Tous ensemble contre le ‘Plan Stratégique du Recteur’ !

ULB

Depuis quelques mois déjà, le recteur de l’ULB, M. Ph.Vincke, concocte un plan de réformes concernant la politique à mener dans les années à venir sur notre université. Enrobé d’une myriade de phrases aux consonnances attractives («promotion de la réussite», «défense de l’égalité des chances»,…), ce plan, appelé le ‘Plan Stratégique du Recteur’, n’est rien d’autre qu’une nouvelle attaque en règle contre la qualité de notre enseignement, attaque dont l’étendue porte directement atteinte à de larges pans de la vie de notre université et franchit un pas supplémentaire vers la privatisation. Un document présentant ce Plan Stratégique a fait l’objet d’une discussion lors du Conseil d’Administration du 18 février, et devrait être remis sur la table pour être soumis à approbation lors du prochain CA, le 21 avril.

Etudiants de Gauche Actifs-ULB

Ce plan est défini comme une « feuille de route pour les prochaines années» définissant 10 axes stratégiques visant à promouvoir une « attitude proactive » face au paysage universitaire de plus en plus complexe auquel doit faire face l’ULB. Pratiquement, il s’agit d’un panel de mesures néo-libérales visant à positionner l’ULB dans le contexte de compétition internationale que se livrent les établissements supérieurs et universitaires entrés dans l’ère Bologne.

Le recteur affirme dans son projet que l’ULB applique une « politique sociale », visant à « donner à chaque étudiant, quelle que soit son origine, une chance réelle de réussite ». Le recteur a visiblement la mémoire bien courte : les dernières années ont été marquées par une série d’attaques profondément anti-sociales de la part des autorités universitaires de l’ULB. La privatisation de nombreux services sur l’université (restaurants, foyer étudiant, service de nettoyage, sécurité, …) n’en est qu’un seul exemple. Les prix de plus en plus élevés des logements et autres services alloués aux étudiants sont autant d’obstacles supplémentaires aux moins fortunés d’entre nous pour pouvoir étudier dans de bonnes conditions. Un nombre croissant d’étudiants sont ainsi forcés de travailler à côté de leurs études pour subvenir à leurs besoins. Selon une étude comparative réalisée l’an dernier, globalement les étudiants-salariés ont 40% moins de chances que les autres de réussir leurs études. Cela ne correspond pas vraiment à notre vision d’une « politique sociale. »

L’ULB : vers une université d’élite ?

Les politiciens traditionnels et les recteurs n’hésitent plus à recourir régulièrement au terme d’ « universités d’élite » lorsqu’ils évoquent le processus de Bologne. Pour ceux qui s’en souviennent, l’ancien recteur de l’ULB De Maret avait déjà déclaré : « Le 21ème siècle sera le siècle des universités d’élite. L’ULB en fera partie ». Le ‘Plan Stratégique du Recteur’ s’inscrit exactement dans cette logique. L’insistance avec laquelle ce dernier fait référence au système des ‘rankings’ internationaux (c’est-à-dire les classements mondiaux des universités les plus prestigieuses) est éloquente à ce titre. La direction de l’ULB veut jouer dans la cour des grands, afin d’être capable de rivaliser avec les autres universités européennes et américaines, et élever sa place dans le ‘hit-parade’ des universités les plus élitistes. Ne soyons pas dupes ! Les critères de ces classements ne sont pas basés sur des aspects démocratiques ou sociaux, mais sur des critères de prestige, d’élitisme et de sélection qui poussent les universités et Hautes-Ecoles à attirer les étudiants dont les chances de réussite sont les plus grandes, c’est-à-dire avant tout les étudiants issus des milieux les plus fortunés. Ce qui se dessine derrière cette compétition internationale est de plus en plus palpable : un enseignement à deux niveaux, avec d’un côté des institutions de pointe accessibles uniquement aux surdoués et aux étudiants riches ; de l’autre, des institutions de second rang sous-financées pour la masse des étudiants issus de milieux plus modestes. Une telle logique a donc un prix : un simple coup d’oeil sur les montants exorbitants des minervals et droits d’inscription exigés dans les prestigieuses universités anglo-saxonnes suffit pour s’en convaincre.

Suppression massive de cours en perspective

Selon le recteur, « la promotion de la réussite et de l’égalité des chances passe aussi par une réflexion approfondie sur l’harmonisation de notre offre d’enseignement avec les ressources humaines dont nous disposons. » Il n’est malheureusement pas expliqué comment le recteur va s’y prendre pour promouvoir la réussite en tronçonnant dans l’offre des cours disponibles : en effet, tel est bien l’idée qui sous-tend cette « harmonisation ». Selon les propres dires du recteur, « Aujourd’hui, les ressources humaines dont nous disposons dans le Corps académique et le Corps scientifique devraient nous permettre d’offrir un ensemble d’environ 2500 cours de 2 ou 3 ECTS. Or, actuellement nous en offrons entre 4000 et 5000 dans nos programmes…Il n’y aura pas de miracle, nous ne recevrons pas de la Communauté française 50 nouveaux professeurs. Il faudra réfléchir à notre offre d’enseignements et la revoir à la baisse quitte à développer des partenariats avec des universités voisines pour rationnaliser l’offre d’enseignement… »

Une rationnalisation de l’offre des cours, cela signifie concrètement faire des économies sur le dos des étudiants et du personnel. Etrangement, peu de publicité a pourtant été faite envers ces derniers afin de les avertir que cette politique d’« harmonisation » a déjà commencé depuis plusieurs mois : certains cours de la filière indo-européenne par exemple (Sanskrit, Iranien ancien, Grammaire comparée), ont été largement réduits en nombre d’heures, voire supprimés. Et ce n’est qu’un début. Dans la logique d’un enseignement davantage orienté vers le marché, les orientations qui ne sont pas intéressantes pour les entreprises, à vocation plutôt sociale ou intellectuelle, passeront progressivement à la trappe. C’est dans la même optique que le ministre Vandenbroucke prépare un nouveau plan de rationalisation dans l’enseignement supérieur et universitaire flamand, visant à supprimer toutes les orientations qui comptent moins de 115 étudiants. Quelques 130 formations sont ainsi menacées, essentiellement dans les filières artistiques et scientifiques.

