Le mois dernier, un jury populaire (Cour d’Assises) s’est prononcé pour l’acquittement d’un homme qui avait assassiné sa femme. Son avocat Jef Vermassen, a justifié l’acte par une «impulsion irrésistible». D’autres ont invoqué que 3 heures avant l’assassinat, l’accusé avait découvert que son épouse était amoureuse de quelqu’un d’autre (il n’y avait donc même pas d’adultère, mais juste des sentiments pour une tierce personne). Cette idée l’aurait alors poussé à l’acte: 8 coups de couteau mortels. A la suite de ce procès, les journaux ont mené un «débat de société» sur la légitimité d’un jury populaire, débat durant lequel les dernières miettes de démocratie encore présentes dans notre système judiciaire étaient clairement remises en question.
Marijke Decamps
L’individuel est politique!
Dans ce débat, il manquait pourtant un aspect important. En effet, le cas de Natacha, la victime, n’est pas un cas isolé. Il n’y a pas si longtemps le Conseil de l’Europe affirmait que la violence conjugale était la plus importante cause de handicap pour les femmes entre 16 et 44 ans. En Belgique il y a 7 viols par jour. Et ce ne sont que les chiffres officiels. La majorité ne sont jamais déclarés: par honte, par incompétence des services d’aide, par peur de représailles,…
La famille est donc un lieu très peu sûr pour les femmes. En même temps, de plus en plus de femmes «choisissent» de rester à la maison, ou de travailler à temps partiel pour pouvoir s’occuper des enfants, faire le ménage,… Un choix libre? Ce n’est pas par hasard qu’aux Pays-Bas de plus en plus de femmes font ce choix. Depuis que les crèches ont été privatisées et que les prix s’en sont vus fortement augmentés, de moins en moins de femmes ont encore les moyens de se payer ce service. Pendant les vacances, la ville de Gand a elle aussi augmenté drastiquement le prix des crèches.
C’est pourquoi beaucoup de femmes se voient obligées de rester à la maison, ce qui diminue encore plus leurs chances de trouver un emploi. S’il faut choisir qui reste à la maison pour prendre soin des enfants, on se tourne rarement vers la personne qui a le revenu le plus élevé. Et dans notre société «moderne», les femmes gagnent en moyenne 72% du salaire des hommes.
Jury populaire?
On peut gloser à l"infini sur la légitimité du jury populaire. Mais quel est le sens d’un jury populaire lorsque le verdict final est de toute façon tributaire des arrangements entre les magistrats? Procès au terme duquel ces «sages» bien rémunérés peuvent peuvent toujours invalider un verdict populaire qui ne leur conviendrait pas. Les avocats restent dans ce système les seuls à maîtriser toutes les procédures légales.
Pensons-nous qu’une punition exemplaire pour tous les coupables de violence conjugale soit la solution ? Bien sûr que non. Nous devons évidemment veiller à ce que les victimes se sentent en sûreté, mais nous devons surtout faire en sorte que s’opère un changement structurel.
Actuellement, les prisons sont surpeuplées. Le problème est qu’elles ne sont utilisées que pour mettre les gens à l’ombre- et pas pour s’en occuper. Nous pensons que les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités, mais là non plus, nous n’allons pas attendre bien sagement; car ces changements ne tomberont pas du ciel. Nous pouvons lutter contre la violence conjugale par des campagnes sur les lieux de travail, dans les quartiers, les écoles, les universités,… La position de second rang des femmes doit être résolument combattue, en mettant en avant une alternative véritablement socialiste. Les richesses de la société doivent être utilisées pour augmenter le niveau de vie de chacun et pour libérer les femmes du mépris capitaliste.