leurs plans racistes.

L’autonomie de Santa Cruz pour les intérêts de qui ?

Plusieurs observateurs conviennent que l’idée de l’autonomie provient de quelques cent familles qui contrôlent plus de 25 millions d’hectares de terre ainsi que l’industrie agricole, le commerce domestique, les banques et les grands moyens de communication. Ces clans, ainsi que les politiciens qui ont fait partie des anciens gouvernements des ex-présidents comme Gonzalo Sánchez de Lozada, Jorge Quiroga ou Jaime Paz Zamora, sont devenus des adversaires puissants du gouvernement Morales. Ces gens possèdent cinq fois plus de terre que deux millions de paysans et ‘indigènes.

L’institut national de la réforme agraire (Instituto Nacional de Reforma Agragia – INRA) rapporte que cinq familles détiennent à elles seules un demi-million d’hectares de terres arables. Elles ont aussi l’avantage d’être près du marché et ont donc moins à dépenser en transport que les paysans de l’ouest du pays.

Avec l’arrivée au pouvoir d’Evo Morales, ces familles ont été confrontées à la possibilité que le nouveau gouvernement effectuerait des réformes pour redistribuer la terre en faveur des indigènes et des paysans, elles ont donc employé leur puissance pour créer un mouvement politique et social qui vise à diviser le pays afin de s’assurer que la nouvelle constitution élaborée par le gouvernement Morales ne soit pas applicable.

Contradictions au sein du gouvernement Morales

Malheureusement, Morales, et d’autres autour de lui, expriment plusieurs des grandes contradictions qui existent parmi le gouvernement. Le gouvernement doit être plus clair en expliquant et prenant effectivement des mesures concrètes pour mettre en application la réforme agraire. La terre doit appartenir à ceux qui la travaillent et doit garantir le droit à l’autodétermination des peuples indigènes, sans ambiguïté ou négociations vis-à-vis des propriétaires qui occupent le territoire.

La période qui a précédé ce référendum sur l’autonomie aurait dû être le moment durant lequel le gouvernement aurait dû passer à l’offensive en prenant les premières mesures vers la réforme agraire et en expliquant aux paysans indigènes et aux pauvres les objectifs du gouvernement. Cela n’aurait au contraire pas dû être le signal pour entamer des négociations avec les propriétaires.

La situation politique en Bolivie est trop compliquée pour compter avec l’ambiguïté. Ce n’est pas suffisant que le gouvernement affirme que le référendum était illégal quand l’opposition réactionnaire n’ s’occupe pas de la légalité, de la démocratie ou de la constitution puisqu’aucune ne sert à défendre ses intérêts. Le dialogue n’arrêtera pas la conspiration de l’oligarchie. La conspiration réactionnaire doit être brisée maintenant et avant que l’opposition de droite n’aient eu le temps de se renforcer.

Il est clair que la majorité des Boliviens, dans les villes et dans les campagnes, est contre les tentatives de division à l’instigation des parties conservatrices et réactionnaires de la société. La majorité de la population ne peut pas être emprisonnée par une petite minorité d’oligarques.

Nous devons démocratiser le pays

L’unité des travailleurs et des indigènes est fondamentale pour défendre le processus bolivien. Nous ne pouvons pas accepter que la terre soit concentrée dans les mains d’un petit nombre de familles. Nous ne pouvons pas accepter que la majorité des usines soient contrôlées par un petit nombre d’employeurs. Nous ne pouvons pas accepter que les moyens de communication soient concentrés dans les mains de quelques uns. Tout ceci est injuste et totalement antidémocratique.

La terre doit appartenir à ceux qui la travaillent. Les usines appartiennent à ceux qui produisent. Les médias doivent être au service de la totalité de la population et non pas au service d’une minorité d’oligarques.

Il est impossible d’avancer sans marcher vers le socialisme. Les travailleurs ont besoin d’une démocratie des travailleurs, ils ont besoin d’une société socialiste.


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