Notre université n’est pas un marché !

La conception néo-libérale de l’éducation est celle d’un produit de marché plutôt que d’un service public. Résultat des courses : en trois décennies, le financement public de l’enseignement a littéralement fondu, alors que, en toute logique, les besoins générés par l’augmentation du nombre d’étudiants aurait dû impliquer une courbe dans le sens opposé. En 1980, le gouvernement dépensait encore 7 % du PIB pour l’enseignement. Depuis, ce pourcentage a chuté à 4,9 %. C’est pourquoi, depuis des années déjà, EGA met en avant la revendication d’un refinancement public de l’enseignement à hauteur de 7% du PIB.

La diminution de la participation de l’Etat au financement de l’éducation sert de credo aux autorités rectorales pour justifier les mesures d’austérité ainsi que le recours à des modes de financement ‘alternatifs’. En clair, il s’agit de plus en plus d’aller chercher les fonds dans la poche des étudiants ou dans le secteur privé.

Le recours au financement privé est précisément la voie prônée par le rectorat pour refinancer la recherche. Arguant des ressources limitées de la Communauté Française, le recteur propose ainsi le développement d’une politique de « fundraising », dont la première campagne débuterait lors de la rentrée académique 2009-2010. Le fundraising consiste à aller faire la quête -essentiellement auprès des entreprises- pour leur demander des fonds. Les conséquences d’une telle politique sont évidentes: une orientation de la recherche vers les intérêts de profitabilité des entreprises, une dégradation du statut des chercheurs, etc.

Liberté d’expression menacée

L’application de mesures néo-libérales sur notre campus ne peut que susciter des réactions de plus en plus larges de la part des étudiants et du personnel. C’est pourquoi les autorités universitaires se préparent à des lendemains plus ‘agités’ : le rectorat entend pouvoir museler toute velléité de résistance de la part de la communauté universitaire. C’est dans cette logique qu’il faut comprendre les récentes mesures restreignant la liberté d’expression sur le campus : auditoires payants et difficilement accessibles pour les étudiants comme pour les enseignants en-dehors des cours, difficultés à pouvoir diffuser des tracts sur l’avenue Paul Héger, espace d’affichage restreint, paperasse administrative de plus en plus lourde, interdiction de toute action sur le campus sans autorisation préalable du recteur trois semaines à l’avance, etc.

Quelle réponse ?

Les mesures proposées par la direction de l’ULB ne peuvent se comprendre que placées dans un contexte plus général. En effet, l’université n’évolue pas en vase clos, et les étudiants ne sont pas les seuls à subir des attaques. Alors que de plus en plus de travailleurs et d’allocataires sociaux sont confrontés au problème du pouvoir d’achat, et que les grosses entreprises réalisent des profits gargantuesques, la déclaration gouvernementale de Leterme Ier entend encore renforcer la flexibilité sur le marché du travail, accélérer la chasse aux chômeurs et arroser le patronat de nouveaux cadeaux fiscaux. Nous ne pouvons dissocier ces attaques de celles qui sont menées dans l’éducation : les unes commes les autres sont destinées à satisfaire la soif de profit d’une minorité de capitalistes et d’actionnaires, pendant que la majorité des travailleurs et des jeunes subissent une dégradation perpétuelle de leurs conditions de vie, de travail et d’études. Tous les partis politiques traditionnels adhèrent à cette logique néo-libérale, y compris ceux qui prennent la peine de se voiler d’un vernis ‘social’. Il suffit de dire que les ministres prétendûment ‘socialistes’ sont depuis des années à l’avant-poste pour mener les assainissements dans l’enseignement, qu’il soit primaire, secondaire ou supérieur.

C’est pourquoi il est indispensable d’élargir notre combat aux travailleurs, ainsi qu’à la construction d’un outil politique indépendant du patronat, un parti qui puisse réellement relayer nos intérêts. L’an dernier, lors de la lutte qui émergea à l’ULB contre la vente des kots et de la moitié des terrains de la Plaine, les syndicats, le personnel et le corps académique n’ont à aucun moment été appelés à soutenir et à s’impliquer dans la lutte. Nous pensons qu’il s’agissait là d’une erreur que nous ne pouvons réitérer ; si nous voulons lutter de manière efficace, il sera indispensable de lier nos luttes à celles du mouvement ouvrier, notamment celles qui se mènent en ce moment même pour une revalorisation du pouvoir d’achat.

  • Non au Plan Stratégique du Recteur ! Aucune suppression de cours ! Luttons pour la défense de chaque emploi !
  • Non au processus de Bologne et à la marchandisation de l’enseignement ! Stop aux privatisations des services sociaux ! Pas d’ingérence du secteur privé sur la recherche !
  • Non aux augmentations des droits d’inscriptions ! Pour un salaire étudiant !
  • Pour un refinancement public et massif de l’enseignement à tous les niveaux, à hauteur de 7% du PIB minimum !
  • Pour un enseignement gratuit, de qualité et accessible à tous et toutes !
  • Solidarité avec les luttes des travailleurs ! Pour une augmentation généralisée des salaires et des allocations !

